Mon bac (part 3)

Il y avait un petit moment (4 ans quasiment) que nous passions nos vacances avec meilleure amie, dans la maison de mes arrières grands parents, sans confort, sans eau chaude, sans chauffage. Les meilleurs souvenirs pour toujours de notre vie.

Nous allions donc réviser. Je ne sais pas si les parents y ont cru ces innocents. Peut-être nous pensaient-ils aussi stressées qu’eux.

Je précise donc : premières épreuves du bac passées (écrit), nous étions dans l’attente des résultats avec 3 options : reçu du premier coup, oral de rattrapage, ou recalé et peut mieux faire l’année prochaine.

Moi j’étais tranquille : le bac du premier coup les doigts dans le nez. J’avais assez bossé pendant 2 ans mine de rien, en étant régulièrement en tête de classe sans problèmes. Pas à m’abrutir à essayer de tout savoir trop tard 2 semaines avant les épreuves, comme beaucoup. Les révisions n’ont jamais été mon truc : je savais ou pas, mais généralement je savais ayant ingurgité tout au fur et à mesure et à bien y réfléchir, c’est dingue cette capacité d’apprentissage que nous avons dans notre folle jeunesse.

Meilleure amie se mariait en septembre quoiqu’il advienne. Nous avons donc révisé à fond pour nous préparer à l’oral de rattrapage, vous l’imaginez bien. Elle parce qu’elle s’en fichait de l’avoir son bac, moi, parce que j’étais certaine de ne pas avoir à cocher l’option « rattrapage ». Donc nous avons fait très fort, et sans bouquins d’aucune sorte :

  • A poil dans le jardin à causer de son mariage et à peaufiner un bronzage sans marque qui chez moi ne viendrait jamais, sans nous douter qu’un vieux voisin nous matait sans jumelles
  • A manger du riz au lait en nous racontant nos déjà vieux souvenirs et en faisant de la gym pour brûler les calories du riz au lait
  • A écouter la musique à fond (pour le plus grand plaisir des autres voisins), dont les Beatles et les Aphrodites childs de préférence, sur mon tourne-disques dont il est bien dommage qu’il ait été jeté un jour par ma mère qui normalement garde tout. Les filles se seraient battues pour, je le sens bien.
  • A puiser dans les recettes de Mrs Morgan pour nous faire des masques de toutes les couleurs et des bains pour cheveux idem
  • A aller nous baigner de préférence dans les étangs où il était précisé que c’était interdit (pourquoi interdit ?)
  • Supers souvenirs.

Vint le jour des résultats. J’avais tout de même une petite angoisse et pris le train avec mes copines de classe un peu crispée. Les résultats étaient affichés à Versailles (quel sadisme !) et papa le regrettait ce coup ci, mais il avait un chantier et ne pouvait m’emmener en voiture.

Ce fut la journée de la désolation. Classe excellente, quasi tout le monde avec avis très favorable. Du plus loin que nous approchions de ce fichu Lycée Marie Curie, on en voyait beaucoup trop pleurer. Les profs ayant déclaré rester coûte que coûte jusqu’au bout, jusqu’au dernier élève, avaient disparu.

Je n’ai pas eu le temps d’avoir peur. De loin, le seul garçon de la classe me fit « bravo ». J’étais là, dans les reçus du premier tour, j’ai bien vérifié. Mais pour toutes mes meilleures copines il n’y avait pas de rattrapage, et cela m’a gâché ma joie de les accompagner vers un retour sans retour. Nous n’étions que 4/30 dans mon cas et seulement 2 pour le rattrapage. J’ai appelé mes parents qui m’avaient fournie en petites pièces, pour les rassurer et tout de même partager ma joie.

Et puis donc, triste retour. Comment se féliciter quand tout le monde ou quasi pleure à côté ? Nous nous sommes raccompagnées les unes après les autres. Les réactions parentales étaient variables :

  • Ce n’est pas grave ma chérie ce sera pour l’année prochaine !
  • Bravo ! je n’en attendais pas mieux de toi !
  • Tu as toujours été nulle !
  • Tu n’es plus ma fille !
  • File dans ta chambre, on en parlera tout à l’heure !

Du coup je suis rentrée un peu tard à la maison. Tout le monde m’attendait pour un restaurant. Meilleure amie avait appelé : elle avait son bac aussi. Nous avons donc fêté ça, et j’ai oublié devant un trop bon repas, ma peine pour les autres.

Ce sont des jours de joie qui comptent dans une vie, en tous cas cela a compté dans la mienne car ce bac pro ce n’était pas rien. Je m’en souviens toujours avec émotion, ainsi que de tous les coups de téléphone que j’ai eus le lendemain, tout le monde étant encore là. En attendant avec impatience que je rentre pour ce restaurant dont je me souviendrai toujours du menu, les parents avaient eu le temps de prévenir tout ce monde…

J’ai tellement peu stressé pour le bac des filles que je ne me souviens que de l’annonce des résultats positifs… Je me souviens que j’étais vraiment confiante, qu’elles étaient bien classées quoique… Il en faut si peu : perdre ses moyens par exemple même si l’on est excellent.

C’est ballot… D’ailleurs encore maintenant puisque Delphine est toujours étudiante, je ne me souviens que de l’annonce du bon résultat… Bon OK pour son bac, j’étais en Tunisie et j’ai appelé la maison 16 fois avant de tomber sur elle : cette chipie faisait la fête avec ses copines… Avant même que je ne revienne, elle s’était déplacée sur Paris avec ma pince à épiler et mon ôte agrafe. Maintenant elle oublie carrément de me dire que ses partiels c’est OK, les enfants sont d’une ingratitude épouvantable…

Pardonnez moi mes chéries pour votre bac… Cela vous aurait peut-être fait plaisir de me voir me ronger les sangs. Ce sera pour vos accouchements. Je sens déjà que je ne vais pas en dormir de la nuit en faisant une crise de colite frénétique par solidarité…

Mon bac (part 2)

Après la philo, l’anglais oral, venaient les épreuves les plus marquantes. Bureau Secrétariat : coefficient 6 et 5 heures à y passer, éliminatoire le cas z’échéant. Epreuve administrative : coefficient 4 et 3 heures, droit, et j’en passe.

Les profs nous avaient fait la morale. Bien manger le matin, venir avec un en-cas pendant l’épreuve de 5 heures. Obéissante et disciplinée, je m’étais donc fait un gâteau au chocolat la veille de l’épreuve éliminatoire et Mrs Bibelot m’avait acheté de quoi me faire un petit déjeuner consistant, en se promettant d’être debout 1/2 heure avant l’heure à laquelle je devais poser le pied par terre, on se demande pourquoi.

Pas de panne d’oreiller. J’avais dormi moins profondément en songeant aux oeufs au bacon (miam), au jus d’orange, aux toasts grillés avec confiture d’orange (miam), au thé de Ceylan achetés par maman. Vous allez vous dire que je n’étais qu’un ventre et vous n’aurez pas tort.

J’ai donc petit déjeuné sévère avec Mrs Bibelot se souvenant de ses vacances en Angleterre. Je savais que c’était l’épreuve à ne pas louper. Après ma douche, papa étant venu vérifier que c’était bien moi, j’ai même eu le temps de me faire en plus du gâteau au chocolat (je n’étais déjà pas très sucre), un club sandwich impressionnant.

J’ai passé mon épreuve à manger, c’est mon souvenir majeur alors que le sujet pfuittt, et ce, malgré le petit déjeuner. Ceci sous l’oeil désapprobateur de celles qui jeûnaient. Nous n’étions que 2 à ne pas être arrivées à jeun et à boulotter continuellement (16/20 pour moi, 15,5 pour l’autre, à X 6 vu le coefficient) : de vrais hamsters. C’était mal vu, cela donnait l’impression que nous n’en avions rien à faire ce genre « rongeur », ce qui était totalement faux.

Les autres épreuves se passèrent un peu de la même façon, moins la bouffe, je pouvais survivre 3 heures tout de même. Je restais sans angoisse, sentant les parents et tout le reste de la famille stressés…

Venaient 3 semaines de révisions à passer avec meilleure amie oeuvrant dans une autre académie. Venaient 3 semaines à préparer notre rattrapage éventuel (et honteux) dans la maison de nos vacances de jeunesse dont nous parlons souvent encore, 32 ans plus tard…

Le retour de l'oral d'anglais

Epreuve d’anglais oral à passer à Versailles, au lycée Marie Curie (ou bien Pierre et Marie, je ne sais plus, sauf que c’est elle qui a vraiment découvert le radium).

Convocation à 8 H 30. J’arrive à l’heure grâce à la voiture de Jean Poirotte. Je passe la première assez décontractée et j’attends les copines dont une a la mauvaise idée d’avoir un nom commençant par V. C’est simple, on doit l’attendre jusqu’à 13 H 30 et on crève de faim (à 18 ans, on crève de faim à toutes les heures).

Nous voici donc parties pour la gare des chantiers en échangeant nos impressions. Nous arrivons à la gare en ayant nos impressions. Nous voyons que le prochain train pour Rambouillet est quai C, dans 1 minute, donc nous laissons nos impressions pour un court laps de temps.

Cavalcade dans les escaliers. Certaines vident un peu de leur stress et nous arrivons sur le quai en même temps qu’un train dans lequel nous montons sans réflexion.

« Tiens » dit Véronique quand le train démarre « Rambouillet c’est par là ? ».

Elle a raison, Rambouillet c’est dans l’autre sens. Nous descendons donc à la station suivante que couvre encore notre billet en maudissant notre hâte, car un autre train arrivait à Versailles, allant dans l’autre sens, pendant que nous montions avec trop de précipitations dans cet imbécile de train partant vers Paris.

Nous regardons bien le quai qui va nous permettre de rentrer chez nous et d’aller manger. Quai D. Nous nous y précipitons même si, vu l’heure, le prochain train va mettre 1/2 d’heure à arriver.

Nous échangeons à nouveau nos impressions sur ce fichu oral. Cela nous prend du temps. Nous voyons des trains passer à droite, et repasser à droite, sans sourciller : il était bien indiqué « quai D ».

18 ans, toute une insouciance, il nous faut un homme avec casquette qui ressemble à un chef de gare, pour nous tirer de nos considérations distinguées sur le bac et ses épreuves. Il est 15 H 30. Tout de même !

  • Il nous demande « ce que nous fichons là ».
  • Nous lui répondons poliment que nous attendons le train pour Rambouillet annoncé quai D
  • Il nous rétorque que le quai a changé depuis 1 H 1/2 voire plus, et que nous avons loupé 3 trains. Nous sommes ravies Thérèse !
  • Nous lui demandons pourquoi une annonce n’a pas été faite par micro
  • Il ne sait pas pourquoi, il est confusionné légèrement mais sans plus
  • Nous lui précisons notre situation précaire et que nous crevons de faim
  • La SNCFeu s’excuse et nous offre les sandwiches
  • Nous allons prendre possession des sandwiches pendant que le 4ème train passe quai A
  • Nous prenons le bon train, au bon quai, 1/2 d’heure après
  • Je rentre à la maison pour trouver Mrs Bibelot dans tous ses états : j’ai loupé mon épreuve d’anglais oral et du coup je me suis jetée sous le train, elle a vécu un véritable enfer

Je commence légèrement à le penser : la vie n’est qu’un long calvaire…

Mon bac (part 1)

Le temps du bac revient inéluctablement, comme les hirondelles au printemps, le muguet au mois de mai, et les guirlandes dans le sapin en fin d’année.

Ca fait combien de temps déjà ? Un bout de temps, mais c’était hier pour moi. J’avais 18 ans et je devais passer mon bac. Je me revois encore, passant dans le sens sortie les grilles du lycée début mai (nous avions en technique les premières épreuves vers le 15) en pensant bien le quitter pour toujours, pour 2 semaines de révisions, avec en vue, après les premières épreuves 3 semaines à passer avec meilleure amie dans la maison de campagne familiale vide que nous occupions pendant nos vacances scolaires, pour réviser afin de nous préparer à l’oral de rattrapage.

La première épreuve : philo comme pour tout le monde. Coefficient 1 pour moi et j’avais brillé toute l’année avec 0,5/20 parce que le prof était sympa (mais rasoir). Là 1 dissertation à faire entre 3 choix, qui tombait hyper bien : j’avais lu un truc là-dessus chez Mrs Morgan le dimanche précédent. J’ai donc brillé sans le savoir à l’avance, mais je sentais bien ce coup là (14/20, le prof à voulu voir ma collante pour y croire).

Deuxième épreuve : anglais oral (l’écrit c’était pour le rattrapage). Bac technique : nous passions les épreuves non techniques à Versailles, le reste devant se dérouler dans notre salle habituelle dans notre lycée. Je dormais comme un ange en attendant le moment délicieux d’affronter un prof d’anglais inconnu, à tel point que je n’ai pas entendu sonner le réveil mis sur force 10 par Mrs Bibelot…

Curieusement, moi qui suis d’un naturel plus que souvent angoissé, les examens, les entretiens d’embauche, ne m’ont jamais stressée. Jamais. Je dormais donc du sommeil du juste quand maman a débarqué dans ma chambre, en alerte : j’allais rater mon train, c’était l’évidence car j’avais 15 minutes pour me préparer, parcourir 1 km jusqu’à la gare, et donc louper le train et mon épreuve forcément, vu que je faisais partie des premiers appelés de par mon nom de famille commençant par un B. Elle réveilla papa et son nom de famille commençant pas un B (et pourquoi pas Z hein ?), qui dormait aussi profondément que moi, parce que la voiture c’était le mieux pour arriver à l’heure et qu’il était le seul à savoir conduire.

Pestant, papa me conduisit jusqu’à Versailles, en me faisant remarquer que franchement, Coraline, on ne dort pas avant son bac d’anglais, ou alors juste un petit peu, mais la panne d’oreiller ça ne fait pas sérieux. S’il dormait lui, aussi profondément à 7 H 45, c’est précisément parce qu’il s’inquiétait de cette épreuve de langue et n’avait pas fermé l’oeil de la nuit. Il me lourda façon « siège éjectable » devant le lycée versaillais, avec mes copines que nous avions récupérées à la gare de Rambouillet après les avoir prévenues, un bon quart d’heure après le départ du train. Il nous lourda d’autant plus vite qu’une d’elle avait oublié : sa convocation et ses lunettes. Comme elle venait pour soutenir les premières à passer, c’était jouable de la ramener en temps et en heure, et papa pu maudire la distraction féminine, d’autant qu’il avait, lui, oublié ses clopes et pas le temps de passer les prendre avant de ramener la distraite à Versailles in extremis.

C’est super un enfant qui passe son bac !

5 minutes après mon arrivée je passais devant le juge avec honneur. Evidemment j’attendis mes copines, ce qui se solda par une arrivée gare des chantiers en cavalcade. Direction Rambouillet : quai C. Nous dégringolons les marches à temps : un train arrive dans lequel nous nous engouffrons. Et là, petite voix de la plus angoissée des 5 « tiens, Rambouillet c’est par là ? »

Non Rambouillet c’était l’autre train, de l’autre côté du quai et le voyage de retour vaut son post à lui tout seul

Mes parents étaient donc mortellement angoissés alors que je restais cool et confiante…