Les étranges histoires familiales, part 2.

Simone_02Le prisonnier partit en stalag où il resta bien trop longtemps.

La guerre n’était pas terminée quand Mrs Tricot eu connaissance d’un moyen de libérer son mari.

Elle était toujours capable de n’importe quoi pour faire rentrer son mari le plus rapidement possible, malgré le temps passant, n’ayant déjà que trop passé.

Les allemands renvoyaient chez eux les « soutiens de famille ».

Avec la complicité de son père (toujours à la mairie), devenu faussaire pour une bonne cause elle se retrouva avec un acte de décès de ce dernier (considéré par les allemands comme le chef et soutien de famille en ce qui la concernait), + deux actes de naissance de deux jumelles nées en 1940, à une date plausible par rapport à la dernière permission de son mari, s’appelant Colette et Michèle.

Je me demande quel effet cela a fait à mon arrière grand père de rédiger sur du papier officiel son propre acte de décès. Les faux papiers n’eurent pas l’occasion de servir, après le débarquement les allemands ne libéraient plus personne de leur plein gré, mais les papiers étaient bel et bien là, au cas où.

Et le prisonnier rentra.

Mrs Tricot se retrouva enceinte immédiatement ou quasi (à son avis le soir même du retour).

Ils surent assez tardivement qu’il s’agissait de jumeaux (à l’époque il fallait attendre la naissance pour savoir de quels sexes il s’agissait). Là déjà, sans doute dans la tête de Mrs Tricot avait commencé un travail que personne d’autre qu’elle ne pourrait analyser.

Et au bout du compte, ce sont bien deux petites filles qui sont nées, qui se sont donc appelées : Colette et Michèle.

Le destin est étrange, ou nous voulons le voir comme tel. Les filles auraient pu s’appeler autrement que comme sur de faux papiers qui n’ont jamais servi…

Mais bon, avoir ces jumelles déjà nommées, imaginées sans qu’elles existent déjà, avait dû les marquer tous les deux. Comme s’il y avait un destin à respecter absolument…

Le père de Mrs Tricot n’était pas mort, mais les jumelles sont bel et bien nées, alors quelque part, elle devait respecter le destin qui l’avait inspirée…

C’est après que tout soit terminé qu’elle a trouvé la foi, et fort malheureusement un peu enquiquiné sa famille avec…

Mais notre destinée n’est-elle pas étrange parfois et même souvent ?

Les étranges histoires familiales part 1.

Simone_02Sur cette photo : la maman de Jean Poirotte, autrement dit ma grand mère paternelle.

C’était ma grand mère, et cela reste pour moi une grand mère, timorée parfois dans certains cas, culottée dans d’autres, cas plus rares, une femme que finalement je ne connaissais pas..

Comme disait mon père, son fils « nous ne savons rien de nos parents ». Et il avait raison. Ca et là tout de même percent quelques histoires, surtout pour ceux qui ont vécu une époque troublée…

Mrs Tricot était pour moi « j’ai peur de tout ». J’avais bien entendu sa mère me raconter qu’à 19 ans elle s’était offert un baptême de l’air sans l’autorisation de son père, mais j’étais trop petite pour me rendre compte du traumatisme que cela avait été pour mon arrière grand père.

1940, le prisonnier est capturé sur une plage de Veule les Roses…

Il en parlait peu. Un jour il m’a raconté « le coup de la morue », qu’une paysanne désolée par tous ces prisonniers dans ses champs, était venue leur distribuer pour qu’ils aient à manger, et de la soif qui les avait hantés après, toute la nuit…

Il parlait peu de cette débâcle qu’il avait vécu comme une humiliation, nous disant de temps à autres, qu’il s’était endormi à côté d’une batterie de 75 (il était dans l’artillerie à cheval), tellement il était épuisé. Ou nous expliquant que son armée et son pays n’étaient pas préparés vraiment d’où cette défaite sanglante tout de même, et si rapide.

Puis le prisonnier partit vers une destination inconnue, avec arrêt dans une ferme dans la zone interdite. Miracle, il put faire passer une lettre à sa femme.

Ma grand mère, celle qui n’osait rien, beaucoup plus tard.

Zone interdite, peu connue de la jeune génération. Elle tarabusta son père qui était conseiller municipal (avant d’en devenir pour des années, l’adjoint au maire)  à la mairie du village toujours occupé par mes parents qui s’y sont connus.

Elle lui a extorqué de faux papiers. Pour elle, et pour mon grand père.

Elle a pris des vêtements civils pour mon grand père, et elle est partie sur les routes, telle Amélie dans « les semailles et les moissons ». Pour son mari elle était prête à tous les culots et elle les a eus.

Arrivée à la frontière de la zone interdite, à peu de km de la ferme où séjournait mon grand père, elle a pu attendrir un fermier. Sa femme et lui lui ont fourni des vêtements de paysanne et elle est partie avec lui, livrer des légumes, pour arriver dans la ferme où elle a retrouvé son mari.

Elle disait juste sobrement qu’il y a des nuits qui valent une vie. Elle est restée deux jours avec son mari, essayant de le convaincre de revenir avec elle. Tout était prévu avec le fermier, il passerait la ligne sous un convoi de légumes. Il serait en civil pour le reste, avec de faux papiers, elle était prête à tout.

Sauf que lui, les allemands lui avaient dit, comme aux 9 autres, que s’il y avait une évasion, tous les civils seraient fusillés… Il ne pouvait pas imaginer une chose aussi horrible : être responsable de la mort d’une famille. Il avait déjà vu…

Sauf que lui, comme beaucoup, ne pensait pas que cela pourrait durer et durer et durer. Il pensait être rentré chez lui en moins d’un an…

Et qu’il a donc refusé de la suivre, ne voulant pas apprendre un jour qu’il avait été responsable de morts innocents. Parce qu’il se connaissait et qu’il y serait retourné.

Elle est donc repartie, en paysanne, ayant laissé quelque part, les faux papiers, les vêtements civils de son homme qui n’avait pas voulu la suivre, en pleurant.

Mais elle l’a fait son odyssée en zone interdite, prête à tout…

Ma grand mère… Qui n’osait pas dire au boulanger que son pain était mal cuit (mais signalait sur la plage, aux allemands, qu’ils avaient oublié leurs bouteilles de coca…)

Qui avait encore de la ressource….

Car c’est la part 2 qui vous révèlera pourquoi, il y a d’étranges histoires…

Le pense bête…

Nous n’avons pas vu tout de suite que Mrs Morgan perdait ce qu’elle appelait « son si peu ».

Elle ne venait pas voir maman toutes les semaines, tenait des conversations au téléphone des plus normale. Et puis petit à petit, il y a eu des indices qui ont inquiété Mrs Bibelot, sa fille unique.

Et un beau jour, invitée à déjeuner chez sa mère, elle a machinalement regardé la grille des mots fléchés que sa mère faisait tous les jours.

Du n’importe quoi. Des lettres mises au hasard. Fort malheureusement, elle s’en est ouverte à son beau père, qui ne faisait lui, jamais de mots fléchés…

Cet homme pour lequel j’avais de l’affection, n’était intéressé dans la vie que par trois choses : les femmes, le fric, la bouffe. En vieillissant, il avait changé l’ordre de ses préférences… Il était évident que « mon chou » (ma grand-mère) était important pour lui, mais il s’est révélé sans scrupules…

Dans certains cas, on peut comprendre que certains en viennent au meurtre (je parle des héritiers)… Car en ce qui le concerne, il savait très bien que sa femme perdait la tête et était persuadé qu’elle partirait avant lui. Il avait merdé dans certains domaines et voyait là enfin, le moyen d’assurer son avenir.

Nous avions donc pris conscience qu’elle perdait la tête, et maman a pris un RV chez un neurologue en expliquant bien le problème : il s’agissait de dépister Alzheimer. Le motif de la visite avec l’accord du médecin : une visite de contrôle 1 an après une fracture du col du fémur et anesthésie pour mettre en place la prothèse.

Grave erreur, maman a averti son beau-père de la ruse. Il s’est empressé de tout faire pour annuler le RV, et ma grand mère a refusé de s’y rendre.

Pendant qu’il en était encore temps (pour lui), il lui faisait signer des donations chez le notaire, auxquelles elle s’était toujours refusée quand elle avait toute sa tête. En clair il déshéritait quasi totalement ma mère au sujet de laquelle il racontait partout qu’il avait été un père pour elle. Alors que Mrs Bibelot avait bel et bien son père, sans rupture entre elle et lui…

Mais bon, le destin rattrape parfois les malveillants. Il était persuadé qu’elle partirait avant lui et avait tout prévu pour. Sauf que c’est lui qui a été victime d’une attaque, le premier.

Maman et moi sommes parties immédiatement, pour trouver une femme totalement perdue, ne sachant pas ce qu’il se passait. Impossible pour Mrs Bibelot de la prendre chez elle : il fallait la faire hospitaliser et le médecin de famille était donc requis.

La pauvre a lutté, pour faire croire qu’elle avait toute sa tête, qu’elle était habituée à vivre seule pendant les absences « pour affaires » de son mari (ce que le médecin savait être totalement faux) pendant que je fouillais les papiers avec l’impression de jouer les vautours. Quelqu’un était passé avant moi : le fils du mari, premier sur la liste des personnes à prévenir. Tous les biens de valeur de Mrs Morgan avaient disparus.

Ses bijoux, destinés à sa fille et ses petites filles. Son argenterie. Sa vaisselle de grande valeur, tout, tout avait disparu ! Les bijoux, cela a frappé Mrs Bibelot au coeur : ils n’avaient pas une énorme valeur, mais cela venait de la famille. Pour les papiers, il y avait une attestation de son mari dans son sac à main : il ne pensait pas qu’elle servirait un jour.

Il y reconnaissait que tous les meubles de la propriété avaient été achetés par ma grand mère exclusivement, et l’état de ses biens en bijoux et autres.

Pendant que ma pauvre grand mère était embarquée par des ambulanciers très très gentils, vers un hôpital psychiatrique (point de salut sinon), accompagnée des larmes de sa fille, je constatais, consternée, ce qu’elle avait pu signer. 10 ans plus tôt elle avait bien dit, et devant son mari, que la donation au dernier vivant était hors de question etc… Tout était là, dans mes mains…

+ un pense bête, qui m’a fait comprendre pourquoi à chaque visite, elle montait tout le temps dans sa chambre.

  • Je m’appelle H. Morgan
  • Je suis née le 8 mai 1911 à Paris 14ème
  • J’ai une fille qui s’appelle Mrs Bibelot
  • Qui est née le 4 juin 1937 à Paris 14ème
  • Je suis divorcée de l’apiculteur
  • Je suis remariée avec Maurice depuis le …
  • J’ai 4 petits enfants qui s’appellent…
  • Coraline a 2 filles : Pulchérie et Delphine

Maman et moi avons pleuré devant ce pitoyable rappel des faits. ELLE SAVAIT. Il y a eu un moment où elle s’est rendu compte qu’elle perdait la boule.

L’examen de ses agendas après coup nous a révélé que toute seule, elle avait consulté des neurologues, plusieurs, et donc qu’elle s’était bien sentie partir de la tête. Qu’elle avait dû avoir peur. Que son mari avait bien profité de la situation (et fort heureusement, le notaire a remis les choses bien en place vu que c’est le mari qui est parti en premier et qu’il craignait une plainte pour signature d’une personne non capable, au grand damn du fils qui se voyait bien embarquer la moitié des meubles (il avait préparé une liste…)

Le pense bête je ne l’ai pas laissé à maman. Je le garde chez moi. Les soirs où je suis inexplicablement triste, je le relis et je la vois, partie pour encore 15 ans dans la dégringolade.

  • Ne pas se souvenir de ce qu’il vient de se passer. Elle a donc totalement ignoré le décès de son mari. Elle le croyait à l’hôpital (comme elle) et trouvait la coïncidence extraordinaire. Elle n’a jamais eu ce deuil à vivre…
  • Elle s’est retrouvée en maison de retraite médicalisé, ravie d’y être. Elle avait oublié son mari. Enfin le deuxième. Elle se croyait toujours mariée à l’apiculteur, qui, informé, refusa de jouer la comédie. Elle lui avait fait assez de mal, et le reste il n’en avait rien à foutre !
  • Comme elle était toujours belle, elle acceptait de faire des défilés de mode. Oui, elle s’y plaisait bien dans cette maison de retraite dont elle ne comprenait pas ce qu’elle était vraiment !
  • Un jour elle m’a prise pour sa mère et m’a suppliée de ne pas l’abandonner une fois de PLUS. Ca me reste toujours coincé dans l’estomac…
  • Un jour elle n’a plus reconnu maman : sa fille était une petite fille de 6 ans, et il y avait des allemands en France.
  • Un jour, elle n’a plus reconnu personne…
  • Un jour elle n’a plus su parler. Pourtant on sentait bien que quelque chose voulait sortir. Dans sa tête c’était peut-être au point, mais une connexion manquait pour l’exprimer.
  • C’est la raison pour laquelle nous lui parlions normalement. Qui sait ce que ressentent vraiment ceux qui sont atteints de cette sale maladie ?
  • Et nous lui avons emmené les derniers nouveaux nés de la famille. Elle a semblé comprendre et a été heureuse…
  • Nous n’avons pu que lui donner de la tendresse et de l’amour.
  • Elle est morte un moche jour d’on on ne sait quoi. Nous n’avons pas cherché à savoir. Elle avait 90 ans et était enfin libre…

Le pense bête était désormais inutile.

Je pense à elle comme à cette femme extraordinaire qui me donnait 50 F à ne pas dépenser n’importe comment dans une parfumerie.  Elle reste pour moi ma grand mère ET marraine, qui a veillé sur mon bon goùt, parce que le sien était impeccable.

C’est quand elle a cessé de se maquiller que nous avons compris, ma mère et moi que c’était vraiment la fin de son « si peu »

Et que qui que ce soit nous épargne tous…

Car la vie n’est qu’un long calvaire…

Le prisonnier…

RolandVoici le deuxième de mes grands pères à vous présenter : le papa de Jean Poirotte.

Pas rigolo le grand père allez-vous dire avec mauvais esprit. Cette photo date de 1943 alors qu’il purgeait sa peine pour un crime non commis dans un stalag du nord est de l’Allemagne. (où çà pèle à mort l’hiver au cas où vous ne le sauriez pas…, et où c’est vraiment trop chaud l’été quand on travaille pour n’importe qui et surtout les nazis)

Capturé en juin 40 en pleine débâcle, sur une plage de Veule les roses, il était parti, un peu confiant, comme tous les prisonniers de 40, pour l’Allemagne. ON racontait que les allemands renverraient très bientôt les prisonniers chez eux, qu’ils ne pouvaient pas nourrir toutes ces bouches inutiles. En fait il y resta 5 ans. Sur cette photo il a la trentaine, autre chose à faire qu’à moisir en allemagne de l’est, et le regard joyeux du prisonnier qui se bidonne à mort tous les jours (chez lui on ne creusait pas de tunnel, non…).

Il est parti trop tôt, alors que stupidement nous ne nous y attendions  pas, alors que c’était évident, mais que personne n’a voulu voir l’évidence. J’avais 20 ans. Je l’adorais, mais non pas  comme l’autre, après, que j’ai eu pour longtemps. C’était différent, peut-être parce qu’il est parti trop tôt. Celui là, je pense que j’en étais secrètement amoureuse quand j’étais petite. Je le trouvais beau et j’aimais son regard mélancolique, sa voix douce (alors que je trouvais l’autre grand et fort et criant facilement). Je n’ai pas eu le temps de le connaître vraiment. Je l’ai connu trop tard au travers les livres qu’il aimait (et que sa femme m’avait spontanément donnés), en me disant qu’il était dommage qu’il ne soit plus là pour parler avec moi de ce qui était important pour lui, et moi soudain. J’en reparlerai…

Car quand je l’ai vraiment connu, il était trop tard et il reste le regret éternel à jamais de ma vie. C’est sa perte qui m’a donné l’envie de profiter de ceux qui restent, et c’est aussi une autre histoire… Mais depuis qu’il est parti, je pense souvent à lui, à ce que l’on aurait pu se dire, aux recherches qu’il avait faites et que j’ai fait moi même à mon tour, comme par hasard.

Il parlait peu de la guerre et de sa captivité « quand j’étais prisonnier ». Depuis que j’étais née, je savais qu’il avait été « prisonnier ». Cela faisait partie de la culture familiale, ce côté « prisonnier », c’était plutôt glorieux. Généralement quand il se laissait aller, c’est parce qu’il avait ce que l’on appelle vulgairement un « coup dans le nez ». Ma grand mère détestait qu’il ait un coup dans le nez alors il évitait. Mais parfois, Noël ou autre moment, très rarement le laissaient avec un verre de trop et là il parlait. Comme toutes les personnes secrètes, il était l’illustration vivante du dicton « in vino veritas » (et moi qui déteste les dictons…)

J’avais 15 ans et j’étais donc très con, parce qu’à 15 ans on est très con, la première fois où il se laissa aller vraiment devant moi. Nous passions notre mois de juillet les parents et nous, en vacance avec lui et sa femme, tous les ans depuis que j’étais petite. Quitte à sacrifier une journée  ou deux de plage, je partais et rentrais avec eux depuis plusieurs années. Il avait pour moi quelque chose de magique et le couple qu’il formait avec ma grand mère aussi. Mes autres grands parents étaient divorcés, et à l’époque c’était quasi la honte et interdiction en tous cas de prononcer le nom de l’un ou l’autre devant l’un ou l’autre : c’est toujours confortable pour un enfant.

Nous étions rentrés de Bretagne, et avant de me déposer chez l’autre grand père et de prendre ses quartiers d’août à 100 mètres, chez les parents de sa femme (en fait il travaillait en août et profitait du Paris qu’il aimait tant et ne rentrait que le WE), tradition pour lui : restaurant.

Il avait estimé que j’étais suffisemment grande pour apprécier un bon restaurant, et il apprécia les bons vins (et moi les bons plats). Il fut convenu que sa femme prendrait le volant après, et il me raconta soudain, comment que c’était bien quand qu’il était prisonnier en Allemagne.

J’avais déjà su par lui un soir de confidences, peu de mois auparavant, après avoir visionné un film de guerre propre américain des années 60, que la guerre c’était super drôle quand c’est la débâcle et que l’on meurt de trouille, que l’on s’endort d’épuisement à côté d’une batterie de 75 (il était dans l’artillerie) et de mourir de soif en attendant de monter dans un train qui va faire un très long chemin… Je savais aussi que la guerre c’est les morpions, les poux, la dysenterie, la pluie mortelle pour les mycoses s’incrustant, et de manière anectodique,  le copain coupé en deux de manière pas franche par un obus, qui va hurler pendant des heures sans qu’on ne puisse faire quoi que ce soit pour lui avant qu’il ne crève en demandant « pourquoi ???? Je veux ma mamannn ! » ‘Je n’ai rien fait de mal ! Aidez moi !!!! ». J’étais archi anti-guerre et héroïsme tellement beau dans les films et tellement moche quand il se lâchait…

Sur le coup j’ai cru qu’il voulait plaisanter quand il a commencé à parler de « quand j’étais prisonnier », mais rien n’était drôle. En plus, des larmes coulaient par moment de ses yeux et pour la première fois devant moi il intima l’ordre à sa femme qui voulait le faire taire, de « la boucler ». Il fallait que je sache. Et j’ai compris surtout que mon grand père pouvait pleurer et que ce soir là c’était l’option obligatoire, sinon il s’ouvrait les veines pour se punir d’avoir survécu…

C’était tellement drôle, ces hommes morts du typhus, de la dysenterie, de n’importe quelle pneumonie ou bronchite dans le stalag de rêve. On enterrait les copains, tu comprends ? les allemands prenaient juste des photos et gentiment nous donnaient les tirages. On écrivait à la femme et aux enfants en France qu’il ne fallait plus attendre. Et puis un beau jour, bombardement ! Clac une bombe en plein sur le cimetière. Youpeee !

C’est hilarant d’aller ramasser les morceaux du copain enterré il y a 6 semaines. Il fallait le faire quand même, en attendant son tour… Ou le prochain bombardement, et enterrer à nouveau ce qui jadis avait été un ami… Là les larmes coulaient vraiment et j’étais pétrifiée. Un grand père ça ne pleure pas et ça n’a jamais été malheureux !

Son tour n’était pas pour cette époque là. Il rentra, malade et épuisé, amer et désabusé, car rentra mal. Sur le chemin du retour, au gré des campements d’infirmerie avec leurs antibiotiques salvatrices : les camps, les vrais. Les vrais morts vivants, l’horreur absolue, ceux qui lui retiraient le droit de se plaindre.

Parfois, certains noëls il demandait à papa « ma chanson« . « Nuits et Brouillards« . Pour un noël c’est super gai ! Papa chantait seul en s’accompagnant de sa guitare, et nous regardions le grand père pleurer silencieusement dans son coin, mal à l’aise et peu pressés de comprendre. En plus, un grand père ça ne pleure pas !!! Un grand père c’est un grand père, ce n’est pas un homme. Un père non plus d’ailleurs et je l’ai dit un jour à Jean Poirotte « oui mais toi tu n’es pas un homme ! ».

Les photos d’avant la guerre sont différentes, c’est lui déjà, sauf le regard. Le regard n’est pas le même, il est joyeux, il pétille, il a la vie devant lui mon grand père. Après il a toujours gardé ce regard de ceux qui savent, qui ont vu, qui n’ont pas vaincu, et qui ont souffert. Il avait le regard de ceux qui ont touché la souffrance, l’abîme et l’horreur et après cette visite, les yeux ne changent plus. J’ai vécu chez un autre de ceux que j’aime cette perte du regard, fort heureusement restauré. Chez lui, rien n’a pu y faire, il a terminé sa vie avec son regard triste et mélancolique que j’aimais tant.

Les yeux, le regard, sont le miroir de l’âme dit-on, et j’ai peine pour lui, franchement, de ses souffrances tellement présentes en lui qu’elles l’ont peut-être empêché de profiter de ce que la guerre lui avait laissé devant lui. Je souffre pour lui de ce regard que j’aimais tant pourtant, qui maintenant m’explique la maladie de l’âme qui l’avait touché alors qu’il était bien trop jeune. En fait il ne s’est jamais pardonné d’avoir survécu.

Il est celui de mes grands parents qui a vécu le plus difficile, je l’ai perdu trop tôt, et là encore, j’ai envie que l’on sache qu’il a existé et que depuis le 28 août 1978, je l’aime toujours…

Pour ceux qui ont le courage, lire « le choix de Sophie ».

Une sorcière qui n’en a pas terminé avec ses grands pères…

A ne pas dire à une femme enceinte

sourire1Quand on est enceinte, on a droit à TOUT ! Certaines petites phrases peuvent dater, j’attends les remarques plus modernes :

  • Tu es certaine que ce ne sont pas des jumeaux ?
  • Tu as pris combien de kg ?
  • La seule chose qui me passait mes nausées c’était de manger, j’ai pris 30 kg
  • Tu dois manger pour deux maintenant, reprends de la tarte (le père inquiet pour sa fille enceinte)
  • Tu veux savoir le sexe ?
  • Oui tu veux savoir ? moi je préférais ne pas savoir
  • Il est d’Albert ?
  • Non tu ne veux pas savoir ? c’est quand même plus pratique pour acheter les petites affaires et décorer la chambre…
  • Moi j’ai eu droit à une épisiotomie de 10 centimètres
  • J’ai accouché en 3 fois 20 minutes, pas de quoi en faire une histoire (la belle mère)
  • Pour toi cela a duré 4 jours (la mère)
  • Une coupe de champagne cela ne va pas le tuer tout de même
  • J’ai accouché dans le même hôpital, il y avait des cafards dans la chambre
  • Ma péridurale n’a pas marché j’ai cru mourir
  • Je viendrais m’occuper de Pulchérie pendant que tu seras à l’hôpital, et je resterais une quinzaine de jours pour t’aider à ton retour (la belle mère) au secours !
  • Rien ne vaut le lait maternel (la mère)
  • Le biberon c’est pratique (la belle mère)
  • Assieds toi délicatement ce fauteuil est fragile et j’y tiens
  • Tu vas enfler jusqu’à quand ? (Albert)
  • Je n’aime pas l’aspect de votre col (l’accoucheur)
  • Félicitations il y en a 3 ! (l’échographe-imbécile-heureux)

De toutes manières la vie n’est qu’un long calvaire

Quand j’étais jeune fille…

Je_revais___l_avenir_53329550Si j’avais été aussi jolie…

J’étais jeune fille désormais, cela se voyait partout et je n’étais même plus « autorisée » à me faire une queue de cheval, étant théoriquement libre de m’habiller et coiffer comme je le voulais (sans frange tout de même, c’était mauvais genre), jusqu’à ce que papa décrète que je l’énervais en pantalon au mois de juin.

Mrs Bibelot me ressortit une vieille jupe à carreaux et les soquettes allant avec, confisquant mes deux pantalons (oui notre garde robe était assez pauvre, mais c’était pour tous pareil). J’ai compris plus tard que maman avait vraiment du mal à voir ses enfants grandir et était ravie de m’habiller encore en petite fille. Le traumatisme fut tel que jamais je n’ai imposé à mes propres filles de s’habiller comme je le voulais. En effet, arriver à ce qu’on appelait « le lycée » en jupe à carreaux et soquettes c’était 15000 personnes minimum se foutant de votre tronche. Mes filles ont peut-être été certes ridicules parfois, mais de leur propre gré et avec l’agrément du collège… Assez de motifs de conflits pour ne pas en rajouter un inutile (d’un autre côté elles n’ont jamais exigé de se mettre des épingles à nourrice dans les oreilles et de s’habiller péri-esthéticienne (dixit Delphine – 8 ans)).

Meilleure amie arrivait donc le matin au volant de sa mobylette, avec un jean à elle, dans la cave où je rangeais la mienne (de mobylette) pour sauver mon honneur. J’enfilais le jean et sortais par derrière l’immeuble. Le soir je réapparaissais, méprisante et boudeuse, en jupe à carreaux ET socquettes blanches. Mon père cédat après 3 semaines d’air outragé et de bouderie au repas du soir (tout de même)

Passage important dans la vie que de devenir « jeune fille », maman se croyant obligée de préciser même au poissonnier : « c’est une jeune fille maintenant« . Compliments de tout le monde et nous l’envie de rentrer sous terre et de creuser après… Toute la famille était avertie de ce moment crucial qu’on aurait voulu taire, via le téléphone et pour ceux qui ne l’avaient pas : un télégramme (disparu depuis) « Coraline formée stop, bisous à tout le monde ». Retour de télégramme « heureux, stop, aurait pu attendre dimanche » (on payait au mot, jamais compris le pourquoi de la réponse…) (j’ai épargné aux filles les commentaires en précisant « vous ne savez-rien-je-ne-vous-ai-rien-dit » (elles m’ont toutes les deux fait cela chez ma soeur et téléphoné immédiatement bien sûr, mais pourquoi diable toutes les deux chez ma soeur ?).

Je rêvais à l’avenir, écrivant mon journal (un cahier trafiqué pour faire cahier de maths qui a pu y croire ?…), songeant à ce qui allait m’arriver de super (oubliant bien évidemment au passage toutes les merdes qui pouvaient parsemer mon chemin). Naturellement j’étais amoureuse et l’élu de mon coeur faisait la une du dit journal avec des coeurs dessinés en gros, en bleu comme les yeux de l’élu et écrit en gros « Dominique je t’aimeuuu et je t’aimerai toujouuuurs ». Pendant ce temps là meilleure amie gribouillait en vert (comme les yeux de l’élu) en disant à peu près la même chose sauf que le prénom était différent. Aucune imagination (et nos lectures n’y enclinaient pas) (Je précise que meilleure amie a tout de même épousé son premier amour, moi pas…)

Nos échanges quotidiens par courrier (écrits au stylo plume, mis sous enveloppe, et trimbrés, le moyen âge juste après le chevaucheur) pendant les vacances étaient une rengaine extraordinaire « je l’aimeuu » « je l’aimeuu » « je n’aimerai jamais que luiiii » « moi aussiiii ». Et à part ça la santé ? et le thé sur les jambes et le concombre sur la figure ? Ca rend bien merci. On tartinait 3 pages par jour parce qu’il y avait autre chose à raconter, en particulier à quel point nos parents étaient emmerdants.

Jusqu’au jour où il nous fut impossible de passer nos vacances l’une sans l’autre. Mes parents se résignèrent à ce que nous squattions la maison de mes arrières grands parents à la campagne, (les parents de meilleure amie ayant la même chose mais en Bretagne : trop loin), las qu’ils étaient de traîner avec eux une martyre sans meilleure amie à la campagne. Las qu’étaient également les parents de meilleure amie de l’entendre pleurer sans moi le soir dans sa chambre…

La maison était sans chauffage central, sans eau chaude, avec juste un poêle à charbon et les toilettes dans le fond du jardin + un poêle à mazout dans la chambre.. Papa venait vérifier tous les jours que nous ne risquions pas de nous intoxiquer au monoxyde de carbone (et rallumait donc les poêles, nous étions nulles). Nous prenions nos vélos pour aller faire les courses. On écoutait de la musique plein pot sur mon vieil « électrophone » (c’est quoi tatie un électrophone ?), et notre occupation favorite était de parlotter jusqu’à des heures indues et d’écrire notre journal. La grande joie du soir etait de nous laver les dents en crachant l’eau de rinçage par la fenêtre, ce qui faisait hurler le chien du voisin à 22 H, à la campagne ça craignait à l’époque… Nous étions mal vues avec notre musique plein pot et les crachages nocturnes.

A J – 5 plus rien à manger et plus un centime. Mon arrière grand mère (l’autre) (mes parents étaient quand même juste à 200 mètres, chez elle) nous refilat donc en douce des parents heureux de nous prouver que nous ne pouvions pas nous débrouiller sans eux, des bocaux de lapins en sauce et de poulet en blanquette, trois pots de confiture + du pain destiné normalement aux poules, pour assurer notre survie (dieu la bénisse cette sainte femme qui rigolait bien !).

Consternation des parents : nous nous en étions sorties. Des mitaines aux mains pour gribouiller notre journal avec des coeurs partout tous les soirs, en écoutant Demis Roussos sur mon « toune disque » + les beatles. Question des neveux et nièces : c’est quoi un disque et pourquoi il tournait ? Renoncer à expliquer.

On essayait de se faire belles en copiant les stars d’après guerre et Brigitte Bardot, à grand renfort de recettes de grands mères et avions ruiné notre argent en concombres… (je vous ferai un post excusif là dessus, vous aller rire, mais meilleure amie est OK pour se ridiculiser avec moi (je précise c’est important)

A partir de ces vacances là, nous avons squatté la maison des arrières grands parents régulièrement. Nous maitrisions les poêles à mazout ou à charbon, et courageuses, nous nous lavions au jet d’eau (à Pâques c’est super), dans la cour, ignorant que le vieux voisin nous mattait. Nous avons été dans cette maison, les plus heureuses jeunes filles du monde, avec que de l’espoir et des certitudes…

Comme me l’a dit un jour meilleure amie : qu’est-ce qu’on étaient heureuses. Et on ne le savait pas (c’est le problème du bonheur qui est souvent le passé…) Car après quand on sait, c’est que la vie n’est qu’un long calvaire…

Comment être une mère nulle…

Parents_d__l_vesJe détestais la rentrée des classes quand que j’étais petite. Je la détestais également quand Pulchérie et Delphine repartaient vers l’école, toutes contentes (elles) avec leur cartable neuf et tout l’attirail nécessaire dedans pour qu’elles deviennent prix nobel un jour à tout le moins (une trousse Barbie, un taille crayon Barbie, un agenda Barbie, une règle Barbie, l’avion de Barbie, je m’égare).

Déjà je revivais mes rentrées (l’horreur). Sinon ce n’est pas que je détestais prendre des vacances quand elles terminaient les leurs à l’époque où je ne travaillais point (volontairement ou au chômage), mais le premier soir elles rentraient de l’école avec des livres. Des livres à couvrir

Je soupçonne ces innocentes facétieuses d’avoir toujours choisi volontairement des livres non couverts pour que je les recouvre moi-même de papier transparent immonde, impossible à ajuster et assembler correctement avec du scotch qui ne colle pas, ou trop, où il ne faut pas…

Je suis déjà incapable de faire un paquet cadeau. J’admire les personnes qui vous en font un en 2 temps et 3 mouvements chez n’importe qui (je ne vais pas sélectionner le magasin non plus). Je regarde : c’est facile comme tout, je prends note. Je m’y colle : c’est impossible, ça ne ressemble à rien, j’ai pris trop de papier, ou pas assez, ça se retrouve en vrac et moche. J’ai testé le genre « paquet cadeau = bonbon géant » mais sortant de mes mains cela ressemble à la serpillère de Thérèse qui manquait à l’autre pour descendre ses poubelles…

Je ne sais pas quels jurons épouvantables et horribles j’ai pu prononcer en recouvrant les livres de classe. Les filles s’installaient pour me regarder en riant à l’avance (même pas en douce…) dès que j’entamais mon chemin de croix avec le papier dûment choisi par elles ou bien du transparent (ne pas prendre d’adhésif si vous êtes aussi doué que moi). C’était leur plaisir personnel de la rentrée que de voir leur mère rouge, transpirant à fond, éructant des insultes, les ciseaux et le scotch à la main pour tout louper… Elles avaient les livres les pirement recouverts de la classe et de toute l’école, mais là même pas honte parce qu’elles avaient bien rigolé (et les livres étaient recouverts, c’était tout ce qu’on leur demandait).

Fort heureusement, la vie ayant ses revers (il faut bien qu’il y ait l’envers de la médaille et quand la médaille est moche, le revers est sympa), je me suis retrouvée un beau jour chez mes parents pour 4 ans, et découvrir que Mrs Bibelot adorait recouvrir les livres cette sainte femme  (ma mère). Elle faisait cela avec brio et maestria (deux potes à elle) devant le regard consterné des filles qui ne pouvaient même plus rigoler un bon coup en me voyant me scotcher les doigts après m’être coupée un tendon avec des ciseaux en disant plein de gros mots…

Quand je le dis que la vie n’est qu’un long calvaire…

Et vous vous arrivez à faire des paquets cadeaux ou recouvrir des livres ? Moquez-vous….

B comme Belle au bois dormant

La_belle_au_bois_dormant_bel8Avant de vous faire les contes les plus atroces et les plus barbares, je me devais de faire un petit tour  dans ce bois sympa où l’on a le droit de roupiller tout à son aise.

Déjà le concept m’a toujours plu : être obligée de dormir ! 100 ans en plus !  J’ai toujours aimé dormir et vivre une autre vie au travers des rêves, ce qui n’est pas top en ce moment.

Donc au départ, c’est un conte de Perrault, strictement réservé aux adultes  Dans cet horrible cas de figure, l’histoire ne se termine pas avec le mariage du prince et de l’endormie : la mère du prince est une ogresse… (aurait fallu que je chourre à Mrs Bibelot son intégrale des contes de Perrault de collection, ne serait-ce que quelques jours, la tâche était rude) qui veut bouffer sa bru (normal) et ses petits enfants (ça c’est moins normal)

Disney a bien entendu revisité le mythe et tout changé. C’est un de mes préférés dans les contes anciens mis en dessin animé. Je craque devant les trois bonnes fées, et la très belle maléfique avec son corbeau à l’oeil torve.

Tout d’abord, l’histoire débute classique. Un couple qui ne peut pas avoir d’enfants (c’est incroyable ce qu’il pouvait y avoir de couples stériles jadis, sans pollution pour tuer l’ovule ou perturber le spermogramme), et qui se retrouve du jour au lendemain (une distraction), avec une petite fille. Généralement c’est une fille qui vient à point à qui sait attendre, jamais un garçon, c’est étrange (voir Blanche Neige !) (ce n’est jamais une de mes filles non plus, c’est bien dommage, comment qu’elles vous auraient revisité le conte de fées avec leurs bricolages, draguages, voyages, fugues, et autres…).

Grande fête dans le royaume pour célébrer le BB. Vient le roi voisin avec son fils à qui les parents sympas destinent leur enfant (sans se demander s’il sera charmant ou non). Les trois bonnes fées sont là bien entendu, pour faire chacune un voeu. Alors : une jolie voix c’est l’évidence même. Si Disney ne peut pas nous placer deux ou trois chansons de l’héroïne il ne peut pas faire un dessin animé, tout le monde sèche en mordillant son crayon (oui c’était le vieux temps avant les images de synhèse) (et moi perso, trop de chansons ça me gave, mais ça me regarde). Pour la petite sirène il a fallu qu’il nous colle la jolie voix quand même quand elle est muette (je sais il était mort depuis longtemps, mais je parle des studios).

La beauté en don également, bien sûr : z’avez-vous déjà vu une princesse moche ? Non ? Il paraît pourtant que l’histoire a eu son quota de mochetées en grande majorité, avec le prince non charmant dépité… La troisième n’a pas le temps de l’ouvrir que se pointe Maléfique, la méchante, que l’on a oublié d’inviter (et pour cause). Elle lance une malédiction sur la pauvre enfant « qui avant l’âge de ses 16 ans, se piquera le doigt à la pointe d’une quenouille ce qui la tuera »… Déjà il faut savoir ce qu’est une quenouille, un fuseau et tout le bataclan… Difficile à expliquer à des enfants qui n’ont jamais vu leur mère seulement tricoter…

Ne reste à la 3ème fée qu’à essayer de contrecarrer ce sort atroce qu’elle ne peut pas tout bêtement annuler, sinon l’histoire s’arrête là. La demoiselle tombera dans un sommeil qui certes sera fort long (des clous !) (on ne parle plus de 100 ans déjà, comme dans le conte d’origine), mais un baiser d’amour la sortira de ce si long sommeil (laissez moi dormir).

Les 3 bonnes fées décident de s’occuper de l’enfant (n’importe quoi ! Perrault doit se retourner dans sa tombe !), et l’emmènent dans la forêt pour l’élever normalement, sans magie, loin de toutes les quenouilles que le roi a fait brûler.

Là se pointe au bout de 16 ans, la première héroïne de Disney qui ressemble à une jeune fille. Blanche neige et Cendrillon c’est peanuts. La belle Aurore a de la poitrine et une taille fine. C’est une vraie jeune fille qui ignore tout de sa destinée mais qui ressemble à une femme. Elle chante dans la forêt (encore une chanteuse !) avec les animaux (encore la faune de la forêt !) et bien naturellement attire par son chant de sirène, le prince Philippe qui avait grimacé devant son berceau 15 ans et 10 mois auparavant (on reconnaît bien là l’homme et son intuition de pinces à asperges…)

Bref : ils vont tomber amoureux en deux temps trois mouvements, comme dans les films (d’ailleurs c’est un film). Ils prennent un rendez-vous crapuleux d’amour pour le soir, dans une cabane dans le vallon (il saura lequel). Mais Maléfique recherche la gamine depuis sa naissance. Elle va avoir 16 ans ce soir, elle n’a plus que quelques heures, et il n’est pas question qu’elle loupe son sort. Encore une obsessionnelle. Ca pullule dans les contes (avec les marâtres et les chanteuses)…

Fort heureusement les fées se disputent à grand coups de baguettes sur le « rose », ou « bleu » de la robe de rêve (Perrault est définitivement à plat ventre dans sa tombe), ce qui alerte le corbeau de la sorcière parti à la recherche de la belle… Bien évidemment la Maléfique arrive à ses fins. Elle ressort un vieux fuseau de derrière les fagots, truque la cheminée du château parental, hypnotise la belle pour qu’elle se pique le doigts et s’endorme, et kidnappe le prince au baiser d’amour au passage pour le garder pour plus tard (dans 90 ans environ).

Là, Disney a fait très fort. Les petites fées vont découvrir que c’est le prince Philippe qui est amoureux de la belle et Visse Versailles, elles vont l’accompagner pour l’aider à sortir Aurore de son sommeil qui au départ devait être fort long. Si l’on compte bien, entre la délivrance du prince capturé pour ne pas chercher sa belle, les ronces qui poussent autour du château comme des orties et le passage dragon qui sera fatal à Maléfique, elle aura dormi maximum 3 heures, c’est trop horrirrifiant ! (une nuit de 3 heures, j’appelle cela de l’insomnie).

Mais bon bien entendu, elle supporte bien l’insomnie comme toute princesse qui se respecte, se réveille fraiche et rose et sans poil aux pattes pour aller danser avec l’homme de sa vie, sans s’étonner de rien (comme Blanche neige, ont-elles des neurones ?), en changeant de couleur de robe toutes les 3 secondes, sous les yeux émerveillés de ses parents qui la retrouvent.

Je le trouve très tarte ce dessin animé. Je l’adoooore. D’ailleurs Pulchérie et Delphine le connaissaient par coeur, comme les enfants savent le faire quand il ne s’agit pas de règles de grammaire ou de tables de multiplication. Elles me l’ont souvent « fait » en son, en voiture, en m’épargnant le « quand c’est qu’on arrive »…

Par contre, par rapport au conte véritable, il y a vraiment un nom respect de l’auteur…

B comme Blanche neige…

Blanche_neigeUn vrai conte de fées !!! Le premier que j’ai appris à Pulchérie avec un livre illustré Disney (car j’adoooore Disney). Je n’aurai pas trop de 3 vies après celle là, pour expier mon péché.

Pour Delphine j’aurais voulu édulcorer un peu, mais je me faisais reprendre par l’ainée…

Il était une fois… Une femme (reine) qui désespérait d’avoir un enfant. Elle brodait sur son balcon, sous la neige (!) (je ne vous retiens pas, allez broder sur votre balcon sous la neige), dans un fauteuil en ébène et se piqua le doigt avec son aiguille. Une goutte de sang tomba sur la neige, et elle fit un voeux : avoir une fille qui aurait les cheveux noirs comme l’ébène, la peau blanche comme neige et les lèvres rouges comme le sang qu’elle appelerait « Blanche neige » (ne cherchez pas la scène, elle est désormais coupée, mais existait bel et bien quand j’étais petite, on voyait la mère de Blanche Neige).

Vous sentez le drame pointer et vous n’avez pas tort. Toute petite que j’étais, j’avais bien compris que broder et se piquer le doigt avec une aiguille était mortel et à fuir absolument. Car la reine meurt en mettant au monde sa fille tant espérée (faut dire qu’il y a de quoi en crever, sans médecin génial à proximité + un anesthésiste). Petite, je croyais que c’était la piqûre qui l’avait tuée cette pauvre femme, d’où ma haine des piqûres (et de la couture).

La mère de blanche neige morte, le père n’a qu’une hâte, se remarier, avec une harpie bien évidemment. Si la marâtre (la femme du père, à ne pas confondre avec la belle mère qui est la mère du mari, mais le terme marâtre est tombé en désuétude) n’est pas infâme, le conte ne tiendra pas debout (voir entre autres, Cendrillon). Il faut en plus que le père décède tout de suite après le remariage, sinon c’est pas drôle (on ne sait pas de quoi il meurt d’ailleurs, ce ne doit pas être important).

La reine est très belle et tient à le rester (la pauvre ignore du temps l’irréparable outrage). Elle tient également à être la plus belle de toutes. Elle déteste Blanche Neige qui s’occupe de la vile besogne au château, mais chante divinement bien (voir Cendrillon) en nettoyant les marches d’un escalier dans le jardin. Son chant attire un prince (forcément charmant, sauf que dans le dessin animé il est assez falot, je veux dire moyennement séduisant) qui s’éprend d’elle (Blanche Neige), bien entendu.

La reine a des pouvoirs magiques (hou la vilaine !) et un miroir qui cause .

Je préfère personnellement faire l’impasse sur l’objet qui me dirait « vous avez une ridule au coin de l’oeil droit, une pustule sur le front, une petite mine ce matin, et vous êtes tout à fait moche quelconque » (brr, j’en frémis).

Le miroir ne sait pas mentir, et il est bien obligé de révéler à la reine qu’elle n’est plus la plus belle, mais que c’est Blanche Neige. Il le sait parce qu’il est magique. La reine se met en colère et décide d’éliminer sa rivale. Courageusement elle fait appel à un chasseur qui doit tuer la petite et ramener comme preuve son coeur dans un coffret (oui oui, on raconte cela à nos enfants, dès 3 ans…)

Le chasseur se dégonfle, Blanche Neige s’enfuit dans la forêt et pour moi c’est un grand moment du film que nos terreurs d’enfants face à l’inconnu, dans cette forêt qui lui semble si hostile (oui, ce dessin animé a sû retracer très exactement nos peurs enfantines). Pulchérie avait très peur également et elle avait bien raison. Jusqu’à ce que les yeux maléfiques se révèlent être de gentils lapins, ratons laveurs, cerfs et biches, etc… (« ouf, on se sent mieux, hein ma chérie ? – Vi » (mère indigne)).

Tout ce petit monde là l’emmène dans une petite maison occupée par des nains (7, c’est le chiffre fatal). La première chose que Blanche Neige voit, c’est que c’est mal tenu. Il faut faire le ménage. Moi j’aimerais bien faire le ménage avec la même aide qu’elle (et tant pis pour les voisins) car tout le monde s’y colle : toute la faune de la forêt participe. Après toutes ses émotions, elle va s’écrouler sur plusieurs lits et s’endort. Tout va bien, l’enfant est serein (il a zappé le coup du chasseur et du coeur dans le coffret).

Les nains rentrent du boulot hé ho hé ho. Ils trouvent Blanche Neige et décident de l’adopter. Ca tombe bien, elle est bien là au fond des bois, où un jour son prince viendra… Je ne sais pas si Freud à fait une étude sur Blanche Neige habitant avec 7 nains, d’ailleurs je déteste Freud. Mais j’aimerais bien savoir ce que les psys en pensent… (hé hé… « oui ma chérie je tourne les pages »).

La reine apprend du miroir toujours franc, que Blanche Neige est vivante et qu’elle a été duppée. Toute femme la comprendra, il faut faire quelque chose. On ne peut faire confiance à personne qu’à soi-même (et encore !) et elle va s’occuper du cas elle-même pour être certaine du résultat. Elle décide de se transformer en immonde vieille femme (quand je pense que c’est cela qui me guette, « oui je tourne les pages ma chérie »), et empoisonne une pomme pour tuer endormir la malheureuse enfant. Notre malheureux enfant à nous ne moufte pas sur le coup du poison et continuera à bouffer des pommes (c’est admirable !)

Je vous passe la visite de la vieille dame horrible et ses conseils sur la tarte aux pommes meilleure que celle aux prunes, l’autre andouille de boniche des 7 nains qui goûte la pomme (alors que tous les animaux l’ont avertie de quelque chose) et se pâme par terre (forcément c’était empoisonné), la poursuite des nains qui vont réussir à faire mourir la vieille sans y toucher (bien fait !) « c’est quoi les oiseaux qui s’envolent maman ? » « des vau… des vauriens ma chérie… »

Et les nains ne peuvent se résoudre à l’enterrer tellement elle est belle (blanche neige) (« c’est quoi enterrer maman ? » « oui je tourne la page mon trésor »). Ils lui font un cercueil de cristal où chacun peut la contempler.

Le prince arrive sur son cheval blanc (j’aime bien un cheval noir aussi, mais bon, dans les comtes, ils sont forcément blancs). Il ne se dégonfle pas lui, il soulève le couvercle du cercueil et embrasse la morte (berk)  (oui tout le monde pense qu’elle l’est). Du coup elle déglutit son quart de pomme et se réveille. Le prince la prend dans ses bras, et l’emmène chez lui et gnagnagna…

TOUT VA BIEN !

Quelle belle histoire pour nos enfants… Et il y en a pour critiquer qu’on les laisse regarder (accidentellement) les informations qui sont souvent traumatisantes ! (le prochain qui pointe son nez, je pourrais lui faire l’intégrale de Disney, après il se remettra de tout !)

Le syndrome Blanche Neige c’est rester chez soi à récurer (en chantant), en se goinfrant de tartes (aux prunes) en attendant que le prince charmant sonne à la porte. On peut aussi s’ouvrir les veines et attendre les pompiers : à mon avis ce sera plus efficace…