C comme Comment chier une pastèque part 2

Accouchement_57210942Pour Delphine, ma gynéco et moi avions choisi une autre maternité (enfin elle, j’avais eu trop de problèmes dans la première, je vous raconterai).

J’avais été prise en main dès mon 4ème mois par un accoucheur de choc. Comme pour Pulchérie je faisais de l’hypertension dite gravidique (gravide est relatif à grossesse : un utérus gravide = vous êtes en cloque) et c’est grave. C’est ce qui provoquait ces crises d’éclampsie fatales qui ont tué tant de mamans (et certainement encore actuellement dans beaucoup de pays). Pour Pulchérie, l’accoucheuse cette garce, m’avait donné un traitement sans que la tension baisse et sans qu’elle ne moufte. Là, l’accoucheur me changea le traitement illico qui me transforma pour le reste de ma grossesse en endive trop cuite avec une tension normale (je ne sais pas si vous visualisez bien l’énergie du légume, pour la couleur je suis toujours plutôt pâle ayant autant de mélanine qu’un yahourt…).

Bonne nouvelle, la péridurale n’était toujours pas remboursée par la SS (la sécu, ne nous égarons pas) sauf si elle était prescrite par l’accoucheur, et elle l’était d’office dans mon cas, faisant baisser la tension de manière significative pendant l’accouchement (j’ai sû à ce moment là que j’avais frôlé l’éclampsie 3 fois pendant mon précédent accouchement sans qu’on ne fasse quoi que ce soit, car il avait fait rapatrier mon dossier et soupiré devant la longueur du monitoring et l’absence de traitement).

Donc péridurale prévue, visite chez l’anesthésiste avec joie. Delphine prévue pour le 22 octobre, me voici saisie malgré ma légumisation, par le syndrôme du nid, le 9 octobre.

Le syndrôme du nid (pour les nullipares qui se demandent si je suis folle), est un syndrôme qui n’attaque pas toutes les femmes, mais qui fait que tout à coup on a une énergie débordante et l’envie de tout ranger, laver, aligner au cordeau + faire des provisions. En fait, c’est un instinct ancestral qui pousse la maman à tout mettre en ordre avant qu’elle ne soit ratatinée sur son lit pour plusieurs jours. Albert est rentré le 9 au soir pour me trouver sur un escabeau à récurer une applique, alors que la veille je faisais la baleine échouée sur la banquise, sur le canapé, à regarder Dorothée avec Pulchérie, Pulchérie me tenant l’éponge pour se sentir utile et ne pas grimper dans les plantes vertes. Il a illico appelé Mrs Bibelot (après m’avoir intimé l’ordre de descendre de là et terminé l’applique) qui s’est pointée le lendemain matin, sans savoir (elle n’avait pas connu le syndrôme du nid, elle, mais aurait dû se méfier vu que je lui avais fait le coup pour Pulchérie) qu’elle se ferait réquisitionner pour laver et dégivrer le frigo et faire 62 lessives et le repassage qui allait avec pendant que j’allais à Carouf remplir le congélateur et les placards de bouffe pour 6 mois. Mrs Bibelot opérant bien naturellement avec Pulchérie grimpant dans les plantes vertes… (ce trésor !)

L’instinct étant très sûr, le 11 octobre à 12 H 18 (vous noterez l’exactitude des heures et dates, mais ces moments sont tels qu’on ne peut les oublier, et en plus j’avais une montre à affichage digital), alors que je rangeais le dernier poney rose de Pulchérie sur l’étagère ad hoc, dans un appartement reluisant, j’ai ressentis la première contraction. Putain, elle faisait mal d’office celle-là et bien évidemment comme toutes les femmes, je ne me souvenais pas que cela faisait mal à ce point là dans le ressenti. Deuxième contraction 1/2 heure plus tard, Pulchérie ayant terminé de ne pas manger ses nouilles et son oeuf coque, ni la crème au chocolat (faut suivre).

A 15 heures avec des contractions tous les 1/4 d’heure, naïve, j’ai appelé ma grand mère chargée de venir s’occuper de la petite et du père en mon absence pour qu’elle rapplique vite fait (ce qu’elle a fait le lendemain matin, récupérant Pulchérie chez mes parents), et je me suis rapatriée chez Mrs Bibelot et Jean Poirotte pour ne pas accoucher toute seule dans ma salle de bain avec Pulchérie faisant bouillir de l’eau. Je me disais qu’ayant déjà eu un enfant, forcément, là, ça irait tout seul (quand je vous le dis que j’avais une nature optimiste !).

Jean Poirotte a fait à Pulchérie l’intégrale de ses livres d’enfants avec le ton, pendant que, reprenant mes bonnes habitudes, je déambulais dans le salon à chaque contraction en respirant moyen fort pour ne pas traumatiser l’aînée (non elle ça allait, c’était mon père qui était traumatisé, ma mère lui ayant donné l’habitude de s’avachir dans un fauteuil en réclamant un prêtre ou qu’il l’achève tout de suite). Assistée par ma mère qui en sait des choses et que ce n’est pas pour rien que l’on accouchait debout avant que les hommes y mettent leur nez (ben oui, le bébé appuyant sur le col, accélère le travail. Couchée c’est pas top, surtout qu’on vous couche avec le bas du corps surélevé ce qui fait qu’en plus de chier une pastèque, faut la propulser dans l’espace en méprisant la gravité…(et qu’on en césarise des femmes parce que le bébé ne descend pas, forcément vu qu’il doit monter, faites lever la mère à 8 cm, vous verrez s’il ne descend pas…))

Albert rôdé débarqua tranquillement du boulot à 19 heures pour me trouver la bave aux lèvres (déjà ?), pointant du doigt la valise et les deux sacs d’un air peu aimable. Arrivée à la maternité à 20 heures (il avait mangé un petit morceau, enfin de la potée, pour prendre des forces et du coup grillé tous les feux rouges, en espérant des motards pour lui ouvrir la route) pour m’entendre dire que le col n’était même pas en voie d’effacement… Là j’ai pris mon air le plus aimable, signalé que l’on était au cinquième, et que je ne revivrais JAMAIS ce que j’avais vécu pour Pulchérie. La sage femme charmante, m’a déclaré que c’était hors de question, mais que l’anesthésite n’intervenait qu’une fois le col effacé. C’est quoi cette connerie ? L’effacement du col c’est aussi douloureux que sa dilatation ! Voyant ma mine aimable, elle condamna les fenêtres, me refila un petit cachet de rien du tout pour me détendre, et j’ai pu dormir jusqu’à 23 H 30 en rêvant que j’accouchais, c’est le pire cauchemar que j’ai fait de ma vie…

23 H 30, bien sûr, je sonne comme une débile. Arrivée immédiate, flanquage d’Albert à la porte (pauvre bouchon il dormait sous une couverture de sécurité dans un fauteuil pendant que je souffrais en dormant), examen : à l’ouest rien de nouveau. Sauf qu’elle va faire venir l’anesthésiste quand même parce qu’elle doit me mettre une perf pour accélérer le travail et que sans péridurale je vais vivre un martyr (merci madame !). Départ vers la salle de travail à 23 H 40 avec Albert baillant, à qui l’on épargna la charlotte (mais pas les chaussons verts et la blouse…)

Arrivée de l’anesthésiste à 24 H en salle de travail (il était temps, j’envisageais sereinement de tuer Albert à coup de flacon de perf déjà posée). Ejection d’Albert pour la mise en place de la péridurale avec mille précautions (les anesthésistes débutaient un peu sur ce coup là). C’est très facile de se tenir sans bouger pendant une contraction… Mais j’ai pu. Et puis là, miracle. Tout à coup, plus de jambes, mais plus mal du tout du tout, je respire, je sens que je retrouve mes couleurs, j’aime tout le monde. L’homme de l’art me laisse un cathéter en place pour venir en remettre une dose à 4 heures du matin, promis juré, il revient, il m’aide à m’allonger et fait rentrer Albert en partant…

Minuit donc, je n’ai plus mal, la sage femme a ouvert la perf à fond car je ne sens plus rien, et se barre vu qu’apparement une emmerdeuse accouche également dans la salle d’à côté (on n’entend rien, ça change). Albert regarde le monitoring et commente comme pour Pulchérie  « attention en voilà une » (ça s’annonce sur le monitoring avant qu’on ne la sente) « la voilà ! » « Oh elle était forte ». M’en fous je ne sens rien, je regrette de ne pas pouvoir faire un scrable et lui flanquer mes 7 lettres sur mot compte triple. La sage femme passe sur le coup de 0 H 45 et m’annonce « 5 cm ». Déjà ? Je ne sais pas comment elle s’est faite avoir sur ce coup là, mais passer en 3/4 d’heure de même pas effacé à 5 cm de dilatation, c’était classe (à 10 cm on va expulser pour peu qu’on pousse).

1 H 15. Albert s’affole un peu devant la fréquence et la force des contractions qui lui rappellent vaguement quelque chose. M’en fous, je ne sens rien, je veux faire un scrable ou continuer à dire du mal de sa tante (impossible de croire que j’accouche). Il sonne. Personne. Il sonne à nouveau frénétique, la sage femme arrive en catastrophe (je la revois encore), me sourit gentiment, m’examine, se fige genre congélation instantanée et va réveiller la puéricultrice « allez chercher le docteur Trumphy ! Vite ! J’ai dit vite ! »

Oui ça urgeait, pour une fois Albert avait été à la hauteur et pour un peu Delphine tombait par terre. Trumphy n’était pas là qu’elle m’installait les jambes dans les gouttières ad hoc (je ne sentais rien et ne pouvais surtout pas bouger les jambes), me disait « essayez de pousser » « n’essayez rien, vous poussez toute seule » AAAAHHHHHH chouette, je pousse toute seule et je ne sens rien, youpeee ! Un « COUAC » dans la salle. C’était quoi ? Ben c’était le bébé, Delphine, qui a rouspété dès qu’elle a eu mis le nez dehors (moi je ne sentais rien et c’est Albert qui à mon « c’est quoi ? » a répondu « c’est le bébé »). Je précise que curieusement elle n’a jamais été rouspéteuse de nature alors que Pulchérie qui l’avait bouclé en naissant, si…

L’accoucheur s’est pointé en même temps que Delphine avec un synchronisme hallucinant, pendant que la sage femme terminait le travail (m’en fous, je ne sentais rien, mais bon j’avais oublié le scrable). Il se réveillait apparement, et l’a laissé terminer (la sage femme). Il était 1 H 35 très exactement quand on m’a posé ma crevette sur le ventre qui s’est mise à pleurer en cherchant le sein (c’était bien elle : j’ai faim !). Albert était ravi : ses mains étaient intactes. La sage femme y allait de sa petite larme et hop, on m’a piqué ma fille pour son premier bain (il paraît que cela ne se fait plus, c’est dangereux) donné par un père en pleine forme.

Retour de fille cadette endormie par le bain. Baisse de température du bouchon car l’accouchement avait été trop rapide, mise en couveuse (à plat ventre, c’était la mode) et Albert constatant qu’elle était plus grande que sa soeur et faisait au moins 60 cm.

Eclat de rire dans la salle. Non. Delphine faisait bien les 260 grammes de plus que sa soeur, annoncés par l’accoucheur à la palpation (on l’admire) mais comme l’aînée, faisait son petit 50 cm.

J’ai récupéré mes jambes et toutes mes facultés vers 4 heures du matin (on admire aussi l’anesthésiste), sans fourmis, sans rien, et pu prendre ma fille contre moi dès qu’elle faisait un couac, c’est à dire que je la gardais contre moi pour qu’elle ne couaque pas (comme pour sa soeur qui a passé sa première nuit sur moi, je n’arrivais pas à dormir malgré ma fatigue), sans alerter la puéricultrice. Et le lendemain matin, l’anesthésiste venu me retirer son cathéter inutile, à qui je demandais si « la péridurale c’était toujours aussi chouette ? », me répondit « pas de manière aussi carricaturale que chez vous ».

Chic ! pour une fois que je faisais tout bien… La vie n’est pas qu’un long calvaire (encore qu’entre 12 H et 24 H j’avais été tout de même une tueuse psychopate potentielle de première).

J’aurais bien eu une troisième fille mais celui qui roupille là haut, en a décidé autrement…

La péridurale c’est top. Et même si on sent pour certaines, un petit quelque chose, ce n’est certainement rien à côté de l’accouchement à l’ancienne…

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