Comment exploiter utilement nos enfants… (4)

Estelle Sainte marie 01Delphine s’était donc mise d’elle-même à 5 tétées par jour et l’heure c’était l’heure. Je n’ai plus exactement en tête les horaires, mais je suis certaine d’une chose : il y avait une tétée à 17 H (cela doit être cela, la dernière tétée vers 21 H 30, avant celle du matin 7 H 30) (Delphine s’étant réservé deux tétées séparées de deux heures seulement, au cas où qu’il y aurait la guerre).

Et le sénateur maire était en retard…

Pulchérie se tenait tranquille, n’ayant plus de vomito(ti ?) réguliers, l’appendice enlevé, mais était encore sous antibiotique vu la péritonite qu’elle venait de faire.

Delphine dormait, tout se passait donc bien dans la salle d’attente…Où Monsieur le sénateur maire vint me chercher en se confusionnant d’excuses pour ce retard inqualifiable.

A son regard je vis qu’il m’avait reconnue, qu’il avait reconnu Pulchérie. Sans doute avait-il oublié que lors de ma précédente visite j’attendais des jumeaux (soi-disant) car il ne fit aucune remarque et m’emmena dans son bureau (ou alors il pensa qu’il y avait eu un drame et préféra se taire).

Fatiguée, Pulchérie s’assit sur le tapis toujours persan et semblant avoir retrouvé toute sa beauté. Monsieur le sénateur rangea avec précipitation son stylo plume dans un tiroir, et m’écouta…

Comme beaucoup d’élus, naturellement, il planait à 10 km au dessus de nos problèmes, et j’ai bien insisté sur ces problèmes de moisissures qui allaient me rendre folle. Lui, regardait mon aînée, sage comme une image (là elle avait été dûment chapitrée), Delphine dormant dans mes bras comme un ange, et me regardait en se demandant visiblement si j’étais la même timbrée baba cool qu’il avait vue 9 mois plus tôt (comme le temps passe…).

J’insistais bien sur le fait qu’il pleuvait dans la salle de bain. Que je dépensais des fortunes en eau de javel et Albert en produits anti-moisissures, qu’il passait un WE sur deux à nettoyer les papiers peints (choisis fort heureusement comme étant lessivables, mais ils ne le seraient pas éternellement), et qu’outre tous ces problèmes l’organisme ILM nous traitait n’importe comment, avec des dates de chauffage réglées sans doute depuis la guerre de 14, des T° inacceptables (il avait gelé début janvier 1985 jusqu’à moins 20° et nous avions eu 13 dans l’appartement, avec un nouveau né de moins de 3 mois).

Il m’écoutait religieusement, sauf  que je surveillais avec attention la pendule, et qu’à l’instant précis ou la grande aiguille correspondant à l’heure 17 arriva sur le XII, avec un synchronisme parfait l’ange Delphine que l’on pouvait croire en catalepsie ouvrit l’oeil, et le bon…

Normalement son regard aurait dû voir un sein prêt à exploser qu’elle n’avait qu’à prendre, mais là, point de repas à l’horizon.

Elle se mit donc à hurler. Pourquoi attendre d’ailleurs ? C’est une bonne question (et les changements d’heure 2 fois par an ont été très difficiles avec elle pendant un bout de temps surtout à l’automne (j’ai faim maman…)…)

Je me suis toujours demandé comment un être aussi petit qu’un nourrisson puis un bébé jusqu’à 6 mois environ, pouvait faire AUTANT DE BRUIT en BRAILLANT !

Au départ cela devait être pour éloigner les prédateurs, et obliger la mère à ne jamais s’éloigner de sa progéniture.

Sur le plan des prédateurs, c’est achement efficace, sous le règne de Pulchérie puis de Delphine, nous n’avons croisé aucune hyène, aucun lion, rien du tout. Même le gros chien noir du coiffeur qui aimait à trainer dans le coin, s’enfuyait le plus vite possible…

Là le sénateur maire commença une fois de plus à s’énerver, d’autant que les braillements désespérés de ma progéniture résonnaient bien dans le grand bureau (d’époques diverses)…

  • « Sortez votre biberon madame ! N’hésitez pas !
  • « heu… (comment dire, si je sors un biberon elle ne saura même pas ce que c’est). Je n’ai pas de biberon…
  • Pulchérie intervenant : »on attendait Clémentine, ils ont pris Delphine, et elle mange le néné de maman, mais pas de biberon ».
  • « Eh bien mettez là au sein, c’est mignon, c’est joli, c’est naturel (c’est silencieux), je ne trouverai rien à y redire !

Une soudaine pudeur me paralysa. Je n’étais pas du genre à exhiber ma poitrine avec délectation, mais pas non plus à imposer ce spectacle à ceux qui ne le supportent pas (cela existe : ceux qui oublient que nous sommes des primates mammifères). Une fois où je m’étais réfugiée avec Mrs Bibelot dans un salon de thé, alors que tournant le dos à tout le monde j’avais mis Delphine au sein, deux vieilles dames étaient venues me demander si elles pouvaient regarder juste un petit peu, parce que c’était trop mignon…

Là c’était différent. Cet homme là serait amené, si le président de la République venait à clamser, à assurer l’intérim, je n’allais pas montrer le bout d’un sein à un peut-être un jour président de la république-même-si-pour-pas-longtemps… (encore que nous savons tous que nos présidents n’ont jamais eu aucun problème avec le fait de voir un sein, voire plusieurs…)

Il se servit une fois de plus de l’interphone, et la responsable des attributions de logement fut priée de rappliquer vite fait avec un dossier conséquent sur les plaintes des locataires de l’organisme X s’il y en avait.

Et il y en avait un paquet.

Ce qui régla la question du monsieur vaPPEUR ! fit que des travaux furent entrepris pour isoler les pignons un peu partout dans la ville, et que le chauffage soit correct (installation de palpeurs pour éviter la fatale coupure du 15 avril alors qu’il va encore geler 2 semaines, entre autres…).

Delphine n’a jamais braillé que pendant une demie heure, le temps que l’entretien se termine et que je regagne mes pénates… Parce que la voiture, pour l’allaitement question confort vous repasserez… Je suis rentrée à la maison inondée de ses pleurs et de mes seins pour qui l’heure c’était l’heure aussi…

Je n’ai jamais revu monsieur le sénateur maire, autrement que dans le journal ou à la télévision.

Je suis certaine que les filles et moi-même lui avons manqué…

La vie n’étant qu’un long calvaire…

8 réponses sur “Comment exploiter utilement nos enfants… (4)”

  1. Toujours la même chose et c’est encore d’actualité : pour arriver à ses fins il faut sortir les grands moyens ( même si en l’occurrence le  » grand moyen  » n’était qu’un bout’chou : petit mais costaud en cris … )

  2. vivi : cela fini par être décourageant, car tant qu’on ne devient pas l’emmerdeuse de service, on n’arrive pas à ses fins. Et comme tu le dis, c’est toujours d’actualité…

  3. opale : pas tous les jours non… La preuve. Et il y a eu la fois une l’association de parents d’enfants de naissances multiples ont squatté la mairie avec leurs jumeaux, triplés, et même quadruplés, pour l’obtention d’un appartement pour les parents des quadruplés en l’occurence… Un beau boxon, et l’appartement attribué en fin de journée…

  4. Moua ha ha ha
    Ces 4 épisodes furent un régal !!

    Je suis ravie en outre d’apprendre que grâce aux cris des enfants, on ne croise plus de lions ni de hyènes dans nos rues 🙂

  5. Madame Patate : désolée tu étais passée dans les spams. Je ne comprends pas, normalement tu es acceptée d’office 🙂

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