A… comme Architectes…

psychose

Certaines personnes sont poursuivies par des architectes infâmes depuis leur plus tendre enfance.

Les architectes adorent concevoir des immeubles, bâtiments, etc… originaux, mais dans lesquels ils n’iront jamais vivre : pas si bêtes.

Cela leur permet de faire sortir du sol de grands ensembles immondes dont Sarcelle a été longtemps la vedette.


J’ai quant à moi commencé ma modeste existence dans un grand ensemble, dans un appartement chauffé par le sol. Belle invention très vite reprise (inutile de se demander où mettre les radiateurs). Cela peut vous ruiner les jambes à tout jamais, rapport à une circulation défectueuse.

Dans l’appartement de mon enfance, la salle de bain donnait dans la cuisine. L’architecte s’en fichait : lui habitait dans un hôtel particulier du quartier « résidentiel »

J’ai une prédilection particulière pour celui qui a conçu mon appartement actuel. En rétrécissant bêtement un placard, il a pu créer une alcôve assez grande dans mon entrée pour y loger la Victoire de Samothrace. Comme celle-ci est au Louvre, je n’ai eu qu’un choix : faire un autre placard moi-même (enfin c’est papa qui s’en est chargé). C’est ce que tout le monde a fait dans l’immeuble, en se demandant le pourquoi de cette alcôve. Sauf ceux qui ont des statues de valeur à y loger : il est bien connu que les riches collectionneurs logent dans des 4/5 pièces en banlieue parisienne : merci d’avoir pensé à eux.

Nous avons deux grandes baies dans le séjour/salon qui fait 10 mètres de long. Entendons nous bien : il y a une petite porte fenêtre à droite et une petite porte fenêtre à gauche. Faire de grandes baies OK, mais surtout pas de panneaux coulissants qui permettraient d’aérer en grand, l’été (encore que depuis quelques années on en éprouve moins le besoin). Non. On n’aère pas EN GRAND l’été, surtout quand on donne plein sud. Dès que la température extérieure dépasse les 25°, il faut descendre les stores et vivre dans une pénombre sépulcrale pour éviter d’étouffer. Car ce ne sont pas les deux petites portes fenêtre qui donnent de l’air. Quant aux baies proprement dites, ce sont des vitres fixes, de 3 mètres de larges par 2 mètres de haut : agréables certes et peu onéreuses à changer en cas de bris de glace.

Les concepteurs de locaux « à usage industriel » font aussi ma joie, et j’aimerais rencontrer l’architecte qui a conçu l’endroit où j’ai travaillé pendant 9 ans, chez Truchon, pour lui dire ma façon de penser, car il avait fait la totale.

Pour commencer, un escalier de taille immense qui réduit de moitié la surface habitable des trois étages : pratique en cas d’incendie et d’évacuation d’environ 10 personnes. Tout au long des murs : d’étranges tuyaux sans doute décoratifs, qui empêchent de mettre des étagères et armoires. Nous adorions ces tuyaux qui décorent (!) sans avoir la classe d’un tableau de Botticelli.

Plein sud, une façade en briques de verre, laissant bien passer la chaleur dès qu’il y a un brin de soleil, surtout l’été. Dès midi quand on posait la main sur la façade on avait l’impression de la poser sur un radiateur bien bouillant par moins 10° en février. Se tenir devant, juste où était placé le copieur, était un coup à tomber raide d’un coup de chaleur…

Au rez de chaussé, il faisait 2° de plus qu’à l’extérieur, et on prenait 3° par étage. Quand il fait 35 dehors, la comptabilité (au troisième) et le directeur, avaient l’impression d’être dans un four : il pouvait faire jusqu’à 43° voire pire (2003) et j’ai gardé un souvenir ému de cette canicule.

Pour couronner le tout, les fenêtres ne s’ouvrent que peu. Elle s’entrouvrent par le bas : impossible d’aérer. Il faut cuire tranquille. Et pour avoir des carreaux propres, faire appel à une entreprise spécialisée.

L’hiver par contre, on gelait. Apparemment la brique de verre laisse passer la chaleur dans les deux sens. Et pour avoir un 19° correct, il fallait mettre la société au bord du dépôt de bilan en mettant les radiateurs électriques à fond : la trésorerie avec laquelle finalement Truchon s’est barré un jour, ne pouvait pas y résister à l’entendre.

Nos locaux d’avant étaient du même acabit : on s’y gelait l’hiver et on transpirait l’été.

Quelques plaintes multiples glanées ça et là :

  • Les murs et cloisons dans lesquels on ne peut pas planter de clous et qui laissent filtrer le moindre soupir : éviter les tableaux de maître et les voisines nymphomanes.

  • Les murs qui ne laissent rien filtrer sur le plan bruit, mais qui attirent les moisissures en résistant toujours aux clous (prévoir un marteau piqueur pour accrocher la toile de maître).

  • Les portes mal placées : exemple : dans un certain nombre d’appartement on peut, en se débrouillant bien et en ouvrant les portes au bon moment, faire entrer directement les invités dans les toilettes au moment de leur arrivée (les y enfermer c’est plus drôle).

  • Ne parlons pas des portes qui s’ouvrent vers l’intérieur en faisant perdre une place de rangement, et qui nous empêchent d’aller porter secours à l’oncle Albert qui fait un infarctus dans les toilettes.

  • Il y a aussi les constructions modernes et décoratives. Comme la pyramide du Louvre à laquelle je ne me ferai jamais, et Beaubourg, généralement qualifié d’horreur. Surtout pour ceux qui le découvrent avec vision parallèle sur Notre Dame de Paris. (Je me demande si l’architecte de Beaubourg a une vue imprenable dessus. Cela m’étonnerait).

Merci Messieurs les Architectes.

La vie n’est qu’un long calvaire…

(Réédition d’un post de l’été 2006)

10 réponses sur “A… comme Architectes…”

  1. Oh la la merci pour le fou rire ! Je vois exactement ce que tu veux dire ! Et si tu voyais ma fac, toute neuve, tu serais pas déçue !

    La Halle aux farines, bâtiment près des Grands Moulins de Paris : Pour aller d’un hall à l’autre, deux solutions : Passer par le rez de chaussée, ou par le deuxième étage. Pratique quand tu vas du hall A au hall F, au même étage…

    Pour continuer, ils ont fait des économies sur la peinture : résultats, des murs en béton brut, très esthétiques, surtout quand ils sont retouchés (comprendre « rebouchés » XD). Un arrière gout de pas fini.

    Les toilettes ! Peinture rouge (porte et tuyaux) et noire (mur et carrelage) dans chaque cabine. Avec parfois du jour entre le mur et le cadran de la porte…

    Les autres immeubles du quartier… Euh comment dire… Ils servent d’exemple à l’école d’architecture d’à coté. Il faut les voir pour le croire… (des étages sans fenêtres ??? des immeubles « cassés comme du verre » ?? HEIN ? des feuilles en métal sculpté sur les façades ? => fussent mes réactions)

    Et enfin, la cerise sur le gâteau : la passerelle ! Quand on vient du métro, d’abord plate, s’incline, avec des marches dangereusement inclinées aussi, sur lesquelles on ne peut pas alterner les pieds : elles sont trop grandes. C’est toujours le même pied qui descend. Enfin, ça ne poserait pas de problèmes, si elles n’étaient pas inclinées à 30° (imaginez en hiver…) Ah oui, et l’ascenseur dédié aux handicapés sert de maison/pipi room aux SDF…
    Qui a envie de pendre l’architecte à sa passerelle ? =D

    1. Les architectes font partie de la famille « on en pend un sur deux, ça fera réfléchir les autres »…
      Je garde ton commentaire sous le coude pour apporter un plus à la prochaine réédition 🙂

  2. Sans compter les immeubles en béton des années 30, qui résonnent comme des cloches, on entend la moindre vibration de haut en bas , ET qui ne laissent pas passer les ondes pour les téléphones portables …

    Ceci dit, pour une fois, je ne suis pas d’accord avec toi, j’aime beaucoup Beaubourg, et la pyramide de Pei .

    En résumé, il y a des fautes esthétiques, pardonnables car « des goûts et des couleurs etc », et des erreurs techniques, qui, elles, sont proprement scandaleuses .

    1. Il est clair qu’il en faut pour tous les goûts…
      Tu m’as bien fait rire avec tes immeubles des années 30 qui, honte, ne laissent pas passer les ondes pour les téléphones portables 🙂

  3. Merci pour le fou rire que j’ai eu en lisant! Si je peux apporter ma petite anecdote, quand il a fallu agrandir mon collège, ils se sont rendus compte que les murs porteurs des bâtiments nouveaux ne portaient que dalle, après (et après seulement) avoir posé les tableaux noirs. Du coup, pour éviter que le toit nous tombe sur la tronche, ils ont rajouté une grosse colonne en béton d’un joli gris classe et raffiné, qui bloquait une partie du tableau noir (plus moyen de le rabattre, donc, et la prof de maths un peu boulotte devait se contorsionner pour écrire sur cette partie là). Mais c’était pas trop grave, parce qu’à l’autre bout de la classe, un an après la fin des travaux, un trou commençait à se former dans le sol…
    Et je précise que j’étais dans un collège plutôt bourgeois du sud de la France… Quand l’incompétence n’a pas de limites.

    1. Là, l’incompétence effectivement n’a pas de limites…
      Mais ce que cela coûte à la collectivité (dans le cadre d’un collège par exemple), ça n’a pas de limites non plus et c’est scandaleux !

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