La Grande Motte 2012 (5) LE DIPLOMATE…

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Stupidement j’avais donc suggéré pour le prochain dîner en vue (un ami d’il y a très très longtemps devant venir avec sa femme) de m’occuper moi-même du dessert…

Tout avait commencé avec le pain sec qui s’accumulait. Pourtant on ne pouvait pas dire que nous abusions du pain, puisque une baguette par jour à 3 personne laissait tout de même du reste.

Maman, rangeait scrupuleusement le pain dur dans un sac, comme chez elle, car une fois par semaine, elle s’arrête en revenant de courses pour le donner à deux petits ânes dans un champ (ces mignonnes petites bêtes…)

J’avais donc au bout de 8 jours, dit « vaguement » à Mrs Bibelot, qu’il serait peut-être bien de faire un petit pudding, avant d’aller nourrir quelques chevaux d’une vague promenade à cheval située à la sortie de la Grande Motte.

Qui dit « pudding » dans la famille, évoque immédiatement ma grand-mère paternelle Mrs Tricot, qui régulièrement venait passer le WE et apportait ce qu’elle appelait un « gâteau de pain ».

Délicieux, et dont elle a emporté la recette dans sa tombe, on ne peut compter sur personne.

Et puis, je me suis souvenu que la recette était dans une tombe loin de la Grande Motte, et j’ai décidé d’utiliser le pain (enfin une partie du pain), pour faire un diplomate. Recette que je connais par coeur, et que je maîtrise ultra bien. (Je n’ai pas l’air comme cela avec mon appartement en ruines, surtout la cuisine et la salle de bain, mais normalement je suis une très fine cuisinière).

Mon premier diplomate (un franc succès, régulièrement demandé par mes invités) était aux fruits confits. Pour les fêtes je le fais au chocolat et marrons, enfin bref, je maîtrise.

Sauf que ma mère était partie sur « un gâteau de pain » ou « pudding » (pour abréger mes souffrances quand j’écris, merci…).

La veille du jour J, je n’avais trouvé qu’un moule mou à cake, et j’étais un peu ennuyée, parce que les miens (de moules mous) ne supporteraient pas que l’on y fasse couler du caramel brûlant.

Qu’importe, j’avais trouvé l’astuce : j’allais faire un caramel au beurre salé, donc le laisser refroidir, et faire mon diplomate en toute tranquillité.

Mrs Bibelot a donc acheté du beurre demi-sel en me précisant que ma grand-mère n’en utilisait pas pour faire son pudding

J’ai répondu que j’allais faire un diplomate et non pas un pudding, et qu’il me fallait donc :

  • Des fruits confettis (Delphine quand elle était petite)
  • 6 oeufs
  • 1 litre de lait
  • 180 grammes de sucre
  • De l’arôme vanille
  • + le pain que je jaugerais moi-même, n’est-ce pas, bien sûr, ce qui l’a rendue soupçonneuse. Car d’ailleurs ma grand-mère ne mettait pas de fruits confettis dans son pudding… mais des raisins secs… (que je suis allée remettre à leur place dans le magasin)

Puis dans un placard j’ai trouvé, victoire, un moule à brioche en pyrex idéal pour mon projet (exit le caramel au beurre salé, le beurre salé a servi à autre chose), même si je préfère faire mon diplomate dans un moule à cake (en pyrex).

J’étais fin prête.

Et mes parents très inquiets.

  • J’ai commencé en effet à couper le pain dur en petits cubes, sous le regard désapprobateur de papa, à qui le découpage revient normalement de plein droit.
  • Maman me précisant que Mrs Tricot ne découpait pas son pain aussi finement pour son « pudding« .
  • J’ai répondu 3 fois que je faisais un diplomate et la quatrième fois « foutez-moi la paix ». Puis j’ai mis le pain dur dans un saladier dans lequel il devait attendre la suite de la préparation.
  • Pendant le repas du midi, maman m’a précisé en regardant mon saladier, que je n’avais pas assez imbibé mon pain de lait pour faire mon pudding
  • Je lui ai répondu que pour un diplomate on n’imbibe pas le pain de lait et que si l’on me foutait la paix définitivement concernant le dessert, j’éviterais de me mêler de la recette spéciale de papa « lapin à ma façon », qu’il devait débuter à 15 heures.
  • Donc je devais faire mon diplomate avant cette heure fatale. Pour pouvoir m’éjecter de la cuisine avant que mes géniteurs ne commencent à se boutiquer sur le pourquoi du comment du lapin qui risque de se barrer en courant (pauvre bête).
  • Tu mets trop de champignons (ma mère a je ne sais quoi contre les champignons de paris frais, mais refuse en ce moment d’aller aux cèpes)
  • Donnes moi donc d’autres olives (mon père)
  • Il te faut encore un peu de vin blanc (ma mère), ta sauce va être trop claire
  • ET J’AURAIS DU ECOUTER MA MERE IL Y A 55 ANS DU COUP JE NE ME FERAIS PAS CHIER EN CUISINE AVEC UN EMMERDEUR/UNE EMMERDEUSE PAREIL/LE Tu en as un caractère, tu pourrais me parler gentiment !
  • Bisous bisous (quand je vous le dis qu’il faut fuir…)
  • Etc…

Jamais je n’avais fait aussi vite, mais je vous l’ai dit plus haut, je maîtrise super bien. Papa faisait sa sieste et je savais que mes bruits allaient le déranger, mais je n’avais pas trop le choix.

Je n’osais pas imaginer le carnage si nous nous étions retrouvés à trois dans la cuisine pour la préparation conjointe du plat de résistance et du dessert…

  • Caramel se faisant pendant que je préparais « l’appareil » à diplomate.
  • Caramel coulé dans le moule.
  • Mise en place des morceaux de pain en tassant bien, et en alternant avec des couches de fruits confettis
  • Versage lent de « l’appareil » sur la préparation, en mettant le surplus qui me reste toujours dans 3 petits ramequins.
  • Mise au four du moule avec sa préparation.

Là, je ne pouvais vraiment pas me louper et je me suis carrément installée sur la glacière pour surveiller ce qu’il se passait dans le four, et ajuster le thermostat régulièrement.

Quand le caramel remonte partout à la surface en faisant des bulles, il est temps de baisser, de surveiller, car ce n’est pas forcément cuit, et de ne pas faire comme papa : éteindre le four en pensant que c’est terminé, OUF !

Maman se levant de sa sieste pour le thé, m’a trouvée sur la glacière en train de terminer mon polar sanglant italien, et a jeté un oeil pour me dire que cela avait l’air sympa, mais n’avait rien à voir avec un pudding

Quand mon père s’est levé, il a trouvé ma mère assommée avec la theière et étouffée par deux sachets de Lipton jaune coincés dans son arrière gorge le gâteau sur la table, en train de refroidir, et a déclaré :

  • Tu en fais du bruit pour faire un PUDDING
  • Tu n’arriveras jamais à démouler ça correctement
  • D’après ta mère, tu devrais servir cela avec une crème anglaise, car sinon, le PUDDING c’est étouffe chrétien.

Je rassure tout le monde :

  • Le diplomate s’est parfaitement démoulé en gardant sa forme et sans s’effondrer : c’était parfait.
  • Le lapin était délicieux…
  • Le diplomate AUSSI, d’ailleurs maman qui espérait nous faire vivre dessus pendant au moins la journée du lendemain en a été pour ses frais : les invités ont tout torché. Et sans crème anglaise, inutile, car un diplomate bien fait, c’est léger et aérien…

Sauf que :

  • Mon diplomate pour mes parents, est passé quasi inaperçu, on n’a pas idée non plus de partir avec une enfant de 54 ans en vacances, et qu’elle se mêle de cuisine…

La vie n’est qu’un long calvaire.

PS : je précise qu’ils en ont tout de même pris une petite part au départ (on n’est jamais trop prudent), pour se resservir largement une fois la peur de l’empoisonnement passée…

15 réponses sur “La Grande Motte 2012 (5) LE DIPLOMATE…”

  1. MDR… je suis pas vraiment réveillée, j’avais oublié en lisant les explications que tu avais donné la liste des ingrédients au-dessus… pour la peine je vais rechercher la recette de pudding de ma grand-mère et te la donner…
    Bisous

  2. Venue par hasard sur votre site suite aux billets publiés sur celui de Pulchérie, je suis, depuis, devenue une « lectrice fantôme » assidue. Je sors de mon mutisme pour vous féliciter : vous avez une fois de plus réussi à me faire rire (notamment grâce au « PS ») alors que ce n’était pas gagné ! Alors Merci, merci et encore merci !
    (Et bon courage pour le sevrage…)

  3. Je confirme ! Cette recette savoureuse et légère , je l’avais trouvé dans LE vieux Ginette Mathiot de ma mère.
    Heureusement que tu n’avais pas commencé ton sevrage tabac durant cet épisode cuisine à la Grande Motte …….ouh lààà…… Tu as vraiment le don du récit :))
    Comment vas-tu mis à par celà?

  4. Je n’ai pas une seule minute envisagé d’arrêter de fumer à la Grande Motte, mes parents étant tous les deux fumeurs (et maman à un point que cela est inquiétant).
    Parce que sinon, cela aurait vraiment été un carnage dans la cuisine…
    En bref, cela commence à aller mieux : je ne vois plus des cigarettes partout.
    Mais je vais continuer mon journal de bord concernant l’arrêt de cette drogue DURE.
    Si cela peut servir…
    Bizz

  5. Les phrases rayées m’ont fait éclater de rire !!!!
    Si seulement j’avais le millième de ton humour et ton style incomparable !!!!
    Magnifique preuve de « diplomatie »…..

    1. La diplomatie s’imposait effectivement…
      Parfois l’homme de l’art, à mon regard suite à une remarque de mes parents (comme si j’avais encore 8 ans) nous dit : vous me faites marrer tous les trois…
      J’en rigole toujours, heureusement. Je suis habituée aux bons conseils de maman qui oublie que j’ai 54 ans…

  6. Oh, le Ginette Mathiot !!

    Celui que ma mère a reçu à son mariage étant disloqué à force de consultations, je le lui ai racheté… je vais bientôt regarder la recette du diplomate.

    Et sans cela, il était bon ce pudding ? :-p

  7. Moment d’émotion en voyant mentionner le Ginette Mathiot! Moi aussi j’ai récupéré celui de ma mère, il est dans un sale état (et il lui manque une page, celle avec -entre autres – la recette de la tarte au riz. Drame). Et comme je le disais précédemment, j’ai pas mal ri en lisant. Grâce à vous, je sais déjà que si ma mère ne me voit pas grandir à 26 ans, il y a peu de chances pour qu’elle le voit quand j’aurais votre âge.
    Bon.

    1. Le Ginette Mathiot, c’est notre Madeleine à nous (à une époque on m’avait mentionné un autre livre très connu).
      Je m’en suis racheté un en m’installant avec Albert, en 1979.
      Il est neuf, sauf qu’il y avait des pages de rab sur lesquelles j’ai inscrit quelques recettes.
      Si tu as déjà 26 ans : c’est foutu.
      Moi aussi je suis foutue. Avec mes parents, et avec mes filles quand je leur prend machinalement la main pour traverser (28 et 31 ans)…

      1. Oui! Ma maman fait ça aussi. Enfin, elle se cramponne à mon bras en criant « attention, le feu n’est pas vert pour les piétons ».
        Euh, oui, je sais, j’avais pas spécialement l’intention de me jeter sous les roues de la première voiture venue…

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