Puisque c'est comme ça, je m'écris des rappels…

Comme beaucoup s’envoient des mails de rappels ou de listes, je vais tenter le coup. Pas de raison que vous n’en profitiez pas.  J’ai plein de chose à faire avant le 31 janvier :

  • Prendre RV chez Acromion pour mon frottis
  • Aller chercher ma nouvelle carte bancaire
  • Prendre RV chez le dentiste pour la visite de routine
  • Aller chercher ma nouvelle carte bancaire
  • Aller rendre visite à ma soeur en en profitant au passage pour aller voir la fin des soldes dans la galerie marchande de Carrouf
  • Aller chercher ma nouvelle carte bancaire.
  • Faire une liste de mes 10 bonnes résolutions que je ne tiendrai pas mais que Delphine attend de pied ferme
  • Aller chercher ma nouvelle carte bancaire.
  • M’occuper de mes plantes vertes, à savoir jeter celles qui n’ont pas survécu, parce que je les ai oubliées sur le balcon. Bon OK c’est une honte, mais c’est la première fois de ma vie que je laisse crever une plante, normalement j’ai la main verte
  • Aller chercher ma nouvelle carte bancaire.

Et comme je me connais…

  • Aller faire mes courses le samedi 31 sans soucis aucun, bien sûr
  • Le lundi 2 février, en rade d’essence, au distributeur automatique, découvrir que MERDE J’AI OUBLIE D’ALLER CHERCHER MA NOUVELLE CARTE BANCAIRE ! Et bien sûr la banque est fermée jusqu’au mardi…

C’est à chaque fois la même chose.

Donc je rajoute un item à ma liste :

  • Refaire le plein d’essence vendredi 30 janvier. A rampion pour les courses, le lundi, je pourrai toujours payer par chèque…

La vie n’est qu’un long calvaire et les cartes bancaires non immortelles quoique théoriquement imputrescibles…

Ah et puis :

  • Si par miracle je pense à aller chercher ma carte bancaire à temps, prévenir mes lecteurs… On n’est jamais trop prudente 🙂

Nos visiteurs…

Lorsque l’on tient un blog, on a forcément des visiteurs, plutôt beaucoup, plutôt ce sont les vacances, plutôt pas assez quand on débute, plutôt ça plafonne et c’est la vie. Avec les commentaires qui vont avec, à savoir aucun commentaire quand on débute avec 10 visiteurs par jour (un hasard), beaucoup de commentaires et merci beaucoup à certaines heures tristes de la vie, une moyenne à laquelle on ne fait plus attention le temps passant.

Il n’empêche que nos (mes) visiteurs se déclinent de plusieurs manières :

  • L’habitué depuis le début quasiment, ou habitué depuis peu, enfin l’habitué. Il vient tous les jours, commente ou non. Parfois on a fait connaissance, parce que l’on est un habitué chez lui également et que l’on sait que nous avons des atomes crochus quelque part. On ne se croit pas d’obligation de commenter de part et d’autre si l’on n’a rien d’intéressant à dire, et également aucun n’ira chouiner chez l’autre : « ça fait longtemps que tu n’as pas commenté chez moi ». Tout se passe dans la sérénité et une certaine amitié certes de Oueb, mais amitié tout de même.
  • Il y a le pervers qui débarque via une gogolesque request « jeune fille avec vagin rasé » et que gogole a dirigé chez moi allez savoir pourquoi. Il se tire immédiatement devant mes démêlés avec Truchon ou la commémoration d’Oradour sur Glane.
  • Il y a le ou la paumé(e) qui cherche un sort contre le mauvais sort, et que si ça marchait, cela se saurait. Devant la pauvreté de la catégorie « sorcellerie, magie et autre », ils me contactent directement. Généralement j’essaye d’être gentille avec les vrais paumés qui me demandent ce qu’il faut pour : que le père ne boive plus, que la mère ne boive plus, comment faire passer l’enfant non désiré à 15 ans, puis-je parler de l’inceste dont j’ai été victime, j’en passe, la détresse réelle est insondable. Par contre je suis peu amène avec les landru en puissance, les tueurs de belle mère et autres que je menace de dénoncer au fisc et aux flics avec leur adresse IP Généralement ça les calme et ils ne reviennent pas (et c’est fou ce qu’il peut y avoir comme tueurs en puissance…)
  • Il y a le nouveau lecteur enthousiaste, ça fait toujours plaisir, qui annonce qu’il va tout lire du coup parce que c’est trop top. L’hiver, ça va pour les chevilles, l’été, l’oedème menace sauf pour les étés 2007 et 2008.
  • Il y a le nouveau lecteur pas du tout enthousiaste qui a lu les 14 dernières publications pour venir critiquer et dont on se demande comment il a eu le courage de lire 14 posts. Car critiquer il ne s’en prive pas du tout, c’est son truc. Alors nos posts c’est moralisateur à mort, ou bien nous avons tout faux, ou bien nous racontons n’importe quoi, ou alors ce sont les violons à bas prix et trop faciles, rien ne va et surtout pas nous. En règle générale quand on blogue depuis un temps certain, un certain temps, on a l’oeil qui frise un peu à la lecture du commentaire dont on repère immédiatement l’emmerdeur ou l’emmerdeuse de première qui l’a écrit. On répond poliment au premier commentaire, on regimbe un peu au second, on ne répond pas au troisième. L’emmerdeur ou l’emmerdeuse satisfait(e), se dit que l’on n’avait rien d’intéressant à lui répondre et qu’il a bien fait de nous recadrer. Sauf qu’il oublie que l’on est chez nous et que l’on écrit ce que l’on veut. En plus c’est ballot, mais même une quiche comme moi peut le bloquer définitivement, avec un certain plaisir et supprimer ses commentaires indésirables.
  • Il y a l’inconnu qui passe et repasse, son adresse IP se répétant, mais qui reste silencieux, quoique fidèle. Un beau jour on va voir chez lui : on est en favori…

Comme dans la vie qui n’est qu’un long calvaire, nos expériences Oueb peuvent nous mener vers tout, n’importe quoi, le meilleur et le pire. Le meilleur étant les rencontres même pas décevantes au contraire, le pire étant de retrouver des emmerdeurs comme partout ailleurs… En vrai cela ne m’est jamais arrivé, mais en virtuel… (soupir).

Les joies de l'hiver…

Cela faisait un moment que l’on n’avait pas eu froid comme ça dans la région. Il y a 5 ans environ, il y a eu en janvier 10 jours à -10° s’accrochant, et les routes en patinoires, mais depuis, cela restait soft. Comme la planète se réchauffe, on a forcément oublié que peut-être qu’elle n’a eu qu’un coup de palu, ou bien que tout bêtement ce n’est pas parce qu’elle se réchauffe globalement, qu’en France il fera forcément tout le temps plus chaud.

Une probabilité pour nous étant des hivers de plus en plus froid, et des étés pourris… Mais bon, je ne suis pas l’ange de l’annonciation non plus…

Alors forcément on oublie…

Donc j’avais oublié, les joies de l’hiver…

  • Merde, il neige. Oui quand on est obligé de prendre sa voiture pour bosser, la neige n’est pas forcément très appréciée, même si cela rend le paysage plus joli.
  • Merde il continue à neiger. En plus le froid s’incruste et les collègues en voiture précisent que c’est une vraie patinoire.
  • Le lendemain il fait moins 7. Où : comment faire abstraction de 15 minutes de sommeil pour consacrer 15 minutes à décongeler Copine qui s’est révélée très décevante en conduite sur patinoire, par rapport à Titine qui tenait toujours la route. Copine chasse du cul, c’est une dragueuse…
  • La neige a durci. Forcément, elle ne risque pas de fondre. C’est patinoire, congères durcies, et risque grave de se tôler dans l’escalier de ma résidence. Parce qu’il y a 5 ans, il y avait des marches granitées et tout et tout, mais que le syndic a voulu nous faire dépenser des sous à refaire les entrées (avec escalier amenant au rez-de-jardin). Tout ça pour mettre du marbre qui glisse de peur à la moindre gelée…
  • On opte donc, quand on peut, comme moi, pour des chaussures style confortables et non glissantes, qui font la silhouette légère et genre « je m’en fous de ce qu’on pense de moi ».
  • Et puis le thermomètre continue à descendre. Je suis du style à épier météo France et à maudire les 20 minutes de sommeil en moins qu’implique la température prévue pour le lendemain matin. Temps de dégivrage et de roulage sur patinoire Y COMPRIS EN CENTRE VILLE (et que fait la commune ? je vous le demande)
  • Tout cela pour arriver au boulot et ne pas pouvoir débloquer la grille de fermeture, coincée par le gel/neige fondue reglacée. A mort. Il a fallu deux hommes arrivant en ricanant pour en venir à bout. Après l’avoir décoincée, ils ricanaient nettement moins.
  • Le 7 janvier à 7 H 25, Copine affichait – 12°, mes collègues en pleine Beauce sont allés jusqu’à – 17°. Là, Copine était carrément coincée dans la neige durcie, un peu fondue, redurcie du parking, qu’on se demande ce que fiche le gardien à ne saler que les escaliers, et jamais les places de parking libres la journée. Il faut faire exactement la même manoeuvre que la veille au soir, pour que Copine trouve ses marques à sa place, sinon elle broute…. (de toutes manières, Copine est une chieuse)
  • En plus avec les temps de chauffage, c’est le réservoir d’essence qui en prend un coup. J’ai même craint une fuite d’essence…
  • Mais le 7 janvier à 7 H 30, alors que j’attendais que copine chauffe un peu et que cela dégivre, j’ai eu une immense joie.

Si : immense. Vous ne devinerez jamais…

Cherchez un peu…

Si si, c’est elle.

C’est toujours elle…

Madame Vampire, évidemment déjà levée (elle est à la retraite, peut pas rester couchée sous sa couette par des températures pareilles ?).

Avec, à la main, pour son pare brise : SA SALIERE !

Faut dire que l’année des -10° elle avait pété son pare brise avec de l’eau bouillante. Moi je prends de l’eau très chaude dans une bouteille plastique solide (bouteille de lait, rien de tel, ça ramollit bien) que je promène à l’intérieur de mon pare-brise. C’est très efficace…. Mais jamais au grand jamais, je ne verserais de l’eau bouillante sur un pare-brise par – 12°…. Eventuellement de l’eau chaude + alcool à brûler en cas d’urgence, mais ça ruine les balais d’essuie-glace…

Et là, elle a commencé à saupoudrer son pare brise avec son sel de Guérande, et j’ai cru mourir de rire…

Sel sans additif + glace, c’était l’ingrédient indispensable des sorbetières d’antan.

Je suis partie alors qu’elle avait une espèce de mousse glacée sur son pare-brise, dont elle actionnait les essuies glace à fond la caisse. Moralité, le soir tout le monde a pu l’entendre pleurer/hurler dans le téléphone que ses balais d’essuie glace étaient DCD.

Faudrait pas rire comme ça… Mais là ça m’a rappelé qu’elle nous gonflait déjà il y a 5 ans, car quand elle avait pété son pare brise avec son eau bouillante sous mes yeux n’émerveillés, je n’avais pas du tout compati…

Je m’étais juste demandé où elle pouvait bien aller se promener à des heures pareilles…

Idem le jour des – 12°…

J’m’en vas enquêter à mon tour…

Et aujourd’hui c’est l’anniversaire de quoi ? (la chieuse)

J'adore le latin…

Surtout depuis que je n’en fais plus…

Mrs Bibelot avait fait « ses deux bacs » (il y en avait deux à l’époque et l’on rentrait glorieusement en « philo ») avec latin-grec comme options principales. Il n’était pas question que je coupe au latin, malgré ma mine peu enthousiaste.

Elle voulait faire médecine et tout le monde lui avait dit que pour faire médecine il fallait savoir le latin (pour dépister pasteurella pestis, c’était n’importe quoi, mais tout le monde y croyait)… Elle a donc galéré comme pas possible en PCB (Physique, Chimie, Biologie, à son époque) avant de débuter ses études en fréquentant le quartier latin, car il lui fallait se mettre à niveau par rapport à ceux qui avaient fait « moderne » (pas de latin et surtout pas de grec, mais ce qui était nécessaire et lui manquait).

Elle traduisait Homère dans le texte. Tout se perd un jour à ne pas le pratiquer et elle a quasi oublié son grec (elle s’est plantée dernièrement sur une définition de mots croisés sadiques où il faut mettre la case noire soi-même, mais j’y reviendrai…)… Pour le latin elle était vraiment chiante donc elle n’a pas eu vraiment l’occasion de perdre la main, via moi, ma soeur cadette, et Pulchérie qui ADORAIT le latin…

Oui, Pulchérie adorait le latin qu’elle n’a abandonné qu’en terminale pour se consacrer à ses maths chéries (oui c’est ma fille…). Elle adorait en effet également les maths et particulièrement le théorème de machingore, la physique quantique et les équations au 16ème degré (j’ai mis au monde une enfant anormale, je le réalise tout juste). Tout cela pour finir comme designer chez X très coté… Elle adorait à tel point le latin qu’elle n’arrêtait pas de nous faire des citations latines à une certaine époque. D’où la riposte fameuse (dans la famille), de Delphine exaspérée qui lui lança un beau jour « va dans le métro Satanas » !

Donc Mrs Bibelot m’obligea à prendre « latin » en option… J’étais contre, les déclinaisons je ne percutais pas vraiment et ces salauds de latins en avaient des tas. Elle m’a refait le coup avec l’allemand et là encore des déclinaisons, quasi les mêmes mais quand on n’aime pas le café, on n’aime pas le café… C’est le truc que je ne supportais pas. Je ne supporte d’ailleurs toujours pas, je n’arrive pas à décliner dans ma tête spontanément, autre chose que des conneries… (nominatif, vocatif, accusatif, génitif, datif, ablatif, poil au pif)

Mais j’adore l’éthymologie, et là, forcément le latin me rattrape. Le grec aussi d’ailleurs. S’il ne fallait pas apprendre un nouvel alphabet à mon âge, je m’y mettrais bien, en plus ils étaient normaux, ils ne déclinaient pas eux…

J’adore lire que la « manipule » était un morceau d’armée de 10 hommes, donc, facile à « manipuler » (d’où l’expression), qu’être « légion » c’est forcément beaucoup, que le grand égout de Rome s’appelait « cloaqua maxima », que le triomphe était une fête, gloire maximum pour celui qui avait vaincu ou fait quelque chose qui en valait la peine : c’était la récompense maximum à Rome, que décimer vient de la punition la plus dure dans l’armée : la décimation à l’unité qui a reculé : on prend un homme sur 10 et on les exécute tous coupable ou non… et j’en passe.

Malgré ma haine du latin en bas âge (11 ans), j’ai par contre toujours adoré l’histoire de Rome, Romulus et Remus, et les citations, petites histoires, ou réflexions sages :

  • « Si tu veux la paix, prépare la guerre’ (ci vis pacem para belum) (que me cita Mrs Bibelot quand adolescente je croyais que la guerre était là parce que la France peaufinait son capital bombe A et H) : qui est toujours resté d’actualité

  • Je préfère être le premier dans ce village que le second dans Rome- JC  (Jules César, pas Jésus Christ !)

  • La roche tarpéïenne n’est pas loin du capitole (à traduire, c’est la question piège du post)

  • N’oublie jamais que tu n’es qu’un homme (à celui qui avait mérité son « triomphe »)

  • Ils ont vécu (pour ne pas dire : ils sont morts : on vient de les trucider)

  • Mieux vaut laisser s’enfuir un coupable que de condamner un innocent

  • Il faut rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu (à vous de juger)

  • Il faut détruire Carthage (Delenda est Cartago) pour le rabâchage ! Ah oui les filles Caton était atteint de radotage bien avant moi, qui commençait tous ses discours par cette phrase et les terminait par la même (mais il a eu, je le pense, plus de résultats que moi… car il n’était pas question de pince à épiler. Mais c’est tout de même à force de l’entendre déclarer « il faut détruire Carthage, que le sénat s’est résolu à faire quelque chose). L’horreur de la chose étant que Carthage a été effectivement totalement détruite, mais que je ne reverrai jamais mes chères pinces à épiler…

Donc régulièrement je m’y colle (au latin et à l’histoire de Rome), en restant complètement nulle sur l’histoire concernant « de Napoléon à 1958 ». C’est simple moi c’est : l’Egypte (ancienne bien sûr), l’histoire de Rome, le moyen âge, la guerre de 100 ans, la renaissance, la révolution et très vaguement, de loin, Napoléon… La deuxième guerre mondiale est une exception parce qu’on m’en a beaucoup parlé dans mon enfance…

Je suis aussi anormale que Pulchérie qui adorait ses maths, en adorant mon latin… Mais j’ai du mal… Avec l’âge la capacité d’apprentissage n’est plus la même qu’à 12 ou 13 ans (c’est là que l’on est con, et on ne le sait même pas)

La vie n’est qu’un long calvaire quand on veut se mettre finalement, à décliner (rosa, rosa, rosam…)

Trop tard ma vieille, t’es trop vieille !

Et la solidarité, on s'asseoit dessus ?

13 janvier 2009. Journée un peu morose au boulot, date anniversaire pour ma collègue d’en face, du jour où elle a enterré son fils ainé qui n’avait eu que 16 années à vivre. Il pleut, il fait moche même si le froid s’éloigne un peu, et la voir se perdre de toute évidence dans ses souvenirs me fait un peu mal.

Il y a des journées comme celles-ci. A 17 H tout bâclé, je pars vers la maison, enfin mon appartement, mon immeuble, mon chez moi douillet pour moi.

La route privée de ma résidence, fait pour moi un U avant que je ne puisse me garer. Un petit rondpoint gère les déplacements et joue les ralentisseurs. J’ai une place privée. Puis, conception de l’immeuble oblige, il y a une marche à monter, puis un petit escalier à descendre pour rejoindre le hall. Cela a permis de mettre des appartements en rez de jardin et de ne pas sacrifier un appartement pour faire hall d’entrée (sauf que bien évidemment l’architecte a fait n’importe quoi en mettant une marche à monter et non pas une de moins à descendre, ne cherchez pas, ce sont les architectes…). Ne vous en foutez pas c’est important : le ralentisseur, et la topographie des lieux…

Donc à peine arrivée à hauteur de ma place pour me garer, je la vois. La vieille dame. Elle est assise sur la petite marche et il est clair pour moi qu’elle est tombée et n’arrive pas à se relever. Je fais ma manoeuvre rapidement : elle ne quitte pas ma voiture des yeux, et en me voyant en descendre, me fait un signe tremblant de la main.

Evidemment, je me dirige vers elle. Sa main droite saigne, elle a du sang plein le visage, elle tremble.

Oui elle est tombée, et n’arrive pas à se relever. 4 voitures sont passées sans s’arrêter dont une qui s’est garée un peu plus loin, de laquelle sont sortis 4 jeunes qui sont rentrés direct dans le hall d’à côté.  Il fait encore jour, on ne peut pas ne pas la voir. Elle a froid, elle a peur, elle ne pourra jamais se relever toute seule. Elle sert étroitement son sac et sa canne.

Aïe, elle pèse plus lourd qu’il n’y paraît. Je n’arriverai jamais à la relever toute seule. Je vais poser mon sac et mon parapluie dans l’entrée et elle crie « ne m’abandonnez pas ». Non je ne l’abandonne pas, je lui ai dit « je reviens ». Arrive un minot rescapé du collège, je le connais bien. Il s’arrête près de la dame et sur un signe de moi, la rassure. Non je ne l’ai pas abandonnée, elle n’est pas abandonnée, il reste à côté d’elle après m’avoir crié que son père n’est pas rentré, d’un air navré.

Des jeunes hommes valides (3 désormais) dans le hall, aucun n’est rentré. Je remonte le petit escalier, et j’essaye en la prenant à bras le corps, aidée du minot qui semble terrifié et affolé. C’est un poids mort qui tremble et là, passe une voiture sans s’arrêter.

Si mes yeux avaient été des pistolets je lui flinguais ses roues et sa carrosserie à ce connard. Il ne va pas me faire croire qu’il n’a pas vu une vieille dame assise sur la petite marche, les fesses dans l’eau, et moi et le minot essayant de la relever ? Si il me le fera croire si je le retrouve et il ne faut pas que je le retrouve, alors que 4 pneus c’est si vite dégonflés…

Et là, elle pleure, elle se voit mourant là de froid et d’injustice. J’épie les fenêtres et qui est chez lui. Miracle, le voisin du dernier étage s’il n’est pas de prime jeunesse, est un homme visiblement encore très bien portant. Je sonne chez lui et le voici qui arrive avec sa femme, tous les deux catastrophés.

Difficile à nous deux de relever la vieille dame et il y a l’escalier à descendre. Le minot toujours un peu pâlot prend la canne et le sac à main, et péniblement nous arrivons à la faire arriver dans le hall. Combien de pas hésitants et tremblants, d’arrêts ? Qu’importe.  A chaque marche c’est la peur de la chute pour elle et nous, l’impression qu’un brancard serait bien utile. Elle pèse combien cette dame ? 45 kg tout mouillé, mais c’est le poids mort. Dans le hall cela s’anime un peu. La femme du voisin est là, qui a averti une autre vieille dame qui a toute sa tête. Faut-il appeler les pompiers ? Non pas à notre avis. Elle s’est juste ouvert la main sur une arête coupante de marbre contre lequel tout le monde vocifère depuis 4 ans, et le sang sur le visage c’est quand elle s’est essuyé les yeux. Quand elle a pleuré.

Ma voisine la connaît bien, et se précipite pour aller prévenir les enfants qui sont proches et dont elle a les coordonnées. Elle a les coordonnées de tout le monde et Je la soupçonne d’avoir les numéros de portables des filles, dieu sait comment. Mais la dame ne peut pas rentrer toute seule chez elle, personne ne l’envisage. Hésitante et toujours tremblante, elle s’accroche à mon bras, et lâche le monsieur, qui s’assure qu’à nous deux cela ira.

Aller jusqu’à l’ascenseur, la faire entrer, récupérer son sac et sa canne. Puis ouvrir chez elle. C’est joli comme tout. Pas mon petit nid douillet, les meubles ce n’est pas trop mon style, mais les 5 pièces dans ma résidence sont terriblement bien conçus.

Je l’aide à déboutonner sa veste de fourrure, elle n’y arrive pas. Elle tremble tellement… Elle est bien mise et coquette et en moi chemine la question « et si ? »

« J’avais mis de la fourrure pour ne pas avoir froid. Je sais que ce n’est pas bien, mais que voulez-vous, cette veste me vient de ma mère…

Passe un temps réellement mort…

« J’ai Parkinson mademoiselle. Normalement je n’ai pas le droit de sortir, ce sont toujours mes enfants qui m’emmènent et m’accompagnent quand je le désire. Mais là, après cette neige et ce froid glacial, j’ai eu envie d’aller en ville toute seule, d’être autonome. J’ai réussi à aller boire une tasse de thé « chez Dorothée », et je suis revenue doucement, j’étais contente »

« Mais j’ai Parkinson mademoiselle. Et on ne sait jamais quand ça reprend. Ma jambe a tremblé comme je voulais monter cette maudite petite marche et je suis tombée. Comme un bébé qui apprend à marcher, sauf qu’un enfant ça se relève tout seul mademoiselle. Et je suis restée là, toute seule, assise, à regarder les voitures passer alors que je leur faisais signe. Quand je vous ai vue vous garer, je n’avais qu’une peur : que vous passiez à côté de moi en faisant semblant de ne pas me voir »

Elle tremblait toujours « de froid » et pleurait à nouveau, contemplant sa main coupée avec étonnement. Elle m’a indiqué comment nous faire une bonne tasse de thé, je l’ai installée dans ce qu’elle m’a indiqué comme étant SON fauteuil et sur ses indications je suis allée chercher une compresse dans la salle de bain pour désinfecter une coupure nette et pas grave. Et une autre pour laver ce sang de ce visage, dont je voulais m’assurer qu’il n’était pas le résultat d’une blessure.

Et puis elle a bu sa bonne tasse de thé avec un plaisir évident, et moi la mienne pour ne pas la désobliger (au jasmin, berk…) en faisant comme tous les Parkinsoniens, en s’aidant de son autre main. Elle a un peu arrêté de trembler et m’a déclaré ne plus avoir froid mais qu’elle avait un châle dans sa chambre à tel endroit, que je suis allée lui chercher. Je n’ai pas voulu le lui mettre, (elle s’est parfaitement débrouillée toute seule) pour ne pas l’humilier d’avantage. Si elle n’avait pas réussi, bien sûr que je l’aurais enveloppée dedans…

J’étais ennuyée de la laisser seule, donc, ne voulais pas la laisser seule, mais apparemment les enfants sont vraiment disponibles pour leur mère. A peine le châle mis, sa fille débarquait, en alarme « maman ! » et s’est confondue en excuses et remerciements à mon égard pour m’offrir une deuxième tasse de thé au jasmin…

Et moi je regardais l’appartement si bien arrangé, cette vieille dame avec toute sa tête et encore une bonne dose d’inconscience, et je me disais enfin : « et si… et si c’était moi ? ».

Oui peut-être qu’un jour ce serait moi, la vieille dame inconsciente, voulant se prouver qu’elle le peut. Et je serais condamnée à rester à terre jusqu’à ce qu’une âme charitable normale s’inquiète de moi ?

Quand je suis redescendue, dieu soit loué, il y avait des gens qui m’attendaient pour me demander des nouvelles. Mais bien sûr, eux, dans leur appartement, devant la TV, ils n’avaient rien pu voir ni entendre et cela je le comprends tout à fait. Ma voisine m’a donné les n° de tel des deux enfants au caz’où et j’ai pu rentrer chez moi, un peu glacée malgré le thé (au jasmin, berk).

Car les autres, ceux qui sont passés sans seulement ralentir, donnant au fil des minutes certainement longues vu le sang qui décorait la dalle de marbre, à cette dame des angoisses à n’en plus finir. Eux ? Qui sont-ils ?

La solidarité on s’asseoit dessus ? Chacun pour soi et dieu pour tous ? Dieu reconnaitra les siens ? Moi d’abord, moi jamais ? Qui est seul au monde ?

Une main tendue, de la gentillesse, de la compassion, savoir être rassurant, demander de l’aide, rester à l’écoute, aider surtout, n’est-ce pas la moindre des choses ? N’avons nous pas appris à nos enfants à se mettre « à la place des autres ? » et même  au travers e des animaux, quand, telle Sophie ils découpaient des mouches ?

Le connard aveugle dans sa BM qui m’est passé sous le nez, alors que le minot faisait signe, qui est-il ?

Comme le dis la chanson des enfoirés « aujourd’hui nos paupières et nos portes sont closes, les autres sont toujours, toujours en over dose ». Une vieille dame assise sur un trottoir, un soir de janvier pluvieux et encore froid, c’est vraiment l’over dose ?

Je suis rentrée chez moi triste pour elle, mais la conscience en paix… En moi s’insinue juste la peur, la vraie. « Et si ? ». J’ai réalisé après qu’elle m’avait tout le temps appelé « mademoiselle ». Pour elle je suis une demoiselle. Que serais-je dans 10 ou 20 ans ?