Famille, pas toujours facile… L'enterrement

EnterrementNous avions décidé d’y aller, et donc, forcément, personne n’aurait pu nous empêcher de le faire sauf un avion de ligne s’écrasant sur notre route, deux heures avant notre départ…

J’avais la conscience clean, mais je me sentais mal à l’aise. Ma tension avait pris 2 points. Et puis, dès l’arrivée à l’église, le fait d’être trop entourée, alors que 7 magrébins me regardaient d’un sale oeil (ce n’est pas de ma faute, mais les 7 personnes installées chez le cousin de papa n’étaient pas alsaciens, suédois, mexicains, russes, ou tibétains) me dérangeait considérablement.

Catherine fut impec : gros bisous à toute la famille du côté paternel de Marc, et à papa, insistant bien :  « j’ai prévu un goûter pour après le cimetière, j’insiste pour que vous veniez ».

Sissi arrive et curieusement m’embrasse (le baiser de Judas ? car elle ignore les autres)  tout en me chuchotant le plus bas possible « vous ne parlez pas de Marc et du reste aujourd’hui, compris ? ». Manque de bol, mon frère l’a entendue, et précise que nous ne sommes pas venus pour ça. Elle rougit.

Un assez bel homme la suit, je pense que c’est son frères, ils ont les mêmes yeux, dommage qu’ils n’en aient que deux tellement ils sont beaux. Mais la dernière fois que j’ai vu le petit frère, il devait avoir 5 ans, et moi 10, donc, nous avons vachement changé.

Tout le monde s’installe dans l’église : le clan Dabra (côté paternel de Marc) à droite, et le clan côté maternel + les braves gens, à gauche (quand on rentre dans l’église). Les péquins étrangers à la famille sont rares : en fait, il n’y a que les voisins d’en face : deux personnes.

Vient la bénédiction (nous échappons à la grande messe chantée) attendue impatiemment par :

  • Ma mère qui n’a même pas fait sa communion
  • Mon père et ses deux soeurs que leur mère a dégoutés de la religion
  • Mon frère qui lui non plus n’a pas fait sa communion et qui en plus, ne supporte pas l’odeur d’encens ni la musique d’église (alors que pour mes tantes, mon père et moi, même sans croyance, nous adorons la musique d’église et les vieilles pierres).
  • Le concubin d’une de mes tantes, qui s’est placé derrière moi (pour parer toute attaque sournoise) et qui ne semble pas être plus croyant que nous.
  • Moi-même, qui à chaque fois que l’on parle du mort en disant qu’il est assis à la droite du seigneur maintenant, n’arrête pas de se dire « on va être un monde fou » (je sais, j’ai mauvais esprit).

Les répons sont faibles… Dans l’église du village de mes parents, c’est tellement fréquent qu’il y a au moins 4 femmes qui se déplacent pour pallier cette carence insupportable, chanter les cantiques et réciter les prières.

Du côté maternel de Marc, ce n’est pas mieux, ils savent tout juste faire le signe de croix. Les musulmans du banc arrière ne font que se lever ou s’asseoir, cela se comprend (mais je n’aime tout de même pas les regards vipérins qui me fixent).

Après, c’est le moment joyeux du cimetière, ou tout le monde se dit « un jour ce sera moi dans le cercueil qui descend », car la mort des autres nous fait penser à la nôtre et que c’est comme ça.

Les pauvres gens s’attardent. Ils savent qu’un goûter est prévu chez Catherine, et ils attendront vainement d’y être invités.

Et puis après, il y aura la trêve, aucune allusions aux sales mots dits. Sissi a été chapitrée par sa mère, ou elle s’est renseignée. Elle ne s’adresse à moi que pour demander des précisions sur la famille, avec le sourire. Même à un moment où nous nous retrouvons seules dans la cuisine, elle ne fait allusion à rien.

Un enterrement c’est aussi le moment où l’on évoque les disparus plus anciens, où on les replace dans l’arbre de la famille en prenant des notes pour les généalogistes, où l’on cite une anecdote amusante, c’est la famille qui se soude tout à coup, une tasse de thé ou de café à la main, un gâteau dans l’autre…

C’est une cérémonie après la solennelle, le sale coup du cimetière, un peu de chaud au coeur.

Quand nous sommes partis, Catherine m’a embrassée en me murmurant « faites ce qu’il y a à faire ».

La parenthèse était refermée, nous avons fait ce qu’il y avait à faire…

Car la vie n’est qu’un long calvaire…

(Photo : la gentille sorcière)

(Musique accompagnant l’arrivée du cercueil dans l’église (donc forcément remonte moral…)… J’aurais gagné 1000 euros si quelqu’un avait soutenu le pari que ce n’était pas l’Adagio d’Albinoni mi5xaMIX_h8)

12 réponses sur “Famille, pas toujours facile… L'enterrement”

  1. En passant, j’aimerais bien savoir qui est l’imbécile qui a eu la bonne idée de dire aux « braves gens » que c’est toi qui as appelé les gendarmes ! Une âme charitable certainement !

  2. Même réflexion que Louisiane, « on » te demande de tout faire et « on » dit ensuite aux « braves gens » que c’est toi qui les as mis à la porte de la maison qui n’est pas la leur…
    (tu l’as faite où cette photo ?)

    1. Je n’ai jamais demandé à ce qu’ils soient mis à la porte…
      Pour la photo, je ne sais plus dans quelle cathédrale je l’ai prise, à une époque nous faisions toutes les cathédrales possibles et imaginables avec Charles Hubert…

  3. Catherine est vraiment bien aimable d’avoir invité Sissi au goûter 😉 ….. en plus vous aviez « oublié » d’inviter les braves gens au dit goûter :):)
    …….tu as un vrai talent de conteuse !

  4. Une histoire de famille comme on en racontera encore dans vingt, cinquante, cent ans…
    Je n’aime pas plus les enterrements que toi parce qu’on y rencontre toujours son lot d’hypocrites et de gens plus ou moins bien intentionnés. Ce qui m’agace tout particulièrement, c’est d’entendre certaines personnes parler du défunt comme si elles l’avaient connu intimement alors que ce n’était au mieux que de vagues connaissances. Sans compter cette manie agaçante de dire toujours du bien du défunt ( il tapait sur sa femme et ses gamins, mais ce n’est pas grave maintenant qu’il est mort, n’est ce pas ? )

    Je suis née en Bretagne dans un petit village où les gens sont souvent des catholiques pratiquants ( au point de s’éteindre assis sur un banc au cours de la messe => sans doute un allez simple pour le paradis ) et je suis toujours mal à l’aise quand je suis invitée à un mariage ou à un enterrement, sachant que je n’ai jamais appris les gestes adéquats ( Sorcière, c’est grave de faire le signe de croix à l’envers au dessus d’un cercueil alors que la famille est alignée juste à coté ? )
    Par contre, on chante souvent des chants régionaux ( en français ou en breton ) qui ne font pas partie du cérémonial classique, donc les organisateurs distribuent la plupart du temps des petits livrets avec les paroles, ce qui aide pas mal .

    Je n’ai pas posté de commentaires sur la situation indigne dans laquelle la famille proche du cousin de ton père les a laissé, lui et ses biens et je vais me rattraper ici.
    Certaines personnes comme ma mère en font trop ( elle s’est épuisée pendant plusieurs années à s’occuper de mes grand-parents et du frère de mon grand-père jusqu’à leur décès ) mais là, le laisser aux mains de ces gens qui ont été jusqu’à s’installer chez lui, c’est impensable! Je me demande ce qu’aurait montré une autopsie en règle ( malnutrition, maltraitance physique ou « juste » négligence ? ). Après sa mort, c’est peut-être mes gènes normands et suisses qui parlent, mais je trouve vraiment étrange que ses parents n’aient pas eu le réflexe de sauvegarder sa succession et de virer les squatteurs. Dire qu’il a fallu que tu signales toi-même la situation à la police et que le Maire intervienne !

    En tout cas, je pense que tu as eu les bons réflexes, tant au niveau des démarches que tu as entrepris auprès des autorités qu’au niveau de ta présence aux funérailles ( avec toute ta famille ). Tu as fait preuve à la fois de courage et de détermination.

    Bonne continuation ( bah, oui, parce que la vie continue 😉 ) pour toi et tes proches !

    1. Merci de ce long commentaire circonstancié…
      Il faut savoir que nous n’étions plus proches de lui depuis la mort de sa mère, qu’il avait refusé toute « fréquentation », et que c’est plus par devoir de souvenirs de ses parents que nous nous sommes déplacés…
      Quant à mon appel à la gendarmerie, ce n’était pas à moi de le faire, mais j’ai expliqué les circonstances. Il y a des années, que cela aurait dû être fait (au changement des serrures et portail…)
      Une petite suite viendra…

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