Robert Benoist

Oui c’est lui… Ici (cliquez juste avant sur « oui c’est lui ») et

Il fait partie de l’histoire familiale, mais du côté de mon grand père maternel (le mari de Mrs Morgan), alors que Tante Alphonsine était de la famille de cette dernière. Les deux familles avaient bien sympathisé (et on se demande pourquoi j’ai des problèmes…).

Il est né avec des conneries plein la tête… C’était une tête brûlée, un farceur de première, un gamin brouillon et téméraire, un aventurier dans l’âme.

Il est très particulier d’avoir une personne « célèbre » dans sa famille. Parce que Robert était célèbre de son temps. Pas du nôtre, tout le monde l’a oublié… Pourtant il a sa place dans le Quid pour avoir gagné les 24 heures du mans, et il est le premier réel champion du monde automobile français.

Ne reste de lui que son cénotaphe au cimetière du village, son nom sur le monument aux morts et plein de photos que Mrs Bibelot protège avec attention. Mais ses cousines parlaient de lui. Mon arrière grand mère, et tante Hortense. C’était leur cousin germain et elles se souvenaient surtout de ses blagues de gamin qui les avaient fait mourir de rire (genre, enfoncer la pipe du visiteur dans le TDC du chien et comment que tous les gamins rigolaient en douce de voir le dit visiteur tirer sur sa pipe après…).

Mon grand père s’en souvenait aussi très bien qui l’a connu longtemps, et Mrs Morgan avec qui il était marié à l’époque. Ils m’en ont parlé, ayant vécu de grands moments historiques, genre la future belle soeur de Mrs Morgan qui avait un amant à la Gestapo (et non on ne l’a jamais tondue elle, et tant mieux parce que c’était une pratique ignoble) et invitant celui qu’il traquait à dîner… (on met ça dans un film on se fait tuer). Tout s’est bien passé finalement, la photographie ce n’était pas celà à l’époque… mais pas mal de personnes assistant à ce dîner l’ont très mal digéré… (on bouffait mal à l’époque, c’était dommage de ne pas digérer un bon repas)

J’étais trop fière sur ce coup là quand que j’étais petite, d’avoir une personne célèbre, même disparue, dans mon entourage. Je l’enviais. Sauf que sa fin n’est pas à envier du tout et que son courage n’appartient qu’à lui ainsi que sa vie. La célébrité peut parfois rejaillir sur qui ne l’a pas méritée en somme. Mais aujourd’hui, je veux parler de lui et que l’on sache qu’il a existé. Et vraiment existé, autrement que comme héros. Comme un homme tout simplement, à qui je ne dois rien… que son souvenir transmis par des êtres qui l’aimaient…

Quand il a débuté dans l’aviation, son plus grand plaisir était d’aller faire du rase motte au dessus du jardin de sa grand mère à Achères, qui sortait en brandissant sa canne « Robert, descend, je te l’ordonne, que je te mette une claque« … Il faisait peur aux poules… Et s’amusait de voir sa grand mère brandir sa canne !!!! Ses cousines en rigolaient encore à 95 et 93 ans… Ca c’est un souvenir de famille !

Quand il a décidé de faire coureur automobile, chez Delage et Bugatti de préférence, tout le monde a été contre. Allait-il dilapider l’héritage familial en bêtises (mais où est donc passée la cassette ????). Il y a une course qu’il a gagnée malgré un tête à queue, en marche arrière… C’est normalement historique et je cherche l’article (illustré, de l’époque !) que m’a confié Mrs Bibelot et que j’ai tellement protégé que je ne sais plus où je l’ai mis… (mais je vais le retrouver, je pense qu’il est dans un certain tiroir auquel je n’avais point songé avant de commencer ce post… Ben non, je l’ai bien planqué, je serai obligée d’y revenir du coup…)

C’était le héros de mes grands pères, le Senna de l’époque (et encore, avec Senna, je date). Tous les gamins le connaissaient… Robert Benoist c’était LE coureur automobile de l’époque.

Vint l’autre guerre mondiale et évidemment il fallait qu’il fasse quelque chose même s’il avait pris un peu de bouteille (pas vraiment, d’après Mrs Morgan il était d’une séduction pas possible, et sur ce coup là on peut la croire, elle avait l’oeil…). Il était impossible qu’il reste immobile à ne rien faire. Pris pour la première fois par les allemands comme résistant reconnu, ces derniers ne trouvèrent rien de mieux que de le mettre au volant de sa propre voiture, dans un convoi. On en ricanerait presque. Evidemment il leur a faussé compagnie à la première occasion. On ricanerait s’il n’y avait pas la suite…

Mais vint sa mère mourante qu’il voulait absolument aller voir, ce qu’il fit au nez et à la barbe des allemands qui pourtant surveillaient les alentours, et puis tout à coup qui (qui l’a reconnu jour de dies irae) l’on sait dans la famille, pour dire aux allemands où le trouver, alors que l’on a accusé son frère injustement. La fille du frère (la nièce donc), est toujours de ce monde pour nous raconter, à nous, la dernière génération, ce qu’il s’est vraiment passé (c’est difficile parce que la pauvre a toujours sa tête à 90 ans mais est sourde comme un pot). La version officielle est qu’il se fit prendre en allant voir sa mère (ce qui la met toujours hors d’elle (la fille du frère) car elle l’a revu juste après). La version familiale est toute autre… Il se fit prendre dénoncé par… Direction nuits et brouillards après le passage obligé dans une rue de Paris de triste mémoire.

Mort pendu à des crocs de boucher car les nazis avaient beaucoup d’imagination, le 9 septembre 1944, à Buchenwald alors que la France respirait vraiment un air de liberté…

Paix à son âme et à ses cendres qui sont restées là bas. Au cimetière du village, au moins c’est bien lui qui est gravé sur le « in mémoriam ». « Robert Benoist, assassiné par les nazis en 1944 » (je vous fais grâce du reste) C’est lui, comme sur les photos de famille, comme dans les articles que tout le monde a gardé (Pulchérie veut récupérer un max, mais tout ce qui est papier, c’est pour moi !).

Paix sur terre… Et in mémoriam pour tous les anonymes qui ont vécu la même chose… Comme quoi la célébrité ne protège pas de tout. Tellement de talents, d’écritures en devenir, de chansons à succès, de vies tout simplement ordinaires, brisés net par les deux grandes guerres…

Hommage ici à Louis Pergaud, Anne Franck, l’auteur du « Grand Maulne », et tant d’autres, engloutis par l’absurdidé humaine. Et hommage à Robert. Plus personne ne l’ayant connu réellement n’est encore en vie (sauf sa nièce et Mrs Bibelot, mais elle, était trop petite pour s’en souvenir vraiment, elle n’a que le souvenir de ses parents, surtout de son père, mais bon, elle l’a connu)

Et hommage aussi aux inconnus qui ne passeront jamais à la postérité et qui avait tout simplement leur vie à vivre et forcément un talent…

C’est aussi pour lui que le 8 mai on ne rigole pas trop dans la famille et que l’on assiste à la cérémonie… C’est peut-être férié comme le 11 novembre, mais ce n’est pas pour rien… C’est aussi pour cela que je m’en vas vous gaver avec la deuxième guerre mondiale pendant un bout de temps.

La vie n’a été pour eux qu’un long calvaire à la fin. Et une fin c’est important… Pendu à des crocs de bouchers, ça me tétanise toujours, j’en frémis à l’écrire. Comment peut-on infliger de telles tortures à son prochain ? Comment peut-on rester humain ainsi… ?

Pourquoi n’ai-je pas la Foi ? Pour tout cela… Si dieu existait, il ne supporterait pas

PS : vous remarquerez que je cite une anectode qui n’est pas mentionnée dans les articles en référence (qui ne sont pas d’accords sur la date de la mort, qui pour la famille via des témoins de confiance est bien le 9 septembre 1944). J’ai préféré vous présenter celui que ma famille a connu et ce que l’on savait vraiment…

Paris libéré…

Paris_Lib_r_Paris est enfin libéré, c’est le symbole de la France, c’est comme si la toute la France était libérée…

Je ne vous parlerai pas de la libération de Paris, contrairement à ce que vous attendez de moi, si vous attendez quelque chose…

J’ai été toujours émue, à en pleurer comme une madeleine, devant les image de la liesse populaire, de la joie dans borne, par tous les films concernant la libération de Paris (et du reste), retrouvant ainsi Jean-Poirotte et sa faculté à pleurer devant la joie populaire… D’ailleurs nous avons parfois pleuré ensemble en nous refilant le pavé de kleenex…

Avant de continuer, je vais laisser la parole à un auteur célèbre : Paul Eluard… Poète et résistant :

« Comprenne qui voudra… Moi mon remords ce fut… La malheureuse qui resta… Sur le pavé… La victime raisonnable… A la robe déchirée… Au regard d’enfant perdue… Découronnée, défiguée… Celle qui ressemble aux morts… Qui sont morts pour être aimés »… « En ce temps là, pour ne pas châtier les coupables, on maltraitait les filles. On allait même jusqu’à les tondre… »

Il parlait tout simplement de ces malheureuses, prises au pièges des amateurs de justice… en ces temps de libération.

Entre Vichy et les nouvelles autorités, on vit des justiciers d’occasion qui d’ailleurs ne s’étaient pas vraiment distingués au cours des années passées en résistant, donner libre cours à des instincts qui n’était pas très purs… Il y avait dans la violence qui se disait inspirée du plus noble des patriotismes, la même composante sexuelle inavouée bien sûr, mais évidente, que chez les moines de l’Inquisition, tortionnaires pour le bon motif, quand ils soumettaient à « la question » une sorcière nue… Ces hommes et femmes là (qui avaient peut-être de la jalousie un peu forte au fond d’elles-mêmes, et donc de la frustration) n’avaient pas bougé un seul petit doigt pendant l’occupation, il était grand temps qu’ils s’y mettent, largement, la bataille de Paris (ou d’ailleurs) étant terminée…

J’ai toujours trouvé la photo que je vous livre, à gerber : le mec de gauche qui tient la femme par la main, sévère et juste (!) (pour moi c’est le faux cul de première, on est en plein dans « au bon beurre » de Jean Dutourd), celui de droite avec son beau costume, très content de lui, c’est le mac qui a vendu sa préférée aux allemands mais qui l’a oublié, réputation oblige. Et tout le monde riant à qui n’en peut plus, une liesse populaire qui là me fait peur et ne représente pas la vraie joie, mais la méchanceté à l’état pur. Ce n’est pas la joie de savoir l’allemand parti enfin, c’est la joie d’humilier à n’en plus finir… En plus ils se portent tous bien : ce ne sont pas les tickets d’alimentation qui leur ont donné une aussi bonne mine. Mes deux grand-mères ont terminé la guerre avec la ligne plus que « haricot »…

Car il y a aussi cette pauvre malheureuse dans le milieu, tondue, la croix gammée dessinée sur elle, résignée déjà à un sort fatal. Celle qui n’a rien à dire car derrière il y a la foule qui ne l’écoutera pas, qui ne l’écoutera jamais, qui sait tout, qui porte en elle la justice… Il y a celle qui s’interroge peut-être sur le sort de son enfant (l’enfant de la honte), qui ne comprend pas tout à coup pourquoi tant de haine contre elle…

C’est tout à coup le retour de Mademoiselle de Sombreuil buvant un verre de sang pour épargner la vie de son père, devant des révolutionnaires qui ne devaient pas être beaucoup plus moches. C’est la princesse de Lamballe sacrifiée… C’est la foule… Que je hais, que j’évite…

Souvent ces femmes avait « fauté ». Encore faut-il s’entendre sur le terme « fauter » quand on tombe amoureuse d’un ennemi certe, mais surtout d’un homme…  Elles avaient eu des bontés pour l’occupant. Pourquoi « des bontés ? ».  Elles les avaient parfois aimés vraiment ces occupants… Quelle détresse a dû être la leur parfois, et que de questions à se poser le soir dans la chambre… (« j’aime un allemand… »)  Il n’empêche que le glaive de la vertu outragée s’est retrouvé un beau jour dans les mains douteuses d’une justice du trottoir, laquelle prétendait se faire l’interprète de l’indignation populaire. Un peu facile aussi de liquider ainsi la voisine qui n’a rien fait du tout (et encore faut-il s’entendre sur le terme « avoir fait ou non quelque chose » car certains n’avaient eux, justement rien fait du tout avant la libération reconnue), mais à qui on doit un peu d’argent… C’est un peu comme pendant la révolution et la terreur : c’est à qui parlera le premier et criera le plus fort qui aura raison…

La justice se doit d’être sereine. Elle doit à tous le même traitement. Tondues, déshabillées, attachées à un poteau pour qu’on leur jette les pires immondices à grand renfort de cris de joies, la croix gammée dessinée sur le corps, parfois à coup de lames de rasoirs, ces malheureuses étaient-elles plus coupables que les grandes bourgeoises de la collaboration ? Mais ces dernières évoluaient dans de trop hautes sphères, étaient trop protégées pour que les justiciers crasseux (dans l’âme) du bitume songent à s’occuper d’elles aussi activement que de leur voisine de pallier à qui ils avaient parfois d’autres choses à reprocher. On en a jugées certaines, mais avec tribunal réel et tout et tout… (des actrices particulièrement, qui ont eu droit à un traitement de faveur) (là encore je ne juge pas). Ce que je juge c’est cette photo, et toutes celles qui ont pu être prises ailleurs (il y en a une où la femme est attachée à un poteau, le visage voilé, et à qui l’on jette n’importe quoi, j’ai préféré vous l’épargner). Ce n’est à l’honneur de personne.

Oui Paris libéré, la France libéré, c’est aussi cela… Cette justice populaire qui n’en est forcément pas une, qui n’en est obligatoirement pas une. D’ailleurs il manque sur la photo, ceux qui désapprouvaient fortement, parce qu’ils étaient forcément ailleurs…

J’aime bien le peuple, mais pas la foule… Hors la foule du trottoir un soir de libération, c’est forcément à se dire que la vie n’est qu’un long calvaire…

Et ils se portent tous tellement bien, ils ont tellement l’air en pleine forme ces justiciers du trottoirs, que l’on a peine à croire qu’ils ont souffert des privations de l’occupation… Là non plus je n’ai sans doute pas le droit de juger… Les autres ont peut-être préféré rester à l’écart de ce moment et de cette photo… Ne pas risquer leur vie pour intervenir, ou avoir autre chose de plus important à faire…

Les individus ne sont rien à côté des peuples… Pourtant ce sont eux qui forment les nations (Serge Dalens)

Ils l'ont fait…

Ils_l_ont_fait_10035778L’enfer est venu du ciel, l’enfer est venu des hommes.

Le 6 août 1945 à 8 H 15 (vous noterez que j’ai posté à l’heure exacte, sauf foirage de l’hébergeur), la première bombe atomique « utile » de l’histoire était larguée sur Hiroshima. Trois jour après, le mercredi 9, un autre champignon monstrueux s’élevait sur Nagazaki. Tout le monde connaît ces noms sans comprendre forcément ce qu’ils représentent. Moi même j’étais tellement jeune que je ne comprenais pas vraiment ce que ces deux noms de villes représentaient…

« Les enfants, annonça le Président Truman (le président « de la paix ») à ses marins de « l’Augusta », nous leur avons collé sur le citron (!) un pavé de plus de 200 000 tonnes de TNT ! »

On l’applaudit. Aucun regret, aucun remord, et c’est une légende qui raconte que le pilote qui a largué la première bombe est mort fou de ce qu’il avait fait. C’est archi faux. Il est mort très fier d’avoir accompli sa mission. Un militaire ça obéit sans discuter et sans réfléchir, sinon ça ne serait pas un militaire. On ne déplore donc pas un mort de plus…

La guerre, cette horrible guerre qui avait déjà fait tant de morts, est enfin totalement terminée en en faisant quelques uns de plus, même si pour l’Europe elle l’était (terminée) depuis le 8 mai (à suivre donc, car nous sommes là en 1945 et qu’il y a encore 1944 à vivre après Oradour sur Glane). L’Amérique a gagné. L’ère atomique qui s’ouvre c’est le Japon à genoux enfin, l’Amérique à la tête d’un pouvoir maléfique qu’elle tentera de garder pour elle… Car l’ère s’ouvre tout juste, il va y avoir plein de rebondissements sur l’histoire de la bombe, qui a le droit de l’avoir ou non, et qui peut de l’uranium enrichir ou non (c’est le polar du 20ème siècle qui continue au 21ème, c’est dire)… La France l’a eue, en grand froid du coup avec son cousin américain, Lafayette ou pas…

A l’aube de cette ère atomique, les savants, Oppenheimer en tête avaient dansé pour saluer leur découverte, Einstein étant resté plus discret. En France la presse célébrait le soleil noir d’Hiroshima « une découverte sensationnelle… La plus formidable machine de mort que le génie humain ait inventée… Cette arme décisive, irrésistible, entre les mains d’un grand peuple pacifique, d’une démocratiie éprise de liberté, assurera la paix sur le monde » (France Soir) (j’ai dû louper un chapitre, je n’ai pas remarqué vivre dans un monde en paix depuis 50 ans)

Le reste n’était-il que littérature ? Surtout pas… Barbarie sans images, les seules publiées sont très soft… Un enfant porteur d’une nouvelle gangrène, des ruines absolues… On nous a toujours caché le pire… Car le pire c’est le « plus rien », l’humain fondu dans le bitume lui-même fondu dans l’arbre d’à côté, jusqu’au point A où il n’y a plus rien du tout…

Ils ont osé. Ils l’ont fait. Ils avaient fustigé les nazis pour leur inhumanité, mais déjà bombardé Dresdes (ce qui n’est pas à leur honneur, car c’est une véritable horreur). Il paraît qu’ils n’avaient pas le choix, sinon la guerre aurait fait plein de morts américains encore… Car dans une guerre il y a le bon mort et le mauvais mort. On a beau avoir passé l’arme à gauche contraint et forcé, on fait partie des « bons » ou des « méchants ». Pas grave, Saint Pierre fait le tri sur une arrivée massive soudaine et Dieu reconnaît les siens (là il est obligé de se coller au boulot aussi, du coup ça le met de mauvaise humeur…)

Ils ont osé, ils l’ont fait. On l’a un peu oublié. Depuis, sur le plan de la destruction on est passé bien au delà des 200 000 tonnes de TNT (c’était vraiment des rigolos). On en a rajouté. Après la bombe A, la bombe H beaucoup plus destructrice (elle même allumée d’ailleurs par une bombe A), ce qui était forcément utile et diaboliquement obligatoire à posséder. Et puis Samuel Cohen a inventé « avec un crayon et du papier », la bombe N, la bombe qualifiée d’inhumaine, ce qui laisserait à penser qu’il existe des bombes humaines surtout dans cette catégorie là où n’importe qu’elle autre d’ailleurs. Comment une arme peut elle être HUMAINE ?… Mais comme on évolue, on fait aussi dans les mines anti-personnel que personne n’a jamais qualifié d’humaines ou inhumaines… (mon dieu quelle distraction !)

Ils l’ont fait, ils en ont été fiers… Tout le monde l’a voulue, tout ceux qui ne l’ont pas la veulent. La bombe… Celle qui dessine dans le paysage ce champignon monstrueusement magnifique. On mesurera très longtemps après, son impact réel sur les générations à venir de survivants, sur l’environnement, mais on ira toujours de l’avant… L’Homme est ainsi : il avance, il progresse… Pour ce qui est de la bombe H par exemple, le principe de cette chose exquise est qu’avec un verre d’eau, on fournirait à la ville de Paris, de l’énergie pour une année, et proprement… Nous avons donc progressé, forcément…

Je laisse la parole à Albert Camus qui a découvert « la chose » en son temps…  « il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques. En attendant, il y a quelque indécence à célébrer une découverte qui se met au service de la plus formidable rage de destruction« …

Le pauvre cher homme est mort, paix à son âme, parce que du coup il ne sait pas jusqu’à quel point le suicide collectif est d’actualité avec les problèmes de climat.

« L’homme est un loup pour l’homme« … Ce n’est pas très sympa pour les loups… Moi j’aime bien les loups… Ils ne fabriquent pas de bombes propres ou sales, humaines ou inhumaines, ils pêtent peut-être mais sur le plan gaz à effet de serre, ça reste moyen comme cause de réchauffement (vu ce que l’on pête et eux que l’on a tenté d’exterminer, il n’y a pas photo)…

Qui pensera à ceux qui ont connu l’enfer en ce 6 août ? Qui pensera à ceux qui ont fondu ? Qui pensera à ceux qui sont morts à petit feu des radiations ? On en parle peu… On a oublié, c’est tellement pratique d’oublier… Surtout quand on est en vacances… Et puis ce n’est pas un chiffre rond… Alors on parle d’autre chose…

C’est ballot d’avoir fait ça en août…. Franchement les alliés c’était n’importe quoi… Au mois d’aût, je rêve !

La vie n’est vraiment qu’un long calvaire…

Le jour le plus long…

Ils_ont_d_barqu__73441768Nous connaissons tous l’histoire, nous avons tous vu « le jour le plus long » au moins 3 fois. Nous savons que ce n’était pas le jour idéal et que sinon il fallait reporter d’un mois.

Les conditions météo étaient mauvaises (c’était un mois de juin pourri), mais à 0 H 15 commence l’opération « Overlord ».

23 000 parachutistes lâchés sur la Normandie. A 3 H 14 c’est le bombardement aérien et à 5 H 30 la préparation de l’artillerie navale. A 6 H 30 les premières vagues d’infanterie d’assaut et de chars débarquent sur les plages d’invasion de la côte normande… Heure inhumaine et bien militaire : comment voulez-vous être à 100 % de vos performances éventuelles à 6 H 30 ? (c’est mon point de vue et je le partage)

130 000 hommes. Sur 17 km il y a un bateau tous les 70 mètres. Avec le jour naissant cette prodigieuse Armada se découvre. Des milliers de péniches de débarquement avancent, appuyées par 8 cuirassés, 22 croiseurs, 93 destroyers, 450 escorteurs et dragueurs, et 360 vedettes lance-torpilles. Quand les américains le veulent, c’est comme quand ils ne le veulent pas… (comme Albert)

Il y a des ratés, des endroits où la plage n’est pas la bonne. C’est la boucherie du siècle sur certaines, qui fut enfin révélée avec « il faut sauver le soldat Ryan », autrement moins propre comme film que « le jour le plus long » qui reste lui, regardable (si, malgré le parachutiste qui tombe direct dans un puit, les morts font propres et John Wayne est impatient et joyeux d’aller au combat)…

Le soir de ce jour le plus long, 5 divisions américaines, 3 divisions britanniques, 2 divisions canadiennes ont débarqué entre l’Orne et la Vire. Il y a même des « bon dieu de merde d’Australiens » (rien contre les australiens mais il paraît qu’à l’époque leurs soldats étaient très grossiers, et se prénommaient ainsi, étant en grande minorité). Rommel est rappelé d’urgence. Il l’avait assez dit : « les 24 premières heures seront décisives ». Il avait raison, mais trop tard. Les allemands, Hitler, ne croyaient pas en la Normandie…

Après tant de combats, de fureurs, de douleurs, voici enfin venue la bataille de France, la bataille de la France, la vraie (pas celle de 40). Elle le sera. Les troupes avançant péniblement vers l’est s’en rendront compte en entrant enfin en Allemagne : la résistance française les a beaucoup aidées sur son territoire. En Allemagne la percée est moins nette, plus difficile…

Ce sont aussi les petites histoires qui me sont chères. Le papa de Mrs Bibelot, hurlant à sa femme étendant le linge dans le fond du jardin, au risque de se faire arrêter parce qu’il écoutait radio Londres « Ils ont débarqué ! ». Là il a commencé à apprendre à Mrs Bibelot à dire aux américains qu’elle rencontrerait « chocolate please »… Elle ne savait pas ce que c’était. C’est ce qu’elle a dit quand Rambouillet a été libéré, et elle a eu sa première barre de chocolat de sa vie…

Ce sont mes arrières grands parents se retrouvant avec tous les voisins dans la rue principale du petit village pour chanter la marseillaise et parfois danser…

Jean Poirotte se souvient aussi du « Ils ont débarqué« . Tout le monde se sentait sauvé tout à coup. Là bas en Allemagne, son père ne savait rien. Sa mère a pleuré un coup (je tiens d’elle, une vraie fontaine), mais tout le monde était content (voir paragraphe précédent). Quand il a vu ses premiers américains également, il a reçu tout un tas de trucs à boulotter et n’a pas compris ce qu’était un chewing gum sur le coup (j’imagine bien la surprise des mômes)… Pendant ce temps là, son grand père en « Marcel » découvrait le « T shirt » qui protège les épaules du coup de soleil cuisant, avec envie…

Mais je laisse la parole à Tom, brancardier américain, qui avait connu une jolie infirmière française et s’est implanté en France, dans le petit village de mon enfance que je fréquente toujours, sans jamais perdre son accent terrible. Tom était brancardier pendant le débarquement et après… Un soir de cuite, il a parlé…

« La mer moussait rose… L’écume était rose de sang, il y avait du je ne sais quoi et je ne voulais pas savoir, qui flottait sur la marée montante puis descendante. Partout, des hommes parfois coupés en deux, atrocement mutilés, ou amputés d’un membre et perdant leur sang, criant, hurlant, et appelant leur mère… Nous n’avions déjà plus de morphine. Nous avions tous fait sous nous, après avoir vomi de trouille dans nos casques dans la péniche. Il y avait de la tripaille partout, de la cervelle sur la plage, des bras et jambes arrachés ça et là. Aucun mort propre sauf certains, semblant dormir, les pires… Combien avons nous laissé d’encore vivants sur cette maudite plage ? Ils avaient l’air morts mais ne l’étaient pas forcément… J’ai sû après qu’on en avait enterré d’encore vivants sans le savoir (véridique)… Trop pour ma conscience… Nous étions trop peu nombreux pour tous ces blessés. Brancardier ce n’était pas la planque, j’ai pété la gueule de tous ceux qui ont prétendu le contraire, jamais de quelqu’un d’autre »…

Non, brancardier Mr Tom on le sait que ce n’était pas une sinécure. Hommage à toi.

Et hommage à tous ceux qui sont morts ce jour là. Juste pour débarquer. La suite allait être longue. Songez qu’il y a des hommes qui ont débarqué le 6 juin 1944 et sont allés jusqu’au 8 mai 1945. Sont-ils rentrés complètement intacts chez eux ces vainqueurs ?

Petite histoire d'un petit blog (part 1)

femme__crivain_tlp676151Mon blog est né finalement, il y a longtemps. J’ai toujours adoré écrire et j’ai commencé mon dictionnaire d’une civilisation tordue, à la main sur des fiches cartonnées. J’écrivais tout le temps et sur tout, et lasse un jour de me coltiner une crampe dans la main droite (dite « la crampe de l’écrivain »), ayant un peu d’argent devant moi, j’ai fait l’achat de Mr Mac Intosh, ami fidèle. Oui, un ordi, comme lui, uniquement pour écrire (d’un autre côté que faire d’autre à part ses comptes et des stats (berk), vu qu’Internet n’existait pas, donc la connexion possible non plus)

Quoique surfant énormément sur Internet, je ne connaissais le concept « blog » qu’après cette triste histoire de deux jeunes filles s’étant suicidées et qui avaient annoncé leur décision d’en finir sur leur « blog », précision des journalistes : « un journal intime tenu sur Internet » (ne pas compter sur eux pour se tenir réellement informés, et ils continuent à déclarer : blog = journal intime).

Un vendredi de juin dernier, Pulchérie me téléphona au boulot, alors que j’étais dans l’angoisse de ses résultats, pour me dire « ça y’est j’ai mon diplôme ». Fière de moi (c’est moi qui l’ai faite et élevée tout de même), et d’elle surtout, me voici sur internet, cherchant son site dont l’adresse était à la maison, afin de montrer les capacités créatrices de ma filles à 3 collègues avide et normalement préparées (normalement les gens fuient quand je parle de mes pastèques, sauf les vrais fidèles qui m’en demandent des nouvelles sans appréhension).

Avec LE mot clef, me voici sur un forum et une « méchante » répondant sur une histoire de film. Tiens, le style me semble familier. Que vois-je éberluée : l’adresse d’un blog. Comment ça, ma fille tient un journal sur Internet ? J’y cours, pas pour être indiscrète, juste pour voir… Et je tombe sur le blog de la méchante. Pas de doute, c’est elle, c’est ma fille et je trouve son blog super. J’en visite d’autres via ses liens, tous supers également. Il n’y a aucun « journal d’Anne Franck » sur ce que je visite. C’est alerte, sympa, c’est un monde que je découvre le soir à la maison, stupéfaite.

Donc un blog, je le découvre, cela peut être autre chose qu’un journal intime. Ca peut être de la cuisine, du design, des photos, du journal intime aussi mais que d’humour partout ! J’en aiurais des choses à y mettre, et si j’en faisais un ? Je fais. Sur Canalblog comme la méchante. Je sue sang et eau pour faire un semblant de mise en page. Au passage je signale à Pulchérie que j’ai trouvé son blog. Sur le coup, elle n’a pas trop apprécié, m’a dit qu’elle préfèrait que je n’y aille pas, que c’était sa sphère perso hors famille et amis… Je dis OK et je commence à laisser des commentaires chez d’autres…

Et voici ma Pulchérie qui me repère avec sa vision d’aigle, à mon pseudo… Elle me signale deux ou trois blogs (mes premiers) à consulter absolument. Parallèlement la voici en chasse du blog de tite maman qui a avoué en avoir ouvert un. Pas folle, elle s’est bien doutée que je n’avais pas dû chercher des serveurs à droite et à gauche et que j’avais pris chez canalblog ce en quoi elle avait parfaitement raison. Elle connaîssait mon style d’écriture et adorait mon dictionnaire d’une civilisation tordue et autres articles que sa soeur et elles lisaient sur Mr Mac.

Et donc elle tombe fatalement sur moi après quelques recherches, et vient me narguer au boulot (j’ai trouvé la gentille sorcière nananèreu), et m’encourager (dieu la bénisse). « Il est bien ton blog, j’en connais plein et tu peux avoir des lecteurs, je peux t’aider pour ta mise en page, tu as plein d’articles à y mettre, etc etc… ». Et donc fille aînée a reçu mon code d’accès, fait ma mise en page en accord avec le titre du blog, m’a expliqué le fonctionnement de la blogosphère (j’ai fait une gaffe au départ, j’en étais malade) et m’a fait de la pub chez elle.

Elle a bien évidemment un droit de regard sur les articles en avance (mais plus trop le temps maintenant) qu’elle découvre avant tout le monde, rectifie ma mise en page parfois vu que je suis une quiche (en voie d’amélioration). Du coup j’ai le droit d’aller chez elle, et elle m’a fait découvrir tout un tas de blogs sympathiques et amené des lecteurs que j’adore, qui bravent les spams pour venir me lire. Il y a en plus tous ceux qui m’ont découvert seuls et j’en suis ravie (je précise au passage qu’il est inutile de chercher de vrais sorts ici et que c’est fou le nombre de personnes qui veulent un sort pour se débarasser de leur belle mère…).

Bref mère et fille sont maintenant aussi soeurs via blogs. On en parle, on commente l’une chez l’autre, on fait des connaissances, c’est notre complicité… C’est super non ? Et là où je suis fière comme un pou, c’est quand Pulchérie récolte des lecteurs par mon biais, alors que d’ordinaire, c’est plutôt l’inverse. On est bête à tous âges…

Quel effet ça vous fait à vous, la mère et la fille ? Parce que tout le monde sait bien qu’il y a la mère et la fille… Ou alors vous êtes vraiment distraits…

Le 11 novembre

11_novembreCette année le 11 novembre tombe un samedi, c’est scandaleux, et que fait la terre à tourner n’importe comment autour du soleil pour que cela tombe un samedi ? (Si ça change tous les ans c’est à cause de la rotation de la terre, et c’est aussi à cause de ça que votre anniversaire ne tombe pas le même jour de la semaine tous les ans…)

Un jour férié qui tombe un samedi, c’est l’horreur, sauf pour ceux qui travaillent le samedi. L’année prochaine cela sera un dimanche et tout le monde sera d’accord (sauf les gens du spectacle) : la terre fait n’importe quoi en tournant.

Un jour férié c’est un jour férié, c’est sacré, on ne travaille pas et c’est vachement mieux de ne pas travailler un jour où l’on travaille d’ordinaire (enfin c’est mon point de vue). Je n’ai pas d’états d’âmes particuliers lors des jours fériés (je reviendrais sur certains d’ailleurs), sauf pour 2 : le 11 novembre et le 8 mai.

Parce que ces jours là, si vous restez chez vous à vous la couler douce et à faire la grasse mat
mes lecteurs adorés (et moi avec),
c’est
parce que des millions de gens sont morts
et que l’on a décidé de se souvenir d’eux
.

Vous avez compris ? Je ne vais pas être une sorcière rigolote sur ce coup là.

Le 11 novembre est la date anniversaire de l’armistice de 1918 qui nous préparait la guerre mondiale qui allait suivre, comme si une ne suffisait pas (Hittller s’est assez servi de l’humiliation de l’Allemagne en 18 pour réclamer des guerriers, je sais, j’ai fait une faute volontaire pour décourager gogole). Vous vous en foutez, vous êtes nés après, mais n’oubliez jamais que vous vivez sur ces morts… Nous ne sommes que l’avenir de ceux qui sont morts en pensant nous le donner meilleur… (espoir insensé, vu la nature humaine)

Le 11 novembre quand que j’étais petite, j’aimais bien : il n’y avait pas école. Jusqu’à ce jour fatal où j’ai assisté à une scène que je n’oublierais JAMAIS. Après je n’ai plus jamais pu le voir uniquement comme un jour férié où l’on fait la grasse mat. Le mal, la souffrance, rôdaient…

Ben oui, j’avais mon arrière grand mère et sa soeur : tante Hortense (que mon arrière grand mère appelait « la gamine » d’ailleurs, j’y reviendrai un jour). Qui avaient connu en plein cette guerre. Je me disais qu’elles étaient déjà vieilles à l’époque vu qu’elles avaient déjà 28/30 ans environ lorsque cela a commencé… (leur vie quasiment sur la fin, 30 ans c’était vieux pour moi qui en avait 14, ça fait sourire après coup)

Ce jour là, pour le repas dominical (l’horreur, le 11 novembre tombait un dimanche !), elles avaient ressorti de vieilles photographies (oui on disait avec « graphie ») et les avaient commentées, sans que mon grand père ne moufte (pourvu qu’elles ne parlent pas du Général…). Les photos étaient celles du mariage de mon arrière grand mère, des parents de mon grand père donc… Il restait pensif et mélancolique.  Nous savions qui étaient ces jeunes gens souriant et bravant l’avenir avec certitude. La photo avait été prise en 1910. Mon grand père regardait peu : il savait.. Il se souvenait de ce qu’avait été cette guerre pour le petit garçon qu’il était…  Je l’ai compris après.

« Tous morts » disaient-elles avec tristesse. Oui tous les hommes présents sur cette photo (et les autres), montrant une jeunesse heureuse et optimiste, étaient morts pendant cette guerre, sauf le marié qui avait eu la chance de revenir, gueule cassée et gazé, il en est mort (des gaz) quand les allemands ont envahi la France à la suivante. Les allemands en France il ne pouvait vraiment pas supporter, il a cessé de lutter contre ses poumons en vrac, alors qu’il s’était battu jusqu’au bout de l’horreur en disant « plus jamais » (il avait eu du bol, il avait été blessé et gazé juste à la fin, en 1918…). Oui cet homme que je n’ai jamais connu avait tenu le coup jusqu’au bout en se disant qu’il épargnait l’horreur aux générations futures… Ils y croyaient vraiment, tous.

Le repas s’est achevé tout de même sur le dessert, les hommes sont partis à la chasse, maman avec mes emmerdeurs de frère et soeurs, et je suis restée seule à écrire mon journal, tâche importante lorsque l’on a 14 ans…

Et tout à coup… Elles s’étaient fait un thé, et elles se souvenaient. Tout haut, ne pensant pas que dans mon escalier (où j’adorais écrire), je pouvais les entendre et d’ailleurs je ne faisais pas plus de bruit qu’une souris (et encore).

Oui ce 11 novembre c’était « le souvenir » (et non la célébration) de la fin de cette horreur, sauf que les morts ne se relèveraient jamais même si le jeu était terminé. Tante Hortense avait perdu son fiancé (qu’elle n’a jamais remplacé), tous les cousins, petits cousins, amis étaient morts, certains dès le début, d’autres sur la fin (un chanceux le 11 novembre 1918 précisément 4 heures après la signature de l’armistice). Tous les hommes présents ce jour heureux étaient morts. Ami, cousin, ils avaient tous déserté la terre entre 14 et 18… Pour elles le 11 novembre c’était la journée où elles revivaient quatre années qui avaient plombé leurs vies.

Le marié était encore à l’hôpital le 11 novembre 1918 et ne redeviendrait jamais comme avant après tout ce qu’il avait vécu et vu ce qu’il était devenu. Pour tout le village : aucun mâle à revenir à l’exception de 7 éclopés à jamais, tous les autres étant morts. Le 11 novembre c’était pour elles le symbole d’une guerre, des veuves, des fiancées  inconsolables et sans maris potentiels, des orphelins, un monde foudroyé, une génération fauchée.

Et elles pleuraient en se souvenant d’une femme du village (veuve, qui pensait sans doute que son mari allait revenir maintenant que c’était terminé) qui était sortie, débraillée le 12 novembre en chantant que tout était terminé et qu’elle était heureuse. « La pauvre, se rendait-elle compte ? » « ces cris de joie, comment pouvait-on être heureux ? Tu te souviens ? et ces horribles feux d’artifices avec tous ces disparus ? Tu te souviens du cousin Mac, le premier mort de la guerre ? » « et tu te souviens de la pauvre Madeleine qui s’est pendue en apprenant que Georges était mort deux jours après la fin ? » (un beau jeune homme sur la photo).

J’avais du mal à les entendre pleurer, une boule dans la gorge : elles ne représentaient plus uniquement des vieilles dames. Je découvrais leur jeunesse, leur chagrin. Elles étaient tout à coup la sagesse et la paix de l’esprit à jamais endeuillé, et je découvrais leur souffrance et que l’âge ne protège de rien. J’imaginais tous les hommes de ma vie ayant disparu, et j’ai refermé mon journal sans faire de bruit pour écouter et m’esbigner en douce après coup. Elles ont parlé longtemps et le temps s’était suspendu, personne n’est venu troubler leurs souvenirs.

Ce jour là, le 11 novembre, nous le leur laissions chaque année, et nous l’avons fait jusqu’au bout. Tout le monde s’éclipsait quand elles parlaient « thé ». Accord tacite de leurs proches : le 11 novembre n’était pas un jour de joie et il était à elles qui avaient vu la première guerre mondiale décimer leur génération. C’était pour elles la fin d’une époque. La fin d’une horreur. La fin tout simplement. L’horreur restait à jamais présente en elles.

Pour elles rien n’était terminé que leur jeunesse, à tout jamais avec ses fêtes et tous ceux qui n’étaient désormais plus là pour se souvenir. Pour toujours il y avait l’attente, la lettre espérée datée de 15 jours avant, l’angoisse du maire arrivant avec son chapeau et ses adjoints, précédant de peu l’avis mortuaire, qui allait chez la mère alors que l’on n’était que promise ou amoureuse… Il y avait pour elles à tout jamais les larmes et les sanglots d’une femme seule désormais et se devant d’être digne malgré la mort de son mari ou de tous ses fils. Il y avait les lettres contenant toute l’horreur de la guerre que les hommes leur taisaient (le croyant)  (« je te remercie de m’envoyer une ou deux paires de chaussettes, il fait subitement un peu froid, ne t’inquiète pas pour moi, je suis à l’abri dans une tranchée ») (Je n’aime pas lire ces lettres, elles sont trop atroce quand on sait).

Mon arrière grand mère se souvenait toujours de son coeur « explosant » quand elle avait vu arriver la délégation ne lui annonçant QUE la disparition. Elle se souvenait de son soulagement quand elle avait su qu’il était vivant, des semaines après (des semaines de quoi ?, comment pouvait-elle vivre son quotidien ?). Elle se souvenait de sa souffrance et de son choc en le voyant gueule cassée opérée par des chirurgiens défiant l’impossible (et encore il avait été relativement épargné si j’en juge par ce que j’ai pu voir comme photos des opérations pratiquées sur des atrocement mutilés, leurs chirurgiens préparant sans le savoir la chirurgie esthétique de nos jours) (et Pulchérie se demande pourquoi j’ai jeté l’oeil de verre : par respect peut-être, personne n’avait le droit de le regarder en rigolant, et pouquoi ne l’a-t-on pas enterré avec ?).

Mon arrière grand mère lui a toujours tout pardonné après. Pouvait-elle faire autrement ? La guerre lui avait pris tellement d’êtres aimés, les enfants qu’elle aurait pu avoir et qui ne naîtraient jamais plus (les chocs répétés l’avaient ménaupausée précocement, ça existe). Comment pouvait-elle se réjouir UN 11 NOVEMBRE ? Et encore elle n’estimait pas avoir le droit de se plaindre : son homme était revenu : en vrac mais là tout de même.

Cette photo du mariage je l’ai chez moi. Je sais que tous les hommes présents ce jour là ne sont jamais revenus de l’enfer : sauf le marié. Et c’est atroce. Ils sont si nombreux, beaux et jeunes, plein d’espoir, regardant l’avenir avec défi surtout, comme tous les jeunes, et pourquoi sont-ils morts en fin de compte ? Qui se souvient de Plinistinius Gaeus mort contre les gaulois en 60 avant JC ? Pourquoi a-t-il donné sa vie en fin de compte ? (ne cherchez pas, c’est une image…)

C’était curieux pour moi de voir ces vieilles dames pleurer sur ce jour très précis qui me semblait un jour de délivrance, et cela m’a fait voir le jour férié d’une autre manière. Oui c’était une délivrance, la fin enfin, mais qui n’effacerait jamais les deuils. Le 11  novembre c’est un hommage

Ca tombe un samedi…  C’est très important ! C’est grave !

Quel jour sont-ils morts ? On dit « tombé au champ d’honneur« . Ca fait plus classe, mais cela veut dire la même chose… Ils sont morts tout simplement et nous on en profite… On ne travaille pas parce qu’ils ont vécu dans la boue, la faim et le froid ou une chaleur infecte, la crasse, parce qu’ils avaient peur, des poux et des morpions, la dysenterie, pensaient à leurs proches, attendaient une permission, voyaient leurs amis se faire tuer les uns après les autres, étaient aspergés de sang et d’autres choses immondes quand l’obus tombait sur le copain, parce que quelque part un obus ou un balle les attendaient… C’est ça le 11 novembre. C’est ce souvenir de ces poilus qui pensaient nous donner du meilleur pour l’avenir. Je n’oublie pas les allemands au passage qui ont donné aussi… mais pour qui ce n’est pas férié (comme quoi l’homme est con…)

Je suis tellement imprégnée du sujet qu’une année, le maître d’école de Pulchérie a cherché des volontaires pour déposer une gerbe devant le monument aux morts le 11 novembre (il est fou le maître, demain je fais la grasse matinée !). Je n’ai rien dit du tout, je n’étais pas en classe. Dieu sait pourquoi ma fille  a dit « présente ! ». Et je revois ma puce, réellement volontaire, sous une cape anti pluie avec capuche car c’était un beau 11 novembre triste, portant sa gerbe ronde avec dignité et fierté, bien droite, et la déposant en hommage à ses ancêtres, avec classe, au pied du monument aux morts, un 11 novembre pluvieux, en ayant sacrifié sa grasse matinée.

Vous ne pensez pas qu’il aurait peut-être été préférable qu’il n’y ait pas de guerre et donc pas de jour férié en célébration de sa fin ? C’est ce qu’ils doivent penser de là-haut tous ces sacrifiés, d’autant qu’on ne peut pas dire que cela ait rendu le monde meilleur…

Depuis longtemps le 11 novembre je pense à mes deux vieilles dames qui me manquent. Aujourd’hui encore je regarderai certainement un jour gris de toutes manières. Je me dirai que je n’ai jamais attendu MON homme, mon père, mon frère, je me dirai que je n’ai pas vécu cette attente… Et je remercierai le ciel de n’avoir pas connu cette horreur.

Je rends hommage à ceux qui m’ont précédée. Je n’arrête pas de me dire que je n’aurais pas eu leur courage… C’est très bête, mais c’est comme ça (je suis très facilement terrassée par l’angoisse). J’ai vu deux vieilles dames dignes pleurant sur l’absurdité et je n’oublierais jamais. Je pense que j’aurais été paralysée, en attente de nouvelles, incapable de vivre normalement… Nous n’avons qu’une vie et ce gâchis est à gerber, comme tant d’autres. Et nous nous sommes là à gémir que « ça tombe un samedi ! ».

La vie n’est qu’un long calvaire surtout quand il y a la guerre…

N’oubiez jamais ce que ces hommes ont vécu. A l’ouest rien de nouveau, à l’est non plus… Parce que cela continue ailleurs…

Et je serais contente (!) si en me lisant vous leur avez consacré une petite minute (bon OK, 5…)… (je ne sais plus quel auteur a écrit « la guerre serait un jeu merveilleux si les morts se relevaient quand elle est terminée »).

Et pour ceux qui le souhaitent, hommes ou femmes, à lire : « Les semailles et les moissons » de Troyat. Pour ceux qui n’ont pas peur « a l’Ouest rien de nouveau » (Remarke, ce livre me flanque trop le bourdon pour que je recherche l’orthographe exacte, c’est la même absurdité côté allemand). Pour les films vous avez « un long dimanche de fiançailles » et « les sentiers de la gloire ». On a mit du temps à parler des mutinés de cette guerre et des mutilés volontaires…

Bon 11 novembre à tous et à vos ancêtres hommes et femmes à qui penser aujourd’hui.

La photo est d’époque. C’est elle mon arrière grand mère, toute heureuse le jour de son mariage, avec tous ces innocents ne sachant pas que leur mort était programmée et que leurs femmes termineraient leur vie en noir…. (J’ai l’autorisation de Mrs Bibelot)

Halloween droit devant !

Halloween_droit_devant_57210813Je vous le fais dans la même foulée que les fêtes, j’ai failli l’oublier, je m’en serais ouvert les veines…

Droit devant voici Halloween et le cortège de récriminations ou idioties qui vont avec (m’en fous je suis en congés du 27 au soir au 2 au matin et pouêt !!!! et comment que je vais aller extorquer des bonbons aux voisins pour les échanger contre du pâté et me manger du potiron avec mon balais !).

(Je signale au lecteur débarquant ici ou n’ayant pas tout suivi que le « pouêt » est généralement réservé à Pulchérie, mais que vu qu’elle me l’a piqué, je le lui pique à mon tour, on referme la parenthèse, faites un tour chez Hélène ou Jo, vous comprendrez (Pulchérie merci de faire les liens tu sais que ta vieille mère est nulle et ça t’amuse en plus)).

Je ne voudrais dire du mal de personne et Jean Poirotte a été dûment consulté : j’ai le droit de le citer ici. D’ailleurs je ne dis pas de mal, je parle d’une vérité. Il déteste Halloween qui est pour lui une coutume américaine et les américains il les emmerde (comme beaucoup d’européens d’ailleurs), c’est simple. Donc tous les ans il nous fait son discours sur Halloween, il en est rasoir, mais il assume, persiste et signe sur ce blog.

Enfin quand je dis qu’il déteste : ça l’énerve profondément de devoir creuser un potiron (c’est hyper dur, c’est depuis que j’ai essayé que je lui ai refilé la tronçonneuse), se manger la soupe au potiron qu’il déteste, voir le potiron trôner devant sa porte avec une bougie dedans, et Mrs Bibelot lui faire une boîte après la soupe au potiron car elle a oublié de lui acheter à dîner vu qu’elle achetait des bonbons pour les enfants (le temps approche où elle va planter ses potirons elle-même dans le fond du jardin et l’envoyer les arroser, on n’ose y croire)

Donc « nouvelle coutume » ? c’est-y stupide et publicitaire ? (publicitaire certainement ne rêvons pas, stupide, pas plus que tellement de croyances…), trop neuf ? Du rebouillus ?

Même pas besoin de consulter gogole, j’ai pu me renseigner chez les anciens avant qu’ils ne me faussent compagnie.

Mon grand père maternel ne détestait pas Halloween, à l’exception du battage publicitaire qui allait avec. Il se souvenait que quand il était enfant, on creusait des légumes variés (du potiron au navet, voire même des choux et de grosses carottes), pour mettre des bougies dedans, et que l’on posait ces décorations partout devant les maisons. A l’époque c »était la lumière d’avant Noël. Les gens chez qui on venait sonner, donnaient ce qu’ils avaient fait pour ce jour là, parfois un bol de soupe, sinon des gâteaux ou des caramels maison. Le grand père d’Albert disait la même chose. Les enfants se déguisaient et avaient le droit ce soir là de tout faire sauf trop les zouaves, à l’époque fallait pas pousser non plus avec le style « je suis une bande jeune à moi tout seul… »

Ces coutumes connues par les anciens, sont parties aux USA avec les émigrants à l’avant siècle dernier (ben voui…). Et sur l’europe est passée la grande guerre. Le 11 novembre ce n’est pas top. Le 1er novembre qui précède tout juste est la fête de tous les saints et non pas celle des morts (qui a lieu le lendemain). Mais en souvenir de ces millions d’hommes happés par cette guerre affreuse, dans l’esprit populaire sage, l’amalgame s’est fait entre la fin d’une guerre et cette période où le temps n’est pas béni et les jours bien courts…

Le chrysanthème a fait les frais de cette période avec la fête : en France c’est la fleur des morts. La seule à mettre sur une tombe en souvenir d’un homme disparu pendant l’hécatombe, car la seule vivace à cette époque. On revois de jolis chrysantèmes depuis quelques années, que l’on a envie de mettre chez soi et de garder jusqu’à l’arrivée des cloches. Personne n’en est à offrir un chrysanthème à une maîtresse de maison comme dans les pays anglo-saxons… (c’est dommage j’adore les jolis à petites fleurs, jaunes de préférence ou rouge (c’est est un message subliminal))

Et un beau jour des marchands ont décidé de nous faire fêter Halloween à nouveau, mais en nous présentant cette fête comme une fête américaine qu’il était honteux qu’on ne fête point. Une vieille fête celtique en fait, venue d’une époque lointaine où l’on pensait que les esprits des morts revenaient pendant une nuit. Pour les calmer et leur faire plaisir on leur mettait des friandises, à manger, sur le pas de la porte. Les enfants décidèrent de se servir et de se déguiser en esprits ou fantômes pour abuser le généreux donateur. La tradition a survécu dans les campagnes malgré le christianisme et nous est revenue telle qu’elle était avant : une vraie fête, mais avec ses pubs et son fric à claquer (avec les fêtes qui se pointent juste après les impôts, c’est duraille).

Maintenant s’il faut aller travailler avec un chapeau de sorcière, un faux nez et un masque le 31 octobre, je dis non (d’ailleurs j’ai posé 2 RTT). S’il faut claquer des fortunes pour un masque en potiron, une fausse araignée et une citrouille électrique, je dis non également : c’est tout de même plus amusant de faire son horrible masque soi-même non ? Comment voulez-vous que nos enfants soient créatifs ? (regardez, Pulchérie et Delphine se dessinaient des toiles d’araignées avec mon crayon khol, elles n’en sont pas mortes !) S’il faut allumer une bougie et recevoir les enfants avec le sourire, je dis oui, pourvu qu’ils ne m’arrachent pas le sac en me traitant de salope qui a oublié le réglisse qu’ils adorent (ou qui en a pris et ils détestent)…

Et bon courage à papa pour le découpage et le mangeage de potiron…

Je préfère ne retenir que le convivial de cette fête, les rencontres, les sourires et les rires, et je suis volontaire pour la soupe au potiron. J’aime à croire également que les esprits de nos proches reviennent nous contempler cette nuit là. Je vous quitte, je préviens mes parents chéris que j’y serai, (avec une boîte de tripes pour Jean Poirotte pour pallier le manque de dîner), une cape de vampire pour Mrs Bibelot et moi, car il faut toujours savoir s’amuser…

La vie ne sera qu’un long calvaire pour ceux qui vont me croiser ce soir là… (j’adore faire le vampire sur une route de campagne la nuit, je sais c’est idiot, mais les voitures ralentissent, ben voui j’ai testé…)