La livraison des matelas…

livreur-copierL’arrivée des matelas fut, comme je l’avais bien envisagé, un grand moment de l’art culinaire.

Pas besoin d’être voyante pour ne pas se tromper…

La vendeuse charmante avait précisé qu’elle téléphonerait le vendredi pour donner une heure approximative de livraison.

  • C’était sans compter sans le non réflexe absolu de mes parents de donner leur numéro de portable qu’ils laissent généralement sur la table de la cuisine (le portable). Ils ont donné leur numéro de fixe et rien d’autre.
  • Le jeudi Mrs Bibelot a donc fait les courses pour deux jours, n’envisageant pas le vendredi de s’éloigner de plus de 50 cm de son combiné jusqu’à l’appel fatal…
  • Quand je suis repartie du thé quotidien le vendredi vers 17 H, la vendeuse n’avait pas encore appelé, et ils avaient mangé des coquilles St Jacques surgelées pour RIEN.
  • Mes deux géniteurs angoissés, gardaient les DEUX combinés à portée de mains, toute personne autre que le Roi du Matelas appelant, étant priée de raccrocher le plus vite possible pour dégager la ligne, même en cas d’alerte nucléaire ou d’avis de peste bubonique (ou pulmonaire).

LE SAMEDI :

  • J’arrive à l’heure habituelle et je prépare tout pour le thé
  • Les parents dorment. Soit ils ont été livrés, soit ils ont chacun un téléphone à portée de main, le livreur devant fatalement s’égarer (je vous raconterai un jour, le labyrinthe que représente leur ruelle, inadmissible parce que même les services d’urgence s’égarent)
  • J’ai à peine eu le temps de jeter un oeil sur le journal de Mrs Bibelot que la voici qui se lève, avec de l’avance.
  • Elle a mal dormi sur leur sommier qui est d’un dur pas possible.
  • « Maman, pourquoi as-tu dormi sur le sommier ?????? »
  • « Nous avons défait le lit et ton père a retiré le matelas » (ne leur demandez pas pourquoi ils n’en savent rien eux-même)
  • « Mais enfin maman, vous pouviez laisser le matelas sur le lit ! A quel heure vient le livreur ? »
  • VERS 15 H 00
  • J’ai de qui tenir, à 14 H 45 tout le monde est au garde à vous dans la maison. Il n’y a pas de VERS 15 H 00, c’est 15 H 00 et rien d’autre…
  • Le livreur s’égare et deux personnes hagardes se ruent sur LE combiné pour lui répondre et le guider
  • Voici le messie (on dirait moi, attendant l’homme de l’Art)
  • Messie que je guide pour qu’il monte le matelas de ma soeur à l’étage et redescende bien l’ancien, à reprendre.
  • Ceci au cas où ce livreur malhonnête puisse prétendre avoir descendu le vieux matelas alors que non. La topographie des lieux rend cette arnaque impossible, mais on n’est jamais trop prudent.
  • Le livreur honnête après avoir chargé le vieux matelas, importe l’autre, qui va au rez de chaussée, ce qui le soulage.
  • Le matelas installé, Jean Poirotte s’installe dessus brutalement pour vérifier qu’on ne s’est pas trompé de modèle.
  • Pendant que le livreur embarque le vieux matelas, Mrs Bibelot vérifie également que c’est bien le matelas testé qui a été livré (ou si ce n’est lui c’est donc son frère).
  • Le livreur a été honnête et rapide, il a droit à un bon pourboire…
  • Il dégage rapidement, et Mrs Bibelot et moi-même pouvons nous précipiter dans le salon pour ne pas apprécier le mariage princier du jour (Monaco)

Le dimanche :

  • ALORS CE MATELAS ? (3 des 4 enfants en choeur)
  • Bof, moi je dors n’importe où de toute façon (ma mère)
  • Ca va, mais j’ai toujours mal aux genoux (mon père)

La vie n’est qu’un long calvaire…

Scène de ménage : l'achat du matelas…

matelasVous connaissez mes parents, moi aussi, et un peu mieux que vous (d’abord). C’est un peu comme si je les avais faits pourrait-on dire…

Aussi quand le vendredi 24 juin je suis arrivée chez eux pour le thé de l’après midi, et que j’ai vu ma mère plongée dans une publicité du Roi du matelas, je ne me suis pas inquiétée outre mesure.

J’avais tort…

Mrs Bibelot décortique toujours les publicités qu’elle reçoit dans sa boîte aux lettres. Moi sur la mienne j’ai l’option « NO PUB », que tout le monde ne sait pas lire, mais là n’est pas le problème… Non, j’ai entrevu le problème quand mon père s’est levé de sa petite sieste et qu’il s’est précipité sur la pub, lui aussi.

J’ai compris que l’heure était grave, que la publicité ils en avaient déjà discuté, car l’urgence urgente du jour, subitement, était de changer leur matelas qui commence à se faire vieux.

C’est peu de le dire, ce matelas leur ayant été donné par ma meilleure amie et son mari, il y a environ 15 ans : c’était de la qualité, et je ne veux absolument pas savoir tout ce que ce matelas aurait à nous raconter (ah, si les objets pouvaient parler…).

Et si l’heure était encore plus grave, c’est que quand Jean Poirotte veut, c’est comme quand il ne veut pas. Limite, il fallait que le matelas soit sur le lit le soir même ou dans une heure maxi. Quand il a une idée dans la tête c’est comme quand il s’est choppé une écharde dans la main : il faut l’extraire immédiatement et sans délais (et sans douleur si possible).

Mon père a sorti ses lunettes pour examiner la publicité moins 50 % limite le Roi du Matelas vous paye pour le débarrasser du(des) matelas :

  • Celui-là Bibelot, il a l’air plutôt bien
  • Je ne veux pas de ressorts, je veux du matelas mousse, et je veux aller voir et tester, je ne veux pas passer ma vie sur cette pub !
  • Et celui-là, regarde, ce ne sont pas des ressorts classiques, c’est achement mieux.
  • Je ne veux pas de ressorts, je veux du matelas mousse, et je veux aller voir et tester, je ne veux pas passer ma vie sur cette pub !
  • On pourrait y aller maintenant non ? (quand je vous le disais que ça urgeait)
  • Non, on attend la femme de ménage
  • Frustration non sans examen approfondi de la pub…

Le samedi, j’arrive, pour trouver ma soeur qui n’est pas comme tout le monde, en WE chez les parents, en contemplation devant la publicité du Roi du matelas. L’affaire se corse, car, entendant que ses parents allaient changer de matelas, ma soeur a décrété que le sien n’était plus muni d’amortisseurs et qu’il faut donc changer le sien aussi…

  • Il faut réveiller maman au plus tard à 15 H parce qu’ils vont aller au Roi du matelas (oh la surprise !), s’acheter un matelas (grande nouvelle !) et puis un pour moi aussi
  • Soupir
  • Il est 14H 55, on la réveille maintenant ? Le temps qu’elle se lève…
  • Soupir
  • 15 H pétante : arrivée de Mrs Bibelot.
  • 5 minutes après, arrivée de Jean-Poirotte, qui reprend en main la pub…
  • Alors, celui-là…
  • Ah mais tu m’enquiquiiiiiiiiiiine ! Je te dis que je veux aller voir…
  • Quel caractère….  Celui-là aussi a l’air bien…
  • Je ne veux pas de ressorts, je veux du matelas mousse, et je veux aller voir et tester, je ne veux pas passer ma vie sur cette pub. Tu viens avec nous Coraline ?
  • Ben oui (je ne veux pas manquer cela et éventuellement regarder les oreillers en solde…)
  • Bon on y va ? (ma mère), tu as fini de contempler cette publicité ?
  • Ah mais tu m’enquiquiiiiiiiine, tiens, regarde, les prix sont donnés pour du 90 de large, TOUT EST A REVOIR !
  • Pitié ! (moi, en silence, c’est mieux…)
  • Comme on y va, on VERRA SUR PLACE
  • Ah mais tu m’enquiquiiiiiine, j’ai bien le droit de regarder !
  • Tu regarde depuis hier midi !
  • Et bien j’ai encore besoin de regarder…

5 minutes après, nous sommes prêtes à partir que mon père est encore en contemplation devant la pub. Certains m’auraient demandé de faire des comparaisons sur Internet, de les tenir au courant heure après heure des bonnes promotions, mais non, c’était le Roi du matelas ou la botte de paille…

Arrivée chez le Roi du… où la vendeuse fort sympathique par ailleurs,  pleine d’humour (et ayant un instinct très sûr), comprend qu’elle va passer un mauvais quart d’heure (je confirme).

Evidemment Jean Poirotte se dirige vers le matelas de ses rêves fous nés de l’arrivée de la publicité dans sa boîte aux lettres, la VEILLE.

  • Je ne veux pas de ressorts, je veux du matelas mousse (ma mère)
  • Je ne le sens pas (mon père, s’asseyant sur le matelas qui n’est pas de ses rêves fous, mais 100 % mousse…)
  • Testez-le (la vendeuse)
  • Du coup, ne sachant pas à quelles extrémités ils peuvent en arriver pour tester le matelas, je vais me renseigner pour mes oreillers : loupé, ils ne soldent que les rectangulaires, je déteste.
  • Bah il n’est pas si terrible que ça (les parents enfin synchro)
  • Alors je vous conseille celui-là (la vendeuse qui joue avec sa vie parce qu’il y a des ressorts…)
  • Bibelot ! (mon père), ce sont des micro-ressorts (ça change tout)
  • La vendeuse confirme : cela change tout, et si elle s’y sent bien, à quoi bon tergiverser hein ?

Ils tombent d’accord sur le matelas choisi par Jean-Poirotte, après contemplation de la pub pendant environ 15 heures.

C’est toujours comme ça.

Comme quand ils m’avaient emmenée avec eux pour choisir un ensemble (en solde) canapé 3 places + canapé 2 places + fauteuil : blanc.

  • Ma mère : je ne veux pas de blanc, c’est trop salissant
  • Oui mais c’est scotch guard (le vendeur sadique et de mauvaise foi)
  • Ils sont repartis avec l’ensemble blanc que mon père avait de toutes manières décidé d’acheter.

Ma mère se fait toujours avoir, elle le sait, et c’est ainsi que les prénoms de leurs enfants, les noms des chiens, chats, les canapés, fauteuils, matelas, etc, ont toujours été choisis par Jean Poirotte.

Parce que quand il veut, c’est comme quand il ne veut pas. (Quand il ne veut pas, je ne vous raconte pas la force d’inertie, on dirait Albert…)

S’il avait décidé qu’Attila ne rentrerait pas sur le territoire, l’autre s’en serait retourné vers la Mongolie extérieure ou intérieure… Et si mon père avait été Vercingétorix, Jules César serait reparti franchir le Rubicon, sans avoir conquis les gaules…

Mais mon père est né trop tard dans un monde trop vieux. Sauf pour le choix du matelas…

La vie n’est qu’un long calvaire…

PARCE QUE, le matelas ne sera livré que samedi prochain, et que c’est tout bonnement impossible à imaginer…

Je vous raconterai…