Une autre vocation contrariée : biologiste

prix-nobel-copierAyant renoncé à devenir une artiste célèbre qui n’effectuerait pas la restauration de la Chapelle Sixtine, j’avais été fort impressionnée, juste après la naissance de ma dernière soeur (surnommée la « suite et fin » au bout de 10 ans, puis « l’arlésienne » ici) par une visite organisée par le collège, d’un je ne sais plus quel museum d’histoire naturelle.

J’avais été fascinée en particulier, par les animaux conservés dans des bocaux remplis de formol.

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Scène de ménage : la confiture d'abricot 2012 (1)

scene-de-menage1Un vendeur diabolique a proposé à maman, au marché du mardi 31 juillet, 5 kg d’abricots pour un prix défiant toute concurrence.

« Pas de problèmes » s’est dit Mrs Bibelot, « nous allons faire des confitures ».

J’aurais dû me méfier (une fois de plus) en voyant la bassine à confitures de mon arrière grand-mère sortie la semaine précédente pour être dûment nettoyée.

Il faut dire que cette année, le prunier n’a pas donné ce qu’il fallait, vu qu’il agonise, et que le pêcher n’a donné que 3 fruits (contre 1 l’an passé, et 20 pots de confitures il y a 2 ans…)

D’où frustration, et la mise en tête d’utiliser les pots vides qu’avaient mes parents.

Après inspection des Reine Claude qui ne seront pas assez nombreuses, et des mirabelles que « ah non, on les mange comme ça ! »

Cela leur manquait de se boutiquer pour faire quelque chose qui sort un peu de l’ordinaire (on ne fait pas des confitures tous les jours non plus).

J’ai été forcément mise en cause, quand ce même mardi, ma mère m’a appelée mine de rien pour me demander si par hasard je n’allais pas faire des courses.

Si, et ce n’était pas « par hasard », mon frigo faisant la gueule. Donc si je pouvais lui prendre 3 kg de sucre cristallisé je serais bien mignonne, parce qu’elle avait 2 kg en réserve et que 3 kg c’était suffisant.

J’ai échappé au nettoyage et coupage des abricots, mais quand je suis arrivée le mardi, Jean-Poirotte m’attendait attendait de pied ferme ses kg de sucre, qu’il a versé immédiatement dans la bassine où les abricots agonisaient attendaient.

Restait à savoir combien il manquait de sucre et donc :

  • Mon père a cherché partout les calculs de ma mère (tarage de la balance avec la cuvette destinée aux fruits) et ne les a pas trouvés.
  • Manque de bol ce jour là, elle a émergé de sa sieste avec 1/2 H de retard.
  • Pour retrouver ses calculs avant de boire son thé, son mari piétinant sur place (il y a des moments où ses genoux vont nettement mieux)
  • Ah bah non, c’était ceux des prunes d’il y a deux ans, parce qu’il n’y avait de toute évidence pas 10 kg de fruits.
  • Et que les bons calculs étaient illisibles dans une poubelle de récupération, détrempés par le jus de je ne sais quoi…
  • Et gnagnagna (ma mère note tout un tas de trucs sur ses notes de courses, et les égare systématiquement…)

J’ai pu fuir au moment où ils débattaient de la recette.

  • Mrs Bibelot aime à suivre les recettes à la lettre
  • Jean-Poirotte voudrait que cela soit terminé avant d’être commencé, et améliorer éventuellement les choses,  argumentant donc toujours.

Là, il s’agissait de savoir si laisser les abricots mariner dans le sucre pendant 24 heures, c’était bien nécessaire. Ma mère prétendant que oui, et lui non.

Jusqu’à présent j’étais restée neutre, mais cela ne pouvait pas durer vous l’imaginez bien. Parce que 24 H c’est 24 H et que forcément pour la suite, je serais présente…

La vie n’est qu’un long calvaire…

Vocation contrariée : biologiste

prix-nobel-copierAyant renoncé à devenir une artiste célèbre, j’avais été fort impressionnée, juste après la naissance de ma dernière soeur (surnommée la « suite et fin » au bout de 10 ans) par une visite organisée par le collège d’un je ne sais plus quel museum d’histoire naturelle.

J’avais été fascinée en particulier, par les animaux conservés dans des bocaux remplis de formol.

La prof de sciences nat (on les appelait comme cela, à l’époque), nous avait précisé que l’alcool conservait bien aussi, mais que pour une raison ayant trait à l’alcoolisme qui ne conserve pas le foie, on utilisait de préférence du formol.

Ce qui n’était pas tombée dans l’oreille d’une sourde.

Je me souviens que ma fascination la plus extraordinaire avait été la contemplation d’un bocal énorme, contenant un homard de 15 kg, et que devant la taille de la bête, je m’étais demandé comment on pouvait être assez stupide pour pêcher un truc de cette taille pour le mettre dans le formol au lieu de le bouffer, car j’aimais déjà le homard, découvert lors de nos dernières vacances en Bretagne où mes parents avaient dû renoncer à me faire prendre steak haché/frites au restaurant.

Mais qu’à cela ne tienne, ma nouvelle vocation était là. Si je ne pouvais pas devenir artiste, je serais la biologiste du siècle (toujours modeste). J’étais bien consciente qu’il fallait commencer petit pour percer un jour, et ce fut la chasse aux escargots, limaces et autres. Même un cadavre de mésange décédée de mort naturelle, faisait l’affaire.

Restait à conserver le truc. Le cadavre, la bête morte, l’avenir de ma vocation.

Le formol était introuvable dans l’armoire à pharmacie. Point de pharmacie dans le village à qui demander 10 litres de formol, car je voyais petit pour le départ, mais grand pour la suite. J’ai profité avec perfidie d’une visite au village voisin qui avait lui, une pharmacie, pour m’enquérir du prix du formol.

  • « C’est pour des engelures ? » m’a demandé le pharmacien
  • « Evidemment ! » ai-je répondu alors que Mrs Tricot m’avait demandé juste d’acheter un flacon de shampoing pendant qu’elle allait acheter des soles chez le poissonnier.

Au moins, j’avais une excuse toute trouvée pour acheter du formol par petites doses (avec la monnaie du shampoing qu’on me léguait généreusement, car là, j’avais juste l’équivalent d’un flacon d’alcool à 90°), sans imaginer que des engelures en plein mois de juin c’est suspect.

D’ailleurs je ne savais même pas ce que c’était, et j’avais noté dans mes neurones encore intacts des « anges lures », lures devant être un terme latin ou grec dont je chercherais la signification plus tard.

Le pharmacien m’eusse-t-il revue, sans doute que qu’il m’aurait-il dénoncée, mais il ne m’a point revue, car mon argent de poche était pauvre.

L’alcool conservait, ça je le savais, mais mon arrière grand mère tenait un compte très strict de son alcool à fruits, et c’était précisément le moment où elle faisait ses délicieuses cerises à l’eau de vie. Après, viendraient les prunes, les mirabelles, les confitures…

Les confitures ! Le sucre aussi, conserve. J’étais épatée par ma propre intelligence, QI 290 pour le moins, j’allais conserver mes cadavres, et même, les étiqueter…

Restait tout de même à chourer discrètement des pots de confiture vides, l’aïeule n’y verrait que du feu. C’est ce que je pensais, sans imaginer une seconde qu’une personne ayant connu les deux guerres mondiales et les privations qui allaient avec, sait toujours combien elle a de pots ou de bocaux pour faire des réserves.

J’avais décidé de conserver ma future collection de prix Nobel, dans de l’eau très largement sucrée, puisque le sucre conserve. Puis j’ai dû très rapidement renoncer au « très largement sucrée ». Mon arrière grand mère, avait en effet constaté une baisse très nette dans le sucrier et avait même demandé aux gosses, dont moi, qui qui lui piquait des morceaux de sucre. Avec les adultes elle n’avait pas osé enquêter trop avant, mais je sentais bien que sa curiosité était excitée, car une personne ayant connu les deux guerres mondiales et les privations qui allaient avec, sait toujours combien de sucre elle a d’avance !

Saleté de boches ! pensais-je, un peu désarmée…

Deux sucres par jour, cela pouvait encore aller pour ne pas se faire remarquer, sauf que pour la conservation : un animal = de l’eau + un sucre, et bien c’était insuffisant.

On pouvait savoir qu’il y avait une mésange mais uniquement en voyant les plumes. Les limaces et autres n’avaient plus figure humaine, et je n’osais pas ouvrir les pots pour jeter le tout, parce que l’odeur était franchement dérangeante.

Tellement dérangeante d’ailleurs, que malgré les couvercles des pots, c’est à l’odeur que mon grand père (encore lui), à trouvé ce qui sentait le cadavre dans la grange.

Il a été ra-vi de découvrir ma collection (seul un escargot pour qui j’avais sacrifié tout mon formol, était reconnaissable), mais surtout qu’il ne s’agisse pas d’un vrai cadavre, d’autant que le voisin avait disparu depuis 3 semaines (en fait, il était parti avec un danseur du Bolchoi, le voisin).

Sa mère a poussé des cris d’horreur en découvrant TOUS SES POTS DE CONFITURE DISPARUS, et comble de l’horreur, ON m’a fait jeter ma collection dans le fond du jardin,  avant de me demander de laver moi-même les fameux pots.

Je suis restée stoïque, au bord de l’évanouissement et de gerber tripes et boyaux, en prétendant que « ça ne sentait pas si fort que ça ».

Après j’ai reconsidéré le fait de devenir biologiste. Le coup de grâce ayant été qu’après mes explications sincères, on m’avait précisé qu’il fallait être bon en maths pour faire une carrière scientifique.

Et que moi, les maths, je les aurais bien formolisées, atomisées, pulvérisées, confiturées, pour qu’on n’en parle plus !

La vie n’est qu’un long calvaire.