Les premières rentrées… Part 1 : Pulchérie

Elodie 1ère année maternelle

La première héritière s’emmerdait grave toute seule à la maison. Elle s’était inventé d’ailleurs, deux copains imaginaires qui s’appelaient tateuf et rieuse. Elle circulait avec son tricycle dans l’appartement heureusement pratique pour cela, en me précisant « ze vais voir tateuf et rieuse, t’inquiète maman ». (Je n’étais pas inquiète, la porte était dûment close, on n’est jamais trop prudent).

Depuis le mois de mai, elle claironnait à qui voulait l’entendre (pas le choix de toutes manières, elle étais pipelette comme pas permis) « z’vais à l’école l’année prossaine ! »

Première rentrée. Mrs Bibelot qui habitait l’escalier d’à côté, m’accompagna pour s’assurer que tout se passerait bien (pour moi). Il faut dire que j’étais grosse jusqu’au menton de Delphine, avec une légère tendance à pleurer pour un oui ou pour un non (entre autre, le poulet manquait de seeeeeel !).

L’école provisoire (qui exziste touzours si longtemps après), avait été investie par deux maîtresses rodées comme pas possible, d’environ 45 ans, qui devaient se partager 2 classes doubles (petits/moyens et moyens/grands). Tout était minutieusement préparé, au poil.

Pulchérie accrocha son « tardigan » à un porte manteau orné du dessin d’une souris. La maîtresse m’a demandé gentiment son identité, et déclaré d’un air ennuyé que la souris était déjà prise. J’ai donc suggéré à Pulchérie de prendre plutôt l’écureuil. La réponse a été « non, ze veux la souris ». La maîtresse m’a précisé qu’il s’agissait là d’une chose importante, et est allée voir le petit garçon qui avait choisi la souris sans accrocher quoi que ce soit, parce que ses parents indignes l’avaient déposé là, sans quoi que ce soit pour se couvrir un peu.

Le mioche a déclaré qu’il s’en foutait et prendrait l’écureuil, et est retourné en classe où déjà, l’assistante le pistait grave. Pulchérie a donc eu la souris toute l’année, comme symbole. Je ne sais pas ce que la maîtresse aurait fait si le gamin s’était accroché à la souris, mais je pense qu’elle avait un plan de secours…

La maîtresse a gentiment dit à Pulchérie « et maintenant, maman va partir ». Cela m’était plus adressé qu’à elle, mais j’étais stoïque. Mon bébé innocent et abandonné par moi ne m’a même pas fait un bisou et a filé vers la salle de classe, un peu interloqué par 2 gamins hurlant à la mort qu’ils voulaient leurs mères, ces dernières sanglotant devant l’école (ce qu’elle ignorait mais l’aurait laissé de glace de toutes manières).

Le midi, récupération des gamins. La porte de la classe s’ouvre, tous les enfants sont assis face à la porte, SAUF ma fille qui lit un livre. On admire la maîtresse qui avait déjà repéré tout le monde.

« Pulchérie, il y a maman ».

Sans se retourner, Pulchérie fait un signe de la main très clair, accompagné d’un « tu t’en vas maman, je lis ! ».

« Pulchérie, il faut aller avec maman ».

« Oui mais je vais reviendre hein ? ».

Oui, elle est reviendue et tout se passait bien, dès le premier soir elle tirait au pistolet avec son index en criant dans tout l’appart « pan ! pan ! ». C’est Zoël qui lui avait appris que la guerre c’est vachement schtroumpfant…

Et puis alors que j’enflais de plus en plus, il y a eu ce jour où je l’ai ramenée pour l’après midi, et où j’ai décidé d’observer un peu, de loin.

A l’arrivée, l’assistante dirigeait les petits, vers les petites toilettes si mignonnes, avec les petits lavabos si attendrissants, car il fallait commencer l’après midi par la petite sieste.

Et là, j’ai vu ma petite puce, assise sur son petit siège, son petit rouleau de PQ dans sa petite main, son petit regard dans le vague, faire un petit sourire à l’assistante qui l’a expédiée se coucher après un petit bisou…

Et je suis rentrée chez moi en larmes.

J’avais abandonné ma fille à des mains mercenaires… Je venais juste de le réaliser…

Quant à elle, elle n’a jamais versé une larme et toujours été ravie d’aller à l’école. En tous cas en maternelle, en CE2 les choses se sont gâtées…

La vie n’est qu’un long calvaire…

2 réponses sur “Les premières rentrées… Part 1 : Pulchérie”

  1. Quelle joie de te relire avec ta plume inimitable et tes histoires toujours dingues et passionnantes !
    Merci d’être revenue, tu nous a manqué !
    Pour mon aînée, j’ai vécu une rentrée similaire, ma fille était si heureuse de rentrer à l’école ! Elle est partie bravement avec son petit cartable, fière et joyeuse en trottinant à côté de moi. Arrivées dans la classe, quel choc ! TOUS les enfants hurlaient et pleuraient en chœur.. Ma minette était sidérée, elle était tellement contente d’aller enfin à l’école, elle ne comprenait pas ! Je ne sais pas comment les parents présentent la chose à leurs enfants… Même si j’avoue que j’avais clairement la larme à l’œil de laisser mon bébé et surtout de passer du « côté des parents »! (mais ça je ne m’en suis toujours pas remise, quand je vais aux réunions parents profs je me demande toujours ce que je fous là ! 😅😅😅)

  2. J’ai vécu un peu la même chose . Ma fille étant de fin décembre , elle n’avait pas l’âge requis de 3 ans pour rentrer à l’école mais désirant tellement y aller, et le fils de la nourrice y étant déjà scolarisé, on avait obtenu une dérogation..
    Et le jour de la rentrée, partie avec une joie incroyable, à peine m’a t’elle fait un bisou et elle est rentrée avec fierté dans cette cour qu’elle observait jusque là avec envie de l’extérieur. Les pleurs et les cris de détresse d’autres enfants accrochés à leur mère comme une moule à son rocher ne l’ont absolument pas émue. Elle savourait sa joie d’être enfin à l’école avec les grands.
    La maitresse en était assez sidérée même sil les choses se sont un peu gâtées quand la petite a découvert qu’elle ne serait pas dans la même classe que l’amour de sa vie à cette époque, le fils de la nourrice !

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