Objet inanimés…

Plat…Avez-vous donc une âme ?

On peut se poser parfois la question.

Je ne suis pas une personne particulièrement maladroite : tête en l’air oui, mais je casse très peu, voire même très rarement…

On me laissait à une époque laver ou essuyer la vaisselle sans aucun scrupules… J’enviais donc les maladroites réputées, qui échappaient aux corvées…

La seule  fois où j’ai cassé de la vaisselle (puisqu’il va en être question) chez le furoncle, la grand-mère de mes filles, j’ai fait très fort : un plat plein de gras m’a échappé des mains et est tombé dans le lave vaisselle en brisant 3 bols, 2 ramequins et 6 assiettes. Je n’ai trouvé à dire devant ma maladresse totalement inhabituelle « c’est la première et la dernière fois que je casse quelque chose chez vous ».

Sinon, ma non maladresse (sauf pour le furoncle qui a renseigné toute la famille, alors que je la fréquentais depuis 5 ans) est la raison pour laquelle j’ai soupçonné deux objets au moins, d’avoir une âme et de s’en être servie pour me faire un sale coup.

  • Mon voyage au Kenya. Le lendemain de notre arrivée avec Charles Hubert, j’avais fait l’acquisition des objets souvenirs à rapporter (j’adore les trucs africains). J’avais prévu un sac pour les ranger, et jamais regretté de tout avoir acheté le premier jour, vu qu’après, au cours de notre périple, nous n’avons rien vu de mieux.
  • J’avais acheté pour Jean-Poirotte qui fait la collection de cannes, une canne Masaï de toute beauté.
  • Qui ne tenait pas dans le sac, donc je l’ai trimballé pendant tout notre safari d’un lodge à l’autre (première semaine), puis en taxi pour Nairobi, puis en avion (Nairobi/Mombasa), pour la ranger soigneusement dans un placard de l’hôtel où nous passions notre dernière semaine.
  • Je ne l’ai oubliée dans aucun hôtel, ce qui est à souligner, et les précautions de ce que l’on prend en cabine ou non n’étant pas ce qu’elles sont aujourd’hui, elle a fait Mombasa/Paris avec moi (après s’être trimballée dans tout l’aéroport après l’enregistrement des bagages, l’avion ayant 5 heures de retard)
  • Je suis descendue de l’avion en la tenant à la main, mon appareil photo en bandoulière
  • Nous avons récupéré nos bagages
  • Nous avons pris la navette pour la gare Montparnasse
  • Nous sommes descendus de la navette pour aller prendre le train direction Rambouillet, en courant car nous étions justes…
  • La canne s’est très bien comportée dans le train.
  • Maman nous attendait à la gare, car nous étions chargés comme des mules et en plus crevés par notre voyage.
  • Je sors de la gare et là, PAF : la canne m’échappe des mains et se rétame par terre, perdant un morceau de la crosse que je ramasse en pestant.
  • Ce n’est pas possible, ce truc a fait des milliers de km et il faut qu’il m’échappe se casse pile poil à l’arrivée !
  • J’aurais pu faire mieux, elle aurait pu m’échapper des mains au moment où je l’offrais à mon père. Qui dieu merci a pu la réparer sans que quoi que ce soit puisse être visible. C’était juste un noeud dans le bois qui avait sauté.
  • N’empêche…
  • Quand je regarde cette canne, je la trouve louche… D’ailleurs si mon mariage avec Charles Hubert a foiré, c’est parce que j’avais fait preuve d’un manque de discernement certain de sa faute (à mon manque de discernement souligné par la canne diabolique).

Autre objet diabolique, une très très très jolie barbotine venant de la grand-mère de mon arrière-grand-mère. J’adore la jolie barbotine, c’est mon péché mignon.

  • Depuis l’âge de 5 ans, je reluquais ce magnifique plat, sans avoir le droit d’y toucher. C’était tout ce qu’il restait d’un service de l’aïeule, les gens ayant à l’époque la fâcheuse manie de diviser les services de table, couverts, verres, entre les héritiers (moralité maman a parfois un plat, deux assiettes, une louche et 3 verres de très beaux services…)
  • Cette famille étant aisée, on peut dire que ce plat avait échappé à de nombreuses bonnes faisant la vaisselle et la rangeant, à de très nombreuses utilisations, à de multiples générations d’enfants casseurs.
  • Et puis, pour je ne sais plus quel anniversaire, (et je ne veux même plus le savoir), maman m’a fait cadeau du fameux plat.
  • Qui bien évidemment n’irait jamais au lave vaisselle, mais trônerait bien sagement avec quelques belles assiettes, bien en vue sur mon vaisselier de l’époque.
  • Les filles ayant l’interdiction formelle de ne serait-ce que le regarder.
  • Le plat est arrivé à la maison, bien emballé dans du papier journal, dans un sac plastique épais, porté dans mes bras.
  • Je l’ai déballé soigneusement sur le canapé pour éviter tout accident.
  • J’ai déplacé les assiettes  pour lui faire de la place
  • J’ai pris le plat, et je ne sais pas comment, il m’a échappé des mains au moment où je le mettais en place.
  • Il aurait pu tomber juste un peu en dessous, sans dommages, vu la forme du vaisselier, mais non, il a dérapé, fait un dérapage incontrôlable,  sans que je puisse le retenir et…
  • Il s’est fracassé sur le carrelage. Un machin de 150 ans s’est brisé en 1000 morceaux sous mes yeux consternés. Personne n’a rien osé dire, et Albert a ravalé son traditionnel « faites chauffer la colle », parce qu’il aurait mis ses jours en danger.
  • Le plat aurait pu se couper en deux et être réparable, mais non, le salon était jonché de poussières…
  • J’en rêve encore la nuit parfois. Pourquoi tant de haine à mon égard ? Et en plus, aucune photo ne me permet de vous faire voir à quel point ce plat était magnifique… (l’illustration est un authentique Pallissy à qui le plat ressemblait pas mal, sans en être un, parce que sinon, vous pensez bien que je ne serais même plus là pour vous raconter l’horreur de ma déconfiture quand il s’est écrasé sur le sol (d’ailleurs je hais depuis le carrelage en règle générale, et sa solidité sans égale…))

La vie n’est qu’un long calvaire…