Les supers vacances en Crête (part 3)

Les_supers_vacances_en_cr_teLa journée passe après l’opération et la première nuit déjà bien entamée quand j’ai retrouvé ma fille  (77200 heures, j’ai tout bien compté).

Un animateur du club est venu apporter des livres à Pulchérie et le bisou de tout le monde le premier matin (envoyé par le chef de club : pouvait pas se déplacer lui-même ?). Je lui donne le numéro de téléphone de mes parents afin que Colette (la maman du petit garçon copain) les prévienne. Je ne sais pas pour combien de temps je suis coincée là avec juste mon sac à main et un peigne + une brosse à cheveux. Il repart m’acheter de quoi me sustenter un peu car je n’ai pas eu de petit déjeuner et pas voulu ôter le pain de la bouche de l’opérée.

Pas de soins particuliers pour Pulchérie, je suis surprise. Elle a un pansement curieux sur la cuisse gauche mais nous n’osons pas le soulever pour regarder de quoi il s’agit. Sauf changement de perf, et je vois bien qu’elle a des antibiotiques (même écrit en grec, avec la traduction anglaise ça se repère à 2 km) j’ai l’impression de ne voir personne (donnez moi un médecin qui m’explique tout) depuis tout ce temps. Et toujours, je me ronge en me demandant « pourquoi un plâtre ? » sur une blessure ouverte comme elle l’avait…

Deuxième nuit. Pulchérie qui n’est plus sous l’effet de l’anesthésie générale n’arrête pas de pleurer « mais pourquoi j’ai fait ça ». Ca ? Parce qu’il fallait que je sache, donc elle a avoué… LES AMES SENSIBLES PASSEZ LES PROCHAINS PARAGRAPHES !

Elles ont pris l’ascenseur pour descendre (Delphine encouragée par sa soeur car n’aimant pas désobéir à maman), et l’ont pris pour remonter me retrouver pile poil au bon moment, vu que je terminais de me démêler, quand Pulchérie s’est aperçue qu’elle avait oublié je ne sais quoi en bas. Et là elle a fait ce qu’elle avait vu ses grand-parents faire dans leur ascenseur quand elle était toute petite : déclencher du pied la sécurité pour le bloquer et repartir en sens inverse. Sauf qu’il n’y avait pas de sécurité. Son pied s’est coincé entre le sol de la cabine et la parois défilante jusqu’à l’arrivée alors qu’elle commençait à hurler.

Et là, un imbécile en bas, entendant hurler à appelé l’ascenseur pour « savoir ce qu’il se passait » (dixit le crétin doublé d’une andouille (un belge, désolée pour mes lecteurs belges fidèles, il y a des crétins dans tous les pays)) qui avouera son forfait plus tard  en toute innocence car je devais avoir l’air vachement aimable en l’écoutant, au risque donc que je le trucide avec un pied de parasol (non mais vous entendez hurler dans un ascenseur, vous l’appelez ou vous montez à pied voir ce qu’il se passe en bloquant tout ?)).

Les deux soeurs n’avaient pas pensé à ouvrir la porte pour arrêter le trafic, pendant que Pulchérie essayait de se dégager en espérant que je n’en saurais rien, ce qui fait qu’elle a fait la redescente (l’ascenseur appelé du bas), ensanglantant toutes les portes au passage en s’arrachant le dessus du pied… JE VOUS AVAIS PREVENUS !

Nuit d’enfer, je n’en peux plus, j’ai l’impression d’être là depuis des siècles. J’essaye de me coucher à côté de Pulchérie qui rouspète, alors que les grands-mères présentes ont leur super fauteuil de jardin dans lesquels elles ronflent en plus, pour me narguer… Et le lendemain matin, arrivée vers 11 heures d’un fort bel homme (et moi qui suis dans un état… Je me suis lavée comme j’ai pu dans les toilettes, mais bon, j’ai la mine que l’on imagine après deux nuits quasi blanches, et les cheveux comme pas possible (j’ai oublié ma barette salvatrice)…)

  • « Bonjour madame ! » (aucun accent)

  • « Bonjour ! Dieu soit loué : vous parlez français ! » (j’en pleure)

  • « Oui madame, j’ai fait toutes mes études en France, quel beau pays… Calmez-vous, tout va bien » (ah bon ?) (toujours aucun accent)

J’ai préparé mon laïus (mensonge 100 % digne de Mrs Bibelot) pour sortir de là et rentrer en France : je suis secrétaire médicale à l’hôpital truc, du chirurgien machin, je reprends le travail dans trois jours (non finalement deux), ma fille serait très bien dans mon service, etc… Inutile. Mais je me voyais coincée là pour des jours. Mrs Bibelot prévoyait de me rejoindre, c’était la révolution en France et au Club… Et ma petite Delphine, la laisser rentrer en France toute seule même avec Europe Assistance ? Que d’angoisses depuis l’accident, si proche pourtant, alors que j’ai l’impression d’avoir passé des jours dans cet hôpital… Je me prépare à plaider le rapatriement sanitaire… Difficile dans certains pays où l’on est très susceptible … (on sait faire aussi…)

Le médecin m’explique. Pulchérie avait le tendon du pouce sectionné net et le pouce donc, mal barré qui pendouillait (me semblait bien aussi…). Elle a eu de la chance d’ailleurs de ne pas le perdre, cela aurait compliqué l’opération (brr ! et qui serait allé à la recherche du pouce ?). Elle avait une grande partie de la chair du dessus du pied arrachée (ça j’avais vu : ça pendouillait également) d’où nécessité de faire une greffe de peau (et explication du pansement qu’elle a sur la cuisse gauche sur laquelle on a fait le prélèvement), l’ongle du pouce partiellement et celui du deuxième orteil également (arrachés). Elle a été opérée par le spécialiste mondial (le premier à faire) des membres sectionnés ou arrachés (je ne savais pas qu’il oeuvrait à Héraklion) qui arrive d’ailleurs…

Avec toute son équipe, comme tout professeur qui se respecte et me salue vaguement, comme si je n’étais pas la maman morte d’inquiétude (c’est l’autre qui traduit). Il découpe le plâtre et le retire, Pulchérie tétanisée et pour une fois muette. Je jette un oeil et je ne vois qu’une bouillie immonde qui a l’air de satisfaire tout le monde, car tout le monde regarde. L’autre médecin me précise (traduisant les commentaires aux internes) qu’il est satisfait du résultat, que Pulchérie peut sortir aujourd’hui, mais qu’auparavant il va lui faire mettre une résine, plus confortable et plus légère qu’un plâtre… Parce que le tendon a été remis en place avec un « cup buttom » (un genre de bouton pression) et qu’elle ne doit pas bouger le pied pendant au moins 6 semaines, moment où le tendon sera de nouveau rattaché à l’os (d’où l’immobilisation obligatoire et l’explication du plâtre et le fait qu’elle ait perdu de la souplesse dans le pouce (et ceci pour toujours) car il manque un morceau de tendon..). Je précise pour les âmes sensibles : quand le tendon est rattaché le cup buttom tombe de lui-même…. Et parce qu’il ne va pas laisser repartir une patiente en France avec un plâtre. La résine c’est mieux, c’est plus moderne et plus confortable et les médecins français ne penseront aucun mal de lui, il tient à sa réputation… (les français tous des cons avec leur plâtre !)

Il me précise qu’il a laissé 2 ou 3 morceaux de matrices d’ongles en place pour que plus tard elle puisse s’en coller des faux sur les morceaux qui repoussent. On va me donner une lettre à remettre au chirurgien orthopédiste qui doit la voir dans 4 jours, 5 maximum (je rentre le 4ème jour…) et décidera lui-même de la fréquence des soins. Exit le rapatriement sanitaire ouf !

(sauf qu’il y aura un raté dans la lettre qui précisera « left foot » au lieu de « right foot »… mais bon le chirurgien qui allait s’occuper d’elle le verrait bien…)

Je préviens le club que je reviens, avec la complicité de Nickie qui normalement ne doit pas me confier le téléphone (j’ai plutôt une mémoire auditive, mais je la revois très bien…). Le gars d’Europe Assistance arrive : c’est lui qui doit affrêter le taxi qui va nous ramener au club, et acheter les antibiotiques prescrits… Nous attendrons 3 heures le poseur de résine avec ce qu’il faut en dessous sur la blessure (un martyre pour Pulchérie, car il y a un moment où il appuyait sur le vif pour la mise en place), et enfin nous sortons.

Je le constaterai une autre fois, les chauffeurs de taxi grecs c’est l’enfer sur terre, même Pulchérie a peur et j’ai beau avoir sommeil à en tomber, je ne risque pas de m’endormir… Il se fait d’ailleurs arrêter par les flics cet imbécile doublé d’un chauffard, et c’est la mine de ma fille et sans doute la mienne qui font qu’ils le relâchent après moultes palabres. Arrivée au club : personne pour nous accueillir. Je saurais après que Delphine s’était mise à nous attendre dès mon coup de fil. 4 H 30 se sont écoulées (1 H 30 de bagnole tout de même). Pulchérie et moi nous écroulons dans nos lits respectifs après toilette et Delphine arrive. Petite mère… J’ai l’impression de l’avoir abandonnée depuis la nuit des temps, alors qu’il ne s’est passé que deux nuits et une journée complète, même si finalement nous rentrons en fin de la deuxième journée (il devait être aux environs de 17 H 30, puisque nous avons pu dormir un peu avant le dîner, j’ai un peu perdu la notion du temps ce jour là)… Elle est à la fois heureuse de nous voir (câlins) et triste. Mais tout le monde avait tellement pitié de la voir attendre en fixant la route, toute silencieuse, grave et concentrée, qu’on avait réussi à la décider à aller faire un petit tour sur la plage ramasser des coquillages et du coup, elle a loupé notre arrivée… Elle s’en veut…

3 jours encore au club. Pulchérie vedette. Elle doit toujours avoir la jambe surélevée donc on lui trouve les meilleurs fauteuils + un coussin et idem pour moi. Toujours quelqu’un pour la porter (on voit bien que je fatigue). Un repas spécial crétois est prévu en son honneur le lendemain de notre retour + une fête spéciale le soir. Une vedette de la chanson de l’époque qui séjournait avec nous (eh oui, déjà qu’avec Albert j’avais eu Stallone au Maroc…), pose avec elle pour une photo souvenir en s’étant proposée… Une fois reposée par une bonne et longue nuit (avec Delphine blottie contre moi, sa soeur occupant l’autre lit avec tous les oreillers prêtés par l’hôtel pour qu’elle ait bien le pied surélevé), et rassurée pour ma fille, je profite de la piscine, de l’amitié qui s’est formée encore plus autour de moi, des 3 derniers jours (malgré la bouffe toujours aussi nulle), avec Delphine mal remise de l’accident constamment sur mes genoux ou avec moi me racontant « votre absence maman, j’avais tellement peur… »

Delphine jouait et mangeait avec Nicolas (sous la surveillance aigüe des parents…), elle faisait pause toilette et beauté avec une jeune fille en séjour avec son copain, qui l’avait prise en amitié et lui avait d’ailleurs fait les ongles et une jolie coiffure, et elle dormait avec Malika, qui était seule dans une chambre à deux lits (et était journaliste à France Presse, je sais cela n’a rien à voir) (et désespérée d’avoir pris 3 semaines dans ce club de merde, nous allions tous l’abandonner pour une semaine de trop). Tout le monde s’était occupé d’elle, d’ailleurs Europe assistance était venu vérifier et enquêter sur le sort de Delphine.

Et Colette de me confier son premier coup de fil à mes parents (suivi de beaucoups d’autres). Elle était tombée sur Jean Poirotte et lui avait expliqué le problème. Puis tout à coup « je ne vous ai pas dit de quelle fille il s’agissait » « Oh répondit Jean Poirotte, c’est Pulchérie évidemment, ça coule de source« .

« Et nous qui pensions que tu avais un peu exagéré l’autre soir… » « Ma pauvre, bon courage pour la suite« .

Voilà, vous savez tout. Reste le retour de Crête qui fut épique aussi…

Car la vie n’est qu’un long calvaire…

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