Le genou de Jean-Poirotte (chapitre 8) : s'y retrouver dans Montpellier au retour…

genou2Ce n’était pas le tout d’être arrivées saines et sauves en prenant des points de repère, il fallait bien repartir de l’hôpital, en laissant un époux/père dans le gaz, souffrant encore plus, et nous inquiétant encore plus qu’avant (si c’était possible).

Cela avait bien mis maman sur les nerfs, quant à moi mon incursion aux urgences m’avait rendue d’humeur géniale.

Nous avons donc repris le chemin de la morgue sans trop nous perdre, retrouvé la bonne sortie, le parking et la voiture.

Le tout sous un cagnard pas possible.

En sortant du parking, bêtement, j’ai pris la direction « sortie ». On n’a pas idée d’être aussi con. Je l’ai su le surlendemain, mais j’aurais dû prendre LE SENS INTERDIT pour regagner le parking visiteur. TOUT LE MONDE LE FAIT.

Moi quand je vois un sens interdit, j’évite… Que voulez-vous, on ne se refait pas.

Traversée après la sortie, d’une résidence, pour regagner une voie roulante et là, un feu rouge.

  • Maman : on vient d’en face, va en face
  • Non maman, on ne vient pas d’en face, je vais plutôt prendre à droite
  • Je te dis qu’on vient d’en face, je reconnais la route
  • Et moi je te dis qu’on vient de la droite puisqu’on a tourné à gauche, et que moi aussi je reconnais la route.

Nous étions toutes les deux énervées, le feu est passé au vert (le salaud !) et je n’ai eu d’autre choix que d’aller en face, car maman s’énervait encore plus :

  • A DROITE C’EST BARCELONE, MALHEUREUSE NE VA PAS PAR LA !

Je vous informe donc que, d’après Mrs Bibelot (alors que moi, la direction Barcelone ne me dérangeait pas, car forcément il y aura la direction inverse à un moment donné), si vous prenez, où que ce soit, la direction Barcelone :

  • Vous allez vous retrouver à un moment ou un autre, embringué sur l’autoroute qui mène à Barcelone, sans espoir d’y échapper.
  • Après, une fois sur l’autoroute, c’est Barcelone ou rien, et vous n’aurez aucun moyen de quitter l’autoroute. Je ne sais pas s’il y a des stations service pour vous approvisionner en essence, vous demanderez à ma mère.

Moralité la première direction correcte a été un vrai plaisir pour moi « centre ville, centre touristique« . Et là, pas moyen d’en réchapper (comme pour Barcelone en fait), puisque la vision d’un autre panneau « Barcelone » avait fait pousser à ma mère des cris de putois « pas par là malheureuse !« . J’avais assez de mon père à l’hôpital…

Et puis les autres routes étaient en sens interdit… Vous l’aurez compris, je n’emprunte stupidement pas les sens interdits… Je ne vous raconte même pas dans quel état maman se serait retrouvée si j’avais pris un sens interdit en direction théorique de Barcelone (j’ai trouvé extraordinaire de voir dans Montpellier des directions bien en évidence à l’entrée des sens interdits).

Bref, nous voici au centre ville, piégées, obligées de suivre un sens giratoire, pour nous retrouver derrière une voiture de flics, dans une rue qui à mon avis était piétonne, vu la manière dont les piétons la fréquentaient…

  • Ma chérie, j’ai l’impression que TU ES dans une rue piétonne
  • Maman, tais-toi !
  • Je t’assure, il n’y a que les flics devant, et personne derrière
  • Maman, tais-toi JE COLLE AU CUL DES FLICS CONDUIS !
  • Ils s’arrêtent, tu vas voir qu’il y en a un qui va descendre pour te dire que c’est une rue piétonne.
  • VRSOELZN !

Au premier endroit que j’ai vu, semblant civilisé (un embouteillage), je me suis précipitée, ravie de trouver un feu rouge, et des bagnoles qui me klaxonnaient. Car j’avais repéré « Barcelone », et que je laissais entendre que j’allais par là et point final. Du coup j’ai klaxonné aussi… Cela n’a choqué personne…

Au bout du compte, avant Barcelone, très avant, j’ai trouvé la direction de l’aéroport, donc de la Grande Motte, et j’ai senti mes nerfs se relâcher…

La vie n’est qu’un long calvaire.

Nous n’avions jamais perdu que 3/4 d’heure, et je reste persuadée que j’ai fait 3 km en zone piétonne, en pistant les flics certes, mais bon…

Le genou de Jean-Poirotte (chapitre 6) Dans Montpellier c'est tout simple !

genouLe mardi, il était évidemment prévu d’aller voir Jean-Poirotte à l’hôpital, quand il était encore entier, maman étant persuadée que devant l’état de sa chambre, la Faculté allait décider de carrément la lui couper pour qu’on n’en parle plus.

  • Ma chérie, et si on allait l’amputer ?
  • Maman, on ne coupe pas une jambe comme ça !
  • Qu’est-ce que tu en sais ?
  • Oui on se demande vraiment ce que j’en sais ! (que j’en sais que s’il y avait eu un risque de ce genre, c’est dès le samedi qu’il aurait filé avec les pompiers à l’hôpital, mais bon, on ne rassure pas toujours comme il le faut)

Donc, je gambergeais à mon tour sur une amputation faite à l’arrache, en ayant expédié maman qui dormait vraiment très mal depuis quelques jours, faire une petite sieste.

Téléphone : 14 H.

Papa un peu dans le coma, me précisant que nous ne devions pas venir, car il allait descendre en salle d’op dans l’après midi.

  • Seulement cet après midi ? (plutôt rassurant par rapport à un degré d’urgence)
  • Oui… Ils vont me faire un truc dans la colonne, je ne me souviens plus du terme.
  • Mise au point de mes neurones : il a un problème au genou.
  • Ah on va te faire une péridurale ou un rachis ?
  • Une péridurale, c’est ça. Mais je ne sais pas ce qu’il m’ont fait, je suis dans le gaz
  • C’est mieux papa. Reste dans le gaz, cela va se passer comme sur des roulettes… (un peu comme pire que celles des dentistes, mais je n’allais pas le lui dire…)

Maman était vraiment décontenancée de ne pas revoir son petit mari tout de suite, mais j’ai pu la rassurer : on n’ampute pas sous péridurale dans un pays soi-disant civilisé (enfin je crois qu’on est soi-disant civilisés, en tous cas j’étais persuasive).

Le soir, il a téléphoné, toujours dans le gaz, que tout s’était bien passé, sauf qu’il souffrait toujours autant, voire plus (évidement, on lui avait encore tripatifouillé* l’articulation, cela doit être jouissif comme pas possible).

Le mercredi donc : départ pour Montpellier, avec moi au volant évidemment.

C’est tout simple, il n’y a qu’à suivre le fléchage, même à l’entrée de la ville où il ne faut pas louper le « hôpitaux, facultés » qui est fléché au dernier moment, sortie donc qu’il faut repérer avec anticipation en évitant de doubler le connard improbable sous ces latitudes civilisées qui roulerait à 40 …

  • Après il ne faut pas louper le « hôpitaux, facultés » à la première jonction
  • Après il ne faut pas louper le « hôpitaux, facultés » à la seconde jonction
  • Puis au prochain rondpoint il ne faut pas louper le « hôpitaux, facultés »
  • Après la déviation suite aux travaux du tram, il faut récupérer le « hôpitaux, facultés »
  • Puis à la jonction suivante il faut rester concentré sur « hôpitaux, facultés »
  • Le tout, sous fond de vociférations klaxon des autochtones d’une ville soi-disant civilisée, qui à la vue de votre plaque « 78 » ne pensent pas une seule minute que vous cherchez votre chemin.

Un doute étreint Mrs Bibelot qui vient de constater avec amertume que je vois mieux de loin, sans lunettes, qu’elle avec lunettes. Je suis bien consciente que ma vision ne va pas aller en s’améliorant, et que,  à la tombée de la nuit j’y verrai plus clair je ne veux pas en rajouter une couche à déclarer que j’y vois moins qu’il y a 10 ans, donc je profite de ce qu’il me reste de mon oeil d’aigle d’antan…

  • C’est quoi déjà le nom de l’hôpital de ton père ? La Reynie ? (façon historienne)
  • Putain, le feu rouge (façon chauffard)…. Cela ressemble à cela, mais je ne vois pas ce que le lieutenant de police de Louis XIV pourrait avoir à faire avec un nom d’hôpital
  • Tu as raison… Labeyrie ? (façon dégustation)
  • Ca y ressemble aussi. Pas de soucis, quand on verra le nom, cela va nous revenir.

Ralentissement de MA voiture qui ne risquait pas de dépasser le 50 à l’heure prôné dans Montpellier, au grand dam des autres conducteurs façon le 50 j’m’entappe !

Sur la droite en effet, étaient régulièrement fléchés des tas de nom d’hôpitaux. Je ne pANsais pas qu’à Montpellier on était autant MALade.

A droite tout à coup « LA PEYRONIE MA CHERIE, TOURNE ! »

Après c’est tout droit pendant 500 mètres, on vous annonce que cela va être à gauche, sauf que c’est tout de suite à gauche, donc, j’enregistre que pour QUELQUES JOURS à venir, il me faudra rester sur la droite ou sur la gauche, et merder les conducteurs de Montpellier.

Nous sommes donc arrivées saines et sauves (sauf mes nerfs, maman s’étant cramponnée pendant tout le voyage à sa chère poignée), à l’hôpital Lapeyronie.

Nous avons négligé les parkings visiteurs pour prendre « entrée principale ».

Nous avions tort.

Car la vie n’est qu’un long calvaire…

* C’est de moi, c’est de la même veine qu’abominafeux…