Ma chienne… suite et presque fin, car il y aura d’autres souvenirs…

Le départ d’Albert ne secoua pas du tout la chienne. J’étais là c’était le principal. Oh, elle était contente de le voir de temps à autre, quand il venait prendre et ramener ses filles, mais jamais elle n’a fait mine de vouloir le suivre et aller avec lui.

Départ de la maison maintenant pour direction chez mes parents où je devais passer 3 mois, et où je suis restée 4 ans, suite à de mauvais coups du sort. Chloé se plaisait bien chez mes parents, où elle avait une copine (leur chienne, l’ex nounou. J’avais perdu mon premier chat et en avais adopté un qui l’ignorait superbement ce qui la laissait perplexe : « elle ne veut pas faire joujou ? »). La vie de famille lui convenait parfaitement et que je sois libre ou pas, elle allait se promener tous les jours pour cavaler à fond la caisse (elle a un jour battu un lévrier, le maître était scié et moi aussi !!!)

Elle me faisait de sales coups. Malinois ou pas, tout ce qui était gibier à poil l’intéressait (le faisan levé par sa copine l’indifférait par contre superbement). La première fois qu’elle s’est retrouvée confrontée à un sanglier, il était mort, dans la cour de mon grand père. Elle a sauté dessus, hargneuse pour essayer de le bouffer, et mon grand père m’a suggéré de la faire dresser pour faire « chien de sang » (ce que les malinois réussissent très bien effectivement puisqu’ils adorent le pistage, d’ailleurs ils adorent tout ce qui est distrayant et rigolo pour eux, d’où le fait qu’ils soient de plus en plus utilisés au détriment du berger allemand).

Sans doutes aucun sur ses possibilités, elle partait au cul de biches, cerfs, chevreuils, lièvres, lapins ou harde de sangliers. Et là, rien à faire alors qu’elle m’écoutait pour tout le reste : elle traçait derrière, que je me ruine les cordes vocales ou pas.

Combien de fois l’ai-je attendue, au bord de l’énervement, de la haine, de l’inquiétude ? Combien de fois mes parents également, quand je travaillais ? Toujours attendre le chien où l’on s’est garé, c’est là qu’il va revenir.

Bonjour l’attente en plein hiver, à se geler les fesses sur une barrière de chemin, en panne de clopes. Pour voir revenir en trottinant au bout de 6 heures, la coupable qui ralentissait le pas à ma (notre) vue, avant de se mettre à se rouler sur le dos pour faire sa soumission. Du sang plein la gueule : vérification immédiate. Elle n’est pas blessée, elle a juste choppé le lièvre et l’a bouffé tranquille dans un buisson, la garce !

Nonobstant le lièvre, la morfale réclame sa soupe en rentrant. Peut se brosser. Première punition pour s’être sauvée aussi longtemps : pas de soupe. Pas nécessaire d’ailleurs. Je me rappelle d’un beau jour où elle avait disparu vers 15 H, était revenue à la voiture à 19 H 30. J’étais d’humeur joyeuse. Elle a commencé à péter vers 22 H et c’était abominable et bien la preuve qu’elle avait bouffé la bête dans son intégralité. D’ailleurs il lui a fallu 2 jours pour la digérer, comme dans la nature. 2 jours pendant lesquels elle réclama sa soupe sans grande conviction. Mon grand père venu déjeuner le dimanche, devant les dégâts olfactifs récurrents, nous pronostiqua un lièvre (il avait une expérience personnelle très longue…)… Elle resta à l’eau claire jusqu’à cessation de pets empoisonnés et fit une cure de haricots verts le lendemain.

Il y eut aussi le jour extraordinaire où elle avait disparu et où il neigeait comme pas possible. Elle rentra dans la nuit jusqu’à la maison (à 23 H nous avions renoncé), sauta le grillage, trouva porte close, et se coucha comme un chien de traineau dans la neige, en boule, les pattes protégées, le museau sous la queue, entièrement protégée par sa bourre (son sous poil) qui faisait le bonheur des petits oiseaux quand nous la brossions au printemps. Avons nous rigolé devant la mésange partant avec une touffe de poils qui lui bloquait la vision ! Elle était saine et sauve mais avait trop marché dans la neige et nous fit savoir avec moultes plaintes, qu’elle avait mal aux pa-pattes. Et moi de lui mettre de la biafine pendant qu’elle se coulait contre mon cou pour le câlin maman…

Et puis un beau jour, l’achat de mon appartement. J’y suis partie avec la chienne mais 1 heure de courses et elle hurlait à la mort les voisins m’en informèrent immédiatement. J’étais sur une piste de travail qui se concrétisa. Impossible de laisser cette chienne ayant toujours vécu en pavillon, toute la journée toute seule, même avec le chat.

Jean-Poirotte et Mrs Bibelot la prirent donc. Elle venait de passer 4 ans chez eux, elle y était comme chez elle, et chez eux elle serait bien utile comme chien de garde, plus que chez moi.

Je la voyais bien entendu très souvent. Je restais sa maman et elle ne me quittait pas d’une semelle pendant mes visites, ni ses soeurs non plus (on rassemble le troupeau !). Elle me regardait partir avec tristesse, sans chercher à me suivre. Elle savait. Mais elle était chez elle chez mes parents et je n’ai jamais pensé qu’elle puisse y être vraiment malheureuse. Il est certains que les filles et moi lui manquions… C’était pour elle pourtant, ce choix du pavillon où elle était chez elle… Là elle déclara d’autres priorité : ma mère en premier lieu, mon père en second, ne pouvant se faire écouter si sa femme était présente. Je n’avais qu’à me pointer pour que le « au pied » soit à mes pieds à moi…

Elle resta toute sa vie néanmoins, le chien obéissant que tout le monde peut apprécier, mais ne laissant pas rentrer n’importe qui (les proches OK, mais pas le reste, un chien de garde qui laisse rentrer une personne qu’il a vue une fois n’est pas un chien de garde).

Elle avait 16 ans quand j’ai été obligée de prendre la décision ultime. La trahir en lui épargnant le pire qui était déjà trop là. Je ne l’avais pas vraiment vue vieillir ma chienne, je ne voulais pas voir.

Je la savais pleine de rhumatismes mais avec le coeur solide, et les dépenses vétérinaires s’élevaient peu à peu pour antalgiques et autres…

Et puis un soir où j’allais voir mes parents, je l’ai vue sortir, boitillant, marchant avec vraiment trop de peine, remuant la queue du plaisir de me voir, souffrant de marcher.

Elle est venue se blottir contre moi en tremblant un peu. Pourquoi n’étais-je pas venue depuis 3 semaines ? J’avais la réponse : par lâcheté devant l’évidence. J’ai pleuré. C’était la fin. Vu sa démarche ce n’était plus la peine d’espérer quoi que ce soit. Elle souffrait ma fi-fille. Depuis des mois je lui achetais des antalgiques prescrits par le vétérinaire. Là, elle pouvait à peine marcher. C’était bien parce que c’était moi qu’elle était sortie, car elle entendait encore fort bien, sinon elle bougeait le moins possible et refusait les promenades : très mauvais signe.

J’ai appelé le vétérinaire tout de suite. Pas question de l’y emmener, elle avait trop peur dans le cabinet. Il accepta de se déplacer le lendemain matin pour qu’elle parte en douceur et surtout sans terreur. En pleurant, nous l’avons gavée de saucisson, de chocolat, de fromage, de tout plein de bonnes choses. Elle était dans son panier, semblant regretter de ne plus pouvoir aller courir avec moi, derrière un chevreuil, dans les bois, mais ravie de cette provende inespérée.

Comme l’a si bien écrit Jean Ferrat « vole vole mon loup sauvage, comme au temps des vertes années » (chanson : Oural- Ouralou)

Il vole encore mon loup sauvage, mon compagnon d’infortune, et sous ses pattes infatigables, ma jeunesse demeure quand tout à coup à cause de son absence, je pleure… Chloé, je ne t’ai pas aimée. Je t’aime toujours…

Paroles de la chanson :
C’est dans l’aube chère à Verlaine
Que tu courais notre domaine
Humant l’air des 4 saisons
Odeurs de thym et de bruyère
Sous tes pattes fraîches légères
S’élevait comme une oraison
Berger des landes familière
Tu vivais digne et solitaire
Animal doué de raison
J’écris ce jour anniversaire
Où tu repose sous la terre
A deux pas de notre maison
Oural, Oural, Ouralou…
On voit souvent des souveraines
A la place des rois qui règnent
Rien qu’en posant nos yeux dessus
Il faut se méfier du paraître
De nous deux qui était le maitre ?
Nous ne l’avons jamais bien su
Tu vécu la vie parisienne
La nuit sur les quais de la seine
Les music-hall et les tournées
Et cette vie qui fut la mienne
Il me semble que tu l’entraîne, à la semelle de tes souliers
Oural…
Jour après jour il faut l’admettre
Voir ce qu’on aime disparaître
C’est ce qui fait vieillir trop tôt
Au paradis des chiens peut-être
Ton long museau à la fenêtre
Tu nous accueilleras bientôt
Au triple galop caracole !
Je vois tes pattes qui s’envolent
Chevauchant l’herbe et les nuées
Le vent siffle dans ton pelage
Vole vole mon loup sauvage !
Comme au temps des vertes années.
Oural…

Vole vole mon loup sauvage, vole dans ma pensée ma petite Chloé…

4 réponses sur “Ma chienne… suite et presque fin, car il y aura d’autres souvenirs…”

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