Quand la mort s’invite chez vous… (4)

200405784-001Nous sommes rentrés en silence, et je m’efforçais de ne penser qu’à une chose : conduire correctement.

Je n’ai pas dû prendre la bonne route, le corbillard était arrivé avant nous, et il y avait déjà du monde. J’étais totalement tétanisée, anesthésiée, incapable de pleurer. Je suis restée assise quelques instants dans la voiture, et Mélodie est venue me voir. Elle avait vraiment cru que j’allais tourner de l’oeil au funérarium… De plus, vu la manière dont tout le monde la renvoyait vers moi, l’arlésienne s’occupant de faire des allers et retours à la gare, je semblais être devenue le chef d’orchestre de la cérémonie qui allait se dérouler. Je n’avais pas besoin de cela… Continuer la lecture de « Quand la mort s’invite chez vous… (4) »

Quand la mort s’invite chez vous… (3)

200405784-001Rentrée CHEZ MES PARENTS, je vais prendre ma douche et me laver consciencieusement, pensant avoir vécu le pire très bien finalement. Je n’ai pas relié ce que j’ai vu comme ossements à mes grand-parents… On va nettoyer les bijoux, reste la mise en bière, à 14 H, l’enterrement étant prévu à 15 H.

Je ne sais pas ce qu’il se passe : un regard de Mélodie sur moi, une intuition forcément déclenchée par quelque chose. Une fois propre et bien habillée, je nettoie les bijoux, personne d’autre ne voulant y toucher, parce que cela sort d’une tombe… (chacun sa manière de voir les choses, je ne juge personne). Je remets les alliances, la bague de fiançailles à mes deux tantes qui ne se disputent pas pour savoir qui prendra quoi, et nous laissons en place au nettoyage, le bijou mystérieux, qui comporte du cuivre qui mérite un traitement spécial, mais ce sera pour un autre jour… Continuer la lecture de « Quand la mort s’invite chez vous… (3) »

Famille, pas toujours facile… L'enterrement

EnterrementNous avions décidé d’y aller, et donc, forcément, personne n’aurait pu nous empêcher de le faire sauf un avion de ligne s’écrasant sur notre route, deux heures avant notre départ…

J’avais la conscience clean, mais je me sentais mal à l’aise. Ma tension avait pris 2 points. Et puis, dès l’arrivée à l’église, le fait d’être trop entourée, alors que 7 magrébins me regardaient d’un sale oeil (ce n’est pas de ma faute, mais les 7 personnes installées chez le cousin de papa n’étaient pas alsaciens, suédois, mexicains, russes, ou tibétains) me dérangeait considérablement.

Catherine fut impec : gros bisous à toute la famille du côté paternel de Marc, et à papa, insistant bien :  « j’ai prévu un goûter pour après le cimetière, j’insiste pour que vous veniez ».

Sissi arrive et curieusement m’embrasse (le baiser de Judas ? car elle ignore les autres)  tout en me chuchotant le plus bas possible « vous ne parlez pas de Marc et du reste aujourd’hui, compris ? ». Manque de bol, mon frère l’a entendue, et précise que nous ne sommes pas venus pour ça. Elle rougit.

Un assez bel homme la suit, je pense que c’est son frères, ils ont les mêmes yeux, dommage qu’ils n’en aient que deux tellement ils sont beaux. Mais la dernière fois que j’ai vu le petit frère, il devait avoir 5 ans, et moi 10, donc, nous avons vachement changé.

Tout le monde s’installe dans l’église : le clan Dabra (côté paternel de Marc) à droite, et le clan côté maternel + les braves gens, à gauche (quand on rentre dans l’église). Les péquins étrangers à la famille sont rares : en fait, il n’y a que les voisins d’en face : deux personnes.

Vient la bénédiction (nous échappons à la grande messe chantée) attendue impatiemment par :

  • Ma mère qui n’a même pas fait sa communion
  • Mon père et ses deux soeurs que leur mère a dégoutés de la religion
  • Mon frère qui lui non plus n’a pas fait sa communion et qui en plus, ne supporte pas l’odeur d’encens ni la musique d’église (alors que pour mes tantes, mon père et moi, même sans croyance, nous adorons la musique d’église et les vieilles pierres).
  • Le concubin d’une de mes tantes, qui s’est placé derrière moi (pour parer toute attaque sournoise) et qui ne semble pas être plus croyant que nous.
  • Moi-même, qui à chaque fois que l’on parle du mort en disant qu’il est assis à la droite du seigneur maintenant, n’arrête pas de se dire « on va être un monde fou » (je sais, j’ai mauvais esprit).

Les répons sont faibles… Dans l’église du village de mes parents, c’est tellement fréquent qu’il y a au moins 4 femmes qui se déplacent pour pallier cette carence insupportable, chanter les cantiques et réciter les prières.

Du côté maternel de Marc, ce n’est pas mieux, ils savent tout juste faire le signe de croix. Les musulmans du banc arrière ne font que se lever ou s’asseoir, cela se comprend (mais je n’aime tout de même pas les regards vipérins qui me fixent).

Après, c’est le moment joyeux du cimetière, ou tout le monde se dit « un jour ce sera moi dans le cercueil qui descend », car la mort des autres nous fait penser à la nôtre et que c’est comme ça.

Les pauvres gens s’attardent. Ils savent qu’un goûter est prévu chez Catherine, et ils attendront vainement d’y être invités.

Et puis après, il y aura la trêve, aucune allusions aux sales mots dits. Sissi a été chapitrée par sa mère, ou elle s’est renseignée. Elle ne s’adresse à moi que pour demander des précisions sur la famille, avec le sourire. Même à un moment où nous nous retrouvons seules dans la cuisine, elle ne fait allusion à rien.

Un enterrement c’est aussi le moment où l’on évoque les disparus plus anciens, où on les replace dans l’arbre de la famille en prenant des notes pour les généalogistes, où l’on cite une anecdote amusante, c’est la famille qui se soude tout à coup, une tasse de thé ou de café à la main, un gâteau dans l’autre…

C’est une cérémonie après la solennelle, le sale coup du cimetière, un peu de chaud au coeur.

Quand nous sommes partis, Catherine m’a embrassée en me murmurant « faites ce qu’il y a à faire ».

La parenthèse était refermée, nous avons fait ce qu’il y avait à faire…

Car la vie n’est qu’un long calvaire…

(Photo : la gentille sorcière)

(Musique accompagnant l’arrivée du cercueil dans l’église (donc forcément remonte moral…)… J’aurais gagné 1000 euros si quelqu’un avait soutenu le pari que ce n’était pas l’Adagio d’Albinoni mi5xaMIX_h8)